À Berlin, les fans du Hertha ont été déçu du premier semestre, mais l’arrivée de Jürgen Klinsmann sur le banc semble apporter un renouveau. Depuis sa nomination en novembre, Die Älte Dame est omniprésente dans les médias allemands et européens et, grâce à Klinsmann, dégage une attractivité nouvelle qui semble quelque peu énigmatique pour le grand public. Analyse d’un club qui souhaite changer de dimension
Actuel 12ème de Bundesliga, le Hertha BSC connait une agitation médiatique inhabituelle pour un club sans grande histoire à l’échelle nationale et européenne avec seulement deux titres de champions d’Allemagne en 1930 et 1931, au palmarès. Il ne déchaine d’ailleurs pas les passions au sein même de sa localité, le taux de remplissage de l’Olympiastadion n’est que de 66% en moyenne (le plus faible d’Allemagne). Une réalité chamboulée cet été par l’arrivée de l’investisseur Lars Windhorst, un businessman allemand particulièrement décrié Outre-Rhin mais dont la volonté est de faire de Die Alte Dame, un club capable de “jouer le titre dans 3 à 5 ans“.

Détenteur de 49,9% des parts du club (maximum autorisé par la loi 50+1) grâce à un investissement de 224 millions d’euros, Windhorst n’a pas choisi le Hertha par hasard. Certes, l’équipe présente une image quelconque mais elle reste implantée dans une mégapole européenne à la renommée mondiale. Suffisant pour le “Bill Gates allemand” qui y voit surtout une opportunité économique plutôt qu’un réel intérêt sportif. Quoi qu’il en soit, l’homme est intelligent et sait comment parvenir à ses fins.
Des résultats pas encore au diapason des ambitions
La saison a commencé avec un nouvel entraineur à la tête du club de la capitale : Ante Covic, jusqu’alors en charge de la réserve, prend la place de l’icône locale, Pal Dardai. L’entraineur né à Berlin, a pour mission de pratiquer un football offensif et attrayant. Le match nul contre le Bayern (2-2) en ouverture du championnat semble aller dans ce sens, malheureusement la suite est plus précaire et rapidement, une dynamique négative s’installe.
L’équipe n’avance dès lors plus, perd le derby contre Union et semble au bord du gouffre, alors que les fans ont perdu tout enthousiasme face aux promesses de beau jeu sans application concrète. Le club n’a d’autre perspective que la lutte pour le maintien, loin des réalisations souhaitée par le nouvel investisseur, Windhorst. C’est ce dernier qui, avec le soutien du directeur sportif Michael Preetz, décide de la nomination de Jürgen Klinsmann en lieu et place de Covic, en novembre.
“Dans toutes les discussions que j’ai eu avec Lars Windhorst, j’ai pu ressentir l’enthousiasme, la joie et la confiance de toutes les personnes impliquées et je suis convaincu que je peux contribuer à en faire un partenariat concluant avec mon expérience et mon réseau” déclarait l’ancien attaquant de Stuttgart à son arrivée.
Une figure de proue et un coup de projecteur pour un club jusqu’ici anonyme à l’échelle nationale.
Jürgen Klinsmann : un coup pour le club et la ville
Il faut l’admettre, le Hertha souhaite obtenir une légitimité nouvelle et se donne les moyens de l’avoir. Klinsmann, bien que moins en vue ces dernières années (entraineur de la sélection américaine de 2011 à 2016), reste un nom à l’échelle nationale et internationale. D’autres solutions moins “voyantes” comme Dieter Hecking ou Bruno Labbadia, n’auraient pas eu un apport médiatique si significatif. Depuis, Berlin apparait régulièrement dans la presse nationale et européenne, une réalité plus en adéquation avec la volonté asssurée de grandir vite et haut, afin de concurrencer le Bayern pour la quête du titre.

