Que ce soit au PSG, ou en Equipe de France, la question du N°9 est aujourd’hui en suspens. Avec un Giroud vieillissant et une relève pas réellement convaincante en Equipe de France, un Cavani en partance et un Icardi dont on ne sait quel sera le futur, le boulevard semble ouvert à Mbappé. Problème, jusqu’ici, il n’as que rarement prouvé qu’il était capable d’occuper seul une position axiale. Pis, son match aller face à Dortmund à montré toutes ses limites à ce poste. Pour ce qui est sûrement le meilleur joueur Français, la problématique se pose: Mbappé peut-il jouer seul en pointe ?
Qu’attend t-on d’un buteur ?
Mais avant même de décrypter le jeu d’Mbappé, il faut savoir ce que l’on attend d’un buteur. Il y a d’abord ce rôle de premier défenseur, de premier rideau et de premier pressing. Ensuite, il y a les duels : les 1 contre 1, les duels aériens, les duels physiques (épaules ou dos au but) et les duels de vitesse. Tout aussi important, l’utilisation du ballon: savoir l’emmener vers l’avant, savoir trouver ses coéquipiers, savoir pousser le ballon au fond des filets dans en une touche de balle, savoir se retourner et trouver le but. La frappe aussi, la capacité à toujours trouver le meilleur angle de frappe, contourner un défenseur et déclencher instantanément.

Mais surtout, le plus important : les déplacements sans ballons. Car si le rôle d’un attaquant est de marquer, il doit pour cela, déstabiliser le bloc adverse, afin de permettre a ses coéquipiers de mener l’attaque avec lui. Pour cela, plusieurs solutions: emmener la défense le plus proche possible de son but comme Jamie Vardy, se déplacer sur toute la largeur du terrain comme Benzema, jouer en pivot comme Giroud afin de faire avancer l’équipe.
Enfin, il y a aussi les placements/déplacements qui vont permettre de se trouver seul, de pouvoir recevoir le ballon dans sa course, couper un centre ou être trouvé en position de frappe. Tout cela, ce sont des caractéristiques que l’on retrouve en plus ou moins fortes quantités chez les excellents buteurs: Lewandowski, Inzaghi, Suarez, Van Persie, etc. Peut-on le retrouver chez “le génie français”?
Mentalité, travail défensif et jeu aérien.
Lorsque l’on connaît la mentalité d’Mbappé, son éthique de travail et sa soif de records, de chiffres et de titres, on est en droit d’espérer que le champion du monde se donne les moyens de devenir un excellent n°9. Cependant, on lui voit aujourd’hui beaucoup de limites à ce poste, sur lesquelles il devra énormément travailler. Déjà, sur l’aspect défensif. Mbappé est un joueur qui presse peu, qui se réserve. Malheureusement, le poste de buteur ne permet pas de “paresse” sur le premier travail défensif. Ensuite, sur la gestion des seconds ballons : le parisien ne montre jamais une forte détermination à s’imposer dans ce duel.

Les duels sont, d’ailleurs, de manière générale, un problème à l’évolution du Français seul en pointe. D’abord parce qu’il a du mal dans les duels aériens, si importants dans ce rôle de buteur: l’anticipation, la détente, et le jeu de tête. Il a aussi du mal à résister à la pression dos au but, en étant arrêté, ce qui est si important pour un 9 afin de conserver la balle lorsque ses partenaires se démarquent. Enfin, Mbappé est constamment attiré par le but, et par la surface. Ce qui ne suffit pas lorsque l’on doit jouer contre un bloc bas, ou il faut décrocher, donner puis se déplacer, combiner dans les petits espaces, faire jouer les autres, etc.
Dévoreur d’espaces.
Mbappé possède tout de même des qualités qu’il est inutile de rapppeler: technique, vitesse, accélération, explosivité, sens du but, finition, appels dans la surface, appels en profondeur, etc. Avec toutes ces qualités, Mbappé brillera toujours, mais l’essentiel est ailleurs: comment exploiter au mieux ces capacités? Ce dont a besoin Mbappé dans un premier temps, c’est des espaces. Lorsqu’il possède de l’espace à attaquer, que ce soit balle au pied ou en proposant des appels, il est dévastateur. Vous voulez des exemples ? France-Argentine 2018, PSG-OL saison 2018/2019, OL-PSG coupe de France 2019. Tous ces matchs qu’Mbappé a dominé, ont été des matchs ou loe parisien avait de l’espace afin d’exprimer ses qualités. Et en n°9, ces déplacements, ces espaces, sont bien plus rares en raison de la densité qui l’entoure, d’autant plus lorsqu’on est un joueur de classe mondiale, ciblé par les défenseurs adverses comme il l’est.

Du temps. Voilà ce dont aurait besoin le français afin de se former à ce poste. Le temps, c’est ce qu’il a eu tout le temps de sa formation ou il a été utilisé comme ailier. Et ça se voit. Dès qu’il se retrouve dans cette position, on sent ces réflexes, acquis lors de sa formation resurgir. Il sait comment combiner avec son défenseur latéral, il sait comment et quand il doit accélérer et ralentir le jeu, il sait décrocher et appeler dans la profondeur après avoir remisé, et sa science du dribble, du 1 contre 1 est dévastatrice.
De plus, on soulignait le fait qu’Mbappé est toujours attiré par la surface, et cela rend la tâche très difficile au joueur dans sa zone, qui se sent obligé de dézoner et libère un espace, ou qui reste en place et laisse un surnombre se mettre en place.
La filiation CR7.

Idéalement, Mbappé doit évoluer dans un système asymétrique, ou il est placé, sur le papier, sur l’aile droite, ce qui vaut par exemple en phase défensive. En revanche, il doit évoluer presque comme un second buteur, tout en restant du côté droit du terrain, sur les phases offensives. Il sera, de ce fait, beaucoup plus dangereux, apte à créer des espaces, à aller provoquer, dribbler, se servir de ses qualités physiques. A aujourd’hui 21 ans, le parisien possède de grandes années devant lui et il serait dommage de les gâcher dans un rôle qui ne lui convient pas parfaitement. Cette position de “faux second attaquant” n’est pas sans rappeler l’utilisation de CR7 sous Zidane, l’idole d’Mbappé. CR7 a pris son temps avant de se replacer dans l’axe, a attendu la trentaine et des qualités physiques un peu réduites. Le Portugais doit servir d’exemple au meilleur buteur de Ligue 1, afin de rester ce provocateur, ce dribbleur fou, attiré par le but oui, mais pas seulement. On rêve de le revoir lancé dans ses courses folles, faire tomber le latéral adverse avec de multiples feintes, de le voir provoquer dans la surface et obtenir des pénaltys, de le voir faire des talonnades pour trouver dans son dos le latéral lancé. En bref, on recherche le Mbappé insouciant, celui qui était si dangereux, si prolifique et qui faisait rêver toute la France.
En résumé, le Français n’est pas encore fait pour jouer un rôle de buteur. Ou, a minima, pas seul. Mais il est impossible de prévoir l’avenir d’un joueur pareil, et nul ne sait si, à l’avenir, il saura gommer ses défauts et devenir un numéro 9 de très haut niveau. En attendant, le triple champion de France doit savoir prendre son temps, apprendre à différents postes et ne pas se concentrer sur les chiffres. Redevenir celui qui nous fait rêver, celui qui nous laisse un frisson lorsqu’il accélère balle au pied, dont on sait que quelque chose peut se passer, qu’un stade peut se lever, qu’un défenseur peut tomber et que les filets peuvent trembler.