Avec 32 matchs, 8 buts et 9 passes décisives, le bilan de Philippe Coutinho sous le maillot du Bayern peut sembler honorable. Seulement, ses performances ont été plus que ternes. Dans le jeu, il n’a jamais semblé se fondre complètement dans le collectif bavarois. En évoluant à 3 postes différents, il a encore fait étalage de sa (fausse) polyvalence. Depuis le début de sa carrière, le Brésilien a connu six postes différentes. Se pose alors la question de savoir quel positionnement lui sied le plus, et quelle animation doit se fixer autour de lui afin de le faire briller. Et parce qu’on est sympa, on a mené l’enquête pour vous.
Afin de définir son meilleur poste, il va de soi de jeter un oeil aux stats, afin de se faire une première idée de son rendu dans ses différents rôles. Sur l’ensemble de sa carrière, deux postes se dégagent principalement. Vous pensez à n°10 et ailier gauche ? Pas vraiment. Si l’on prend, par exemple, les buts par 90 minutes, Coutinho possède 0.3 et 0.34 sur chacun de ces postes. Mais, au poste de milieu central et de milieu offensif gauche, il cumule respectivement 0.44 et 0.84. Si ces stats ont tendance à descendre sur les Expected Goals par 90 minutes, elles restent tout de même plus élevées sur le poste de milieu offensif gauche avec 0.51 XGoals par 90 minutes. Afin de ne pas vous abreuver de stats et pour que ce soit compréhensible, voici un tableau récapitulatif des différentes statistiques offensives récoltées sur la carrière de Coutinho (depuis 2014).
Buts/90 | Xbuts/90 | Tirs/90 | PD/90 | XPD/90 | Passes clés | |
Ailier gauche | 0,34 | 0,32 | 3,56 | 0,22 | 0,22 | 2,04 |
Ailier droit | 0,13 | 0,13 | 3,02 | 0,13 | 0,2 | 2,23 |
Milieu offensif | 0,3 | 0,26 | 3,44 | 0,3 | 0,2 | 1,74 |
Milieu cenral | 0,44 | 0,25 | 3,98 | 0,29 | 0,31 | 2,41 |
Le tableau nous indique que Coutinho est meilleur à 2 postes : Milieu central et milieu offensif gauche. Mais pourquoi?
Les qualités d’un meneur de jeu ?
Avant de s’intéresser plus amplement à son profil, il faut dessiner les forces et les faiblesses du joueur. Le Brésilien est, avant tout, un très bon tireur. Sa très grosse puissance alliée à sa technique de pied, font de lui un excellent tireur de coup de pieds arrêtés, mais aussi un excellent buteur “longue distance”.
Très technique, Klopp le décrit comme un joueur “fort dans les petits espaces“, capable de conserver le ballon. Son agilité lui permet de feinter avec son corps, ce qui lui permet aussi d’être assez imprévisible (2 dribbles par 90 minutes sur l’ensemble de sa carrière). Le joueur de 27 ans est un bon passeur, notamment sur le jeu long, mais n’as pas une vision de jeu au-dessus du lot. Physiquement, il est aussi doté d’une vitesse correcte, malgré une accélération moyenne. En revanche, l’une des qualités les plus importantes du joueur formé à Vasco de Gama, c’est son attirance vers le but. En effet, celui-ci cherche, dès la récupération, à se lancer à l’assaut du but. Cela se voit aussi par son placement. Dans le dernier tiers du terrain, il a aussi une tendance à analyser le meilleur placement afin d’être décisif, plutôt que de demander la balle constamment. Enfin, le joueur prêté par le Barca n’a pas une grosse activité défensive, n’est pas un bon tacleur, bien qu’il soit impliqué dans l’effort collectif et ne rechigne pas à effectuer ses replis.

Son activité assez légère défensivement s’explique aussi par ses capacités physiques: peu endurant, peu influent dans les duels physiques, il n’est pas taillé pour réaliser un très gros pressing. Sa tendance à ne pas se rendre disponible constamment est aussi impactée par ce manque d’endurance. Et balle au pied ? Tout en possédant une belle technique, nous avons évoqué sa vision du jeu assez commune, qui est une des composantes de son manque de personnalité balle au pied. Ce manque de courage a pour résultante ses difficultés contre un bloc bas : le brésilien est souvent amené à effectuer des passes latérales, ou à attendre que ses coéquipiers déséquilibrent la défense ou provoquent des espaces via leurs appels. Coutinho est donc un meneur ayant besoin d’espace, de vitesse vers le but, efficace face aux défenses qui reculent, et non face aux blocs déjà en place. Son côté “imprévisible” est un poison pour les défenseurs, obligés de réagir très vite à un joueur qui analyse encore plus vite ou l’espace doit être attaqué, tout en sachant qu’il peut frapper de loin.
“Le remplacant d’Iniesta.”