Un renouveau qui par ailleurs, ne fait que s’amorcer. Avec son aura, l’ex sélectionneur de la Mannschaft (3ème du mondial 2006, 2004-2006) peut créer une union sacrée qui rassemblera les supporters, les médias et surtout l’équipe. Lui-même déclarant “être ravi de faire partie du projet de football le plus excitant d’Europe“. Une opportunité pour le Hertha BSC, qui permet de vendre un projet attractif mais qui manque encore de joueur porteur, qui lui assurera une certaine pérennité.
Draxler, Xhaka, Götze : un mercato ambitieux mais irréaliste ?
En quête de ces derniers, la direction sportive ne lésine pas pour les obtenir, Xhaka, Draxler, Götze et d’autres hantent les rubriques mercato des journaux européens. La France n’échappant pas à ce constat avec les rumeurs persistantes autour de Lucas Tousart ou Morgan Sanson. Une réalité nouvelle, qui était impensable il y a seulement quelques mois, mais que l’argent de Windhorst a rendu possible.

Le risque d’échec est cependant bien présent. Ces changements rapides de statut n’ont que rarement été couronné de succès par le passé, surtout sans vision sur le long terme, les exemples de Leipzig et Hoffenheim sont à suivre dans ce sens. Il semble également peu probable que la vieille dame réussisse à tout révolutionner dans l’immédiat. Les futurs transactions apporteront un élément de réponse sur l’avenir prochain et sur les possibilités de celui-ci.
La signature du Suisse Xhaka ou celle de Lucas Tousart serait un saut qualitatif et un premier pas vers l’obtention d’une nouvelle stature, plus internationale. Les arrivées de Götze ou Draxler semblent plus hypothétique à ce niveau de développement. Preuve en est, la première recrue, Santiago Ascacibar est un international Argentin (3 sélections) de 22 ans, acheté du côté de Stuttgart en D2.
Une deuxième partie de saison capitale
Si les bleus et blancs doivent se renforcer, ils doivent aussi vendre. Avec 34 joueurs sous contrat, le Hertha BSC est l’équipe de Bundesliga possédant le plus de joueur dans son effectif. Les candidats au départ sont donc nombreux, à l’image de l’expérimenté Salomon Kalou ou de Löwen et Duda, déjà partis. Une situation qui accentue le bouleversement entrepris, Klinsmann lui même n’est qu’une solution à court terme, son poste au sein du conseil de surveillance du club étant déjà prêt.

L’ambition de Windhorst se porte sur un coach à la dimension internationale et plus à même d’installer le club dans ses objectifs sur le long terme. La cible prioritaire est Niko Kovac, l’ex-coach du Bayern présente l’avantage d’avoir évolué au club de 1991 à 1996 puis de 2003 à 2006. Cependant, suite à son limogeage du sextuple champion en titre, le Croate souhaite prendre du recul avant d’accepter un nouveau projet. Une arrivée à l’été 2020 n’est pas à exclure selon Kicker.
Pour cela, le club berlinois doit rester en Bundesliga. Klinsmann a déjà réussi à faire en sorte que l’équipe relève la tête (2 victoires, 2 nuls et 1 défaite), mais confirme que l’arrivée de renfort, notamment défensif est obligatoire. Une solidité nouvelle est à retrouver afin de s’extirper de la lutte pour le maintien, sans quoi le désastre pourrait être total. Car historiquement, le Hertha souffre d’une réelle faiblesse chronique sur les phases retours, une habitude que Klinsmann devra à tout prix bannir. Dans ce cas, une évolution positive dans la dynamique des résultats s’avèrera salvatrice en terme d’image et pour la clarification du projet de nouveau stade -un projet d’une nouvelle enceinte de 55 000 places est en pourparlers- assurant dès lors un réel ancrage sur le long terme.
Dans l’absolue, le Hertha reste un club occupant la 12ème place de Bundesliga et malgré des moyens financiers décuplés, il lui faudra du temps pour concrétiser ses ambitions. À l’image de son mercato hivernal ambitieux mais sans réelle application (à l’heure actuelle), le club Berlinois mesure le chemin qu’il lui reste à parcourir pour devenir un géant du football germanique.