Au rang des déceptions, Lyonnais et Stéphanois sont présents. Avec des objectifs différents en début de saison, les éternels rivaux semblent tout deux empêtrés dans une situation dont on peine à entrevoir une issue positive d’ici à la fin de saison. Bien que l’Olympique Lyonnais ait un avantage au classement sur les Verts, personne ne peut se targuer de réussir une belle saison. Entre Rhône et Loire, rien ne va plus. Comment les historiques ennemis de Ligue 1 en sont-ils arrivés ici ?
Constat commun : un cruel manque de points
Contextualisons. En Ligue 1 Conforama, l’Olympique Lyonnais se classe 11ème et compte 34 points après 25 journées. C’est peu, pour un club dont l’objectif principal est de se qualifier pour la Ligue des Champions. Avec 9 défaites au compteur, l’OL totalise déjà un revers de plus que l’an dernier (l’OL avait terminé 3ème). Pire encore que les résultats bruts, c’est le jeu proposé par l’OL qui agace. À l’imaginatif Sylvinho a succédé le restrictif Rudi Garcia ; une recette qui ne porte pas encore ses fruits. Une chose est sûre, les hommes de Jean-Michel Aulas n’étaient pas parti là-dessus en début de saison. Toutefois, il y a bel et bien des motifs de satisfaction. Tout d’abord les Lyonnais sont en lice dans les deux coupes nationales. Le 4 mars prochain, les joueurs de Rudi Garcia recevront l’ogre parisien en demi-finale de Coupe de France. Un mois plus tard, le 4 avril, un nouvel affrontement entre Parisiens et Lyonnais est au programme, à l’occasion de la finale de Coupe de la Ligue (la dernière). Deux matchs de gala qui pourraient faire basculer la saison de l’OL du bon côté. Enfin, Lyon s’avance devant un mur : la Juventus de Turin d’un certain Cristiano Ronaldo.

A Saint-Étienne, la situation est pire encore. S’ils ne sont qu’à 6 points de l’OL, les Verts sont surtout à portée de fusil du barragiste dijonnais, avec deux points d’avance seulement sur le 18ème. L’ASSE est la deuxième équipe à avoir perdu le plus de matchs cette saison (13 défaites, contre 18 pour le TFC). Les ambitions stéphanoises n’étaient pas les mêmes que celles du rival lyonnais, certes, mais après la belle 4ème place de l’an dernier, le peuple vert attendait une nouvelle qualification européenne. Aujourd’hui, c’est la mission maintien qui semble enclenchée. Restés sur 4 défaites de rang, les joueurs de Claude Puel sont dans l’obligation de redresser significativement la barre dans un futur très proche. De plus, la folle remontée entamée par le Nîmes Olympique met la pression à des Stéphanois déjà bien bas au classement (16ème). Pour espérer sauver une saison calamiteuse, les Verts pourront compter sur la Coupe de France ; ils recevront le Stade Rennais le 5 mars prochain pour rejoindre l’OL ou le PSG en finale. Un maintien et une finale de Coupe : voilà tout ce que l’ASSE doit espérer pour obtenir le pardon de ses fans.
Le problème : des erreurs humaines et des blessures
Dès le début de la saison, plusieurs questions ont été soulevées par les supporters d’un camp comme de l’autre, à commencer par celle de l’entraîneur. Au très apprécié Jean-Louis Gasset a succédé son adjoint Ghislain Printant dans le Forez. Le départ (logique?) de Bruno Genesio a entraîné la nomination de Sylvinho, appelé par Juninho, à Lyon. Deux nouveaux entraîneurs plus ou moins expérimentés, et qui se sont tous les deux pris les pieds dans le tapis. Après des premières semaines positives, les deux techniciens ont vu leurs équipes faire face à un immense trou d’air. En championnat, les deux clubs sombrent ; en coupe d’Europe, ils survivent tant bien que mal. Le point d’orgue de ce début de saison en demi-teinte intervient au début du mois d’octobre : le Derby.
Ce Derby entre mal classés sonne la fin de l’aventure pour les deux entraîneurs. Ghislain Printant a été remercié par ses dirigeants avant cet affrontement, remplacé par Claude Puel. Sylvinho, lui, a vécu ce Derby comme son dernier match sur le banc du club du Rhône. Il est démis de ses fonctions à l’issue de la victoire stéphanoise (1-0) puis remplacé par Rudi Garcia, à la grande surprise des supporters Lyonnais (et de tout le reste de la France). Des débuts idylliques pour Puel, qui surfe un temps sur ce succès avant de connaître un hiver bien morose.