Le football moderne a mis en place, malgré lui, une ressemblance parmi tous les profils. Seulement, certains joueurs sortent de ces cases, et l’on tente souvent de les y faire rentrer. C’est le cas du Brésilien, que l’on décrit souvent à tort comme un n°10. Ce n’est pas un organisateur de jeu, il n’est pas non plus un joueur qui donne du liant à l’équipe, il est un artiste. Un joueur rare qu’on a cherché à faire ressembler à d’autres. Son côté spectaculaire lui a permis de se faire remarquer par les spectateurs du monde entier, trouvant dans le n°10 du Bayern un joueur qui les fait rêver. Lors de son achat par le FC Barcelone, Coutinho paie tout cela : son prix, et les conditions de son achat (remplacer Neymar et Iniesta) lui collent l’étiquette d’une star amenée à s’intégrer dans le système des blaugranas. Mais cela n’arrivera jamais, et pour cause : baladé de poste en poste, il ne trouve pas ses repères, et n’est pas adapté au style de jeu, où les combinaisons courtes (héritage Barca) et les exploits individuels (plan de jeu de Valverde) sont de mise. En évoluant la majorité du temps contre des équipes regroupées devant leur but, Coutinho ne peut faire briller ses qualités les plus importantes, et va donc être envoyé en prêt au Bayern Munich en prêt cette saison.

Seulement, les Bavarois s’en font l’image d’un joueur capable d’occuper l’aile, d’être un ailier de différences. N’étant pas une machine à centrer, loin de posséder la vitesse d’un Gnabry, Coman voire Perisic, Coutinho n’est pas un titulaire à part entière. Encore une fois, le joueur d’1m72 souffre de son image, de son profil. Pourtant, dès ses premiers matchs avec l’Inter en début de décennie 2010, ses difficultés au poste d’ailier sont criantes. Sans science des appels de balles, sans capacité à accélérer le long de la ligne, il repique dans l’axe et empiète souvent sur les plates-bandes de Sneijder. Si bien que la différence avec un jeune Biabiany, de l’autre côté, est remarquable. Mais alors, comment intégrer Coutinho dans un système tactique ?
Quelle animation autour du joueur prêté par le Barca ?
Je préférai le voir en n°8, ou il était très bon, ou sur l’aile gauche, ou il était excellent.
Jurgen Klopp sur Coutinho.
On l’a vu durant 1 an et demi avec le Barca, et cette saison dans une moindre mesure, Coutinho n’est pas à l’aise contre les blocs bas. En revanche, il est très dangereux dès l’instant qu’il a de l’espace devant lui. En ce sens, il faut choisir de placer Coutinho dans un plan de jeu qui ne vise pas à la conservation de balle et au jeu de position. L’ex de l’Inter doit jouir d’une certaine liberté, qu’il soit sur l’aile ou en milieu relayeur. Klopp l’avait bien compris à Liverpool : “Je l’utilisais rarement en n°10. Je préférai le voir en n°8, où il était très bon, ou sur l’aile gauche, où il était excellent.” Dans ces différents positionnements, Coutinho était chargé de réaliser ses retours défensifs, tout en étant assez libéré de celles-ci par ses coéquipiers du milieu qui couvraient ses courses et ses errements, notamment le précieux Henderson et son immense travail de l’ombre.

Lorsqu’il évoluait sur l’aile gauche, sa tendance à repiquer dans l’axe était vitale, laissant de la place à Robertson pour aller centrer, mais aussi afin de pouvoir donner le ballon dans l’axe à Salah, mais aussi de pouvoir frapper. Sur les 22 buts inscrits en dehors de la surface en championnat depuis 2014, 16 de ses buts ont été inscrits à Liverpool.

Sur le volet création de jeu, le N°10 bavarois doit pouvoir profiter d’espaces. En ce sens, il est taillé pour jouer dans une équipe qui cherche à aller de l’avant très vite. Les équipes Red Bull, Liverpool, voire l’Atalanta, conviendraient parfaitement au Brésilien. Avec sa capacité d’analyse et d’action très rapide, il est très efficace lorsqu’il s’agit de grimper très vite sur le terrain, ou sa vitesse, sa vision du jeu et sa capacité technique déséquilibrent les lignes adverses. Jurgen Klopp encore : “Il a une vision exceptionnelle des situations”. Il est essentiel aussi de laisser de l’espace au Brésilien, ne pas avoir de joueurs qui viennent marcher dans sa zone, tant sa qualité de passe longue, de dribbles et de frappes lointaines peuvent s’avérer décisives. Enfin, la vitesse du jeu est essentielle. Lorsqu’une équipe recule ou est en passe d’être déséquilibrée, le joueur d’1m72 est un des meilleurs joueurs du monde. En ce sens, ses coéquipiers doivent être assez actifs, assez mobiles et proposer des solutions au porteur de balle.
Depuis presque 10 ans maintenant, Coutinho sillonne les pelouses Européennes et ses frappes brossées caressent les filets de dizaines de stades. Grâce au site Footballia.com, il est possible de retracer une partie de sa carrière, et c’est en grande partie grâce à cette banque de matchs gratuite en ligne que cet article a pu voir le jour. Mais, alors que le mercato approche, les rumeurs commencent à enfler autour de Coutinho: un coup les blaugranas cherchent à le vendre, un coup Sétien semble l’intégrer à ses plans. Deux possibilités alors : si Sétien cherche réellement à se servir de Coutinho, il va devoir organiser son équipe en fonction du Brésilien, tout en prenant en compte le fait que Messi doit, lui aussi, être assez libéré et libre. Sinon, si l’homme aux 145 millions d’euros est amené à partir, il doit rallier une équipe qui sied à ses qualités, et qui le place au cœur de son projet de jeu. En tout cas, au CCS, on rêve de revoir ses talonnades, ses feintes de corps et ses frappes lointaines le plus rapidement possible.