Les choix de coachs ont pesé sur les saisons des deux clubs rivaux, mais il ne faut pas négliger les importantes blessures auxquelles ces deux institutions font face. Côté Lyonnais, un double coup dur a frappé l’effectif lors du match face à Rennes. Coup sur coup, Memphis Depay (14 buts en 18 matchs) et Jeff Reine-Adélaïde sont touchés aux ligaments croisés. S’ajoute à ça la blessure au ménisque de Léo Dubois qui l’a tenu éloigné des terrains plusieurs semaines. Privé de tant d’éléments importants, l’OL de Rudi Garcia a été méchamment impacté. Les statistiques et le caractère de Memphis manquent cruellement à des Lyonnais qui s’en remettent au talent d’Houssem Aouar notamment. Les Stéphanois également jouent de malchance avec la blessure de Zayou Youssouf. Arrivé cet été, l’ex-bordelais a été le meilleur milieu de terrain du Forez depuis l’arrivée de Puel. Touché au genou, il laisse un entrejeu orphelin. De plus, les blessures à répétition de Khazri, Hamouma, voire Saliba n’aident pas l’ASSE.
Des doutes dans le jeu et un avenir flou
Ce qui énerve le plus les supporters lyonnais : les choix tactiques de Garcia. En s’entêtant à faire évoluer Maxwell Cornet arrière gauche plutôt que de promouvoir un jeune du centre de formation, Garcia rompt avec la tradition lyonnaise. De plus, les titularisations systématiques de Lucas Tousart font parler. Toutefois, avec Caqueret et Cherki, l’OL possède deux extraordinaires pépites qui parviennent tout de même à montrer leur talent. Mais où va l’OL ? Avec un bilan comptable en dessous des attentes, les fans de l’OL s’attendent à une efficacité plus importante. Les récents matchs tendent au mieux, mais le chemin est encore long pour aller gratter une troisième place. En revanche, l’avenir à long terme de Rudi Garcia pose question.
A Saint-Etienne, l’urgence est plus importante encore. Le récent accrochage entre Stéphane Ruffier et Claude Puel n’apaise en rien les tensions pré-existantes, et les déclarations de Patrick Glanz (agent de Ruffier) mettent encore un peu plus d’huile sur le feu. Mis à l’écart par Puel en raison de ses dernières performances, Stéphane Ruffier a quitté l’entraînement plus tôt que prévu, pestant contre cette décision forte. En déclarant que Puel savait se faire détester là où il passait, Glanz officialise la rupture entre le nouveau coach des Verts et une partie du vestiaire. En fin de cycle, l’ASSE doit absolument se maintenir en Ligue 1 cette année et reconstruire entièrement son effectif la saison prochaine. Un chantier colossal dont on se demande la crédibilité. Les dirigeants stéphanois sont fantomatiques en cette période de crise, et il est bien compliqué de savoir comment la situation évoluera. Il est encore plus compliqué d’envisager une issue positive tant le schisme semble profond entre Puel et ses joueurs.

Les raisons d’y croire
Alors tout est noir ? Non. Bien sûr que non. Les joueurs de l’ASSE pourront compter sur le soutien indéfectible de leurs supporters pour les soutenir dans cette triste période, ce qui constitue déjà un premier renfort. De plus, l’effectif stéphanois a largement de quoi décrocher un laborieux maintien. Personne ne semble sauvé définitivement en bas de tableau ; tout reste ouvert. Enfin, la demi-finale de Coupe de France (face à Rennes le 5 mars), peut sonner comme un électrochoc, et réveiller ainsi un club pris dans une crise inattendue. L’effectif stéphanois est compétitif, il faudra alors convertir ce potentiel en résultat pour sortir définitivement la tête de l’eau. Même si les joueurs stéphanois porteront longtemps les stigmates de cette saison, il doivent se maintenir en Ligue 1.
A Lyon, la situation est moins dramatique, et les raisons d’entrevoir un futur positif sont nombreuses. Il y a tout d’abord la Ligue des Champions. En s’offrant une double-confrontation de gala face à la Juventus de Turin, les Lyonnais profiteront d’une parenthèse enchantée. Ils y laisseront de l’énergie, mais quand on connaît la propension de ces joueurs-là à se sublimer dans les grands matchs, cet affrontement peut être un cadeau pour les Gones. Encore ne lice dans les deux coupes domestiques, les Lyonnais peuvent rêver d’un titre. Il faudra battre le PSG pour cela, mais c’est chose possible. Enfin, l’émergence de certains jeunes joueurs et la signature d’un nouveau brésilien, Bruno Guimaraes, donnent des espoirs légitimes aux fans du Rhône.

Il y a fort à parier que les fins de saisons de l’ASSE et de l’OL se jouent sur des détails. Le prochain rendez-vous de marque aura lieu le 1 mars, au Groupama Stadium. Ce derby comptera pour la 27ème journée de Ligue 1 et pourrait faire plonger le vaincu définitivement. Le vainqueur en revanche redressera la barre d’une saison plus que moyenne. En cas de match nul, personne ne serait vraiment mieux loti qu’un autre.
Dans le fond, on peut légitimement penser que l’OL est mieux armé pour finir la saison 2019/2020. Un effectif plus talentueux, un budget supérieur, et des belles compétitions à jouer… Mais les saisons peuvent se jouer sur des détails, et nul doute que Stéphanois et Lyonnais n’ont pas la même définition d’une saison réussie. Une saison qui pourrait d’ailleurs se finir par un Derby fou en finale de Coupe de France. Qui d’Aulas ou de Romeyer finira la saison en fanfare ? Rien n’est écrit, mais tout cela s’annonce bouillant.