Une histoire de famille

Le père et le fils Mahé, entre Bronzés et Experts

Le sport est parfois une histoire de famille. Lorsqu’on a un père ou une mère qui a brillé au plus haut niveau, l’héritage est parfois lourd à porter, et les enfants de stars ne parviennent pas toujours à emprunter le chemin associé à leurs noms. Mais ça peut aussi être tout l’inverse. Ils sont nombreux à avoir su imiter leurs glorieux aînés pour se faire une place parmi les grands noms de leurs disciplines. Nouvel épisode des « Histoires de famille » alors que le championnat du monde a débuté, parlons des Mahé et de leur grande place dans l’histoire du handball français.

Ils ont vécu la même gloire à 20 ans d’intervalle. Pascal et Kentin Mahé ont tous les deux joué un rôle crucial pour hisser la France sur le toit du handball mondial. L’un fait partie des pionniers, de la première équipe à avoir amené médailles et sacre à l’équipe masculine de handball tricolore. L’autre fait partie d’une génération dorée, plus habituée aux titres qu’aux déceptions. Tous les deux reconnus pour leur talent indéniable sur les jets de 7m, ils ont pourtant un style de jeu bien différent. Kentin le demi-centre/ailier et Pascal le défenseur/arrière ont tout de même une belle passion en commun, celle du sport et du handball.

Pascal le défricheur

Qu’on se le dise, Pascal Mahé est un des précurseurs du handball français. En 297 sélections (739 buts) avec les Bronzés, puis les Barjots, il a vécu les premières heures de gloire de l’équipe de France. Né en 1963, l’actuel entraîneur de Caen débute sa carrière chez les Vikings de son Calvados natal. Il part ensuite rapidement en région parisienne pour jouer sous les couleurs du Paris Université Club, puis de Créteil. C’est d’ailleurs chez les Cristoliens que l’arrière, reconnu comme un des meilleurs défenseurs du monde, a vécu ses plus belles heures en club. En 1989, Pascal Mahé et Créteil réalisent le doublé coupe-championnat et font un superbe parcours en coupe d’Europe des vainqueurs de coupe. L’USC devient la première équipe française à accéder à une finale de coupe d’Europe mais perd la finale après s’être pourtant imposé lors du match aller, face aux Allemands d’Essen.

Pascal Mahé sous le maillot de l’équipe de France. (Crédits : Facebook.com)

En 1992, il quitte Créteil pour Montpellier. Avant de rejoindre l’Hérault, il fait un détour par Barcelone pour participer aux JO avec l’équipe de France. Sous l’impulsion de joueurs tels qu’Éric Quintin, Laurent Munier et le jeune Jackson Richardson et sous la houlette de Daniel Constantini, la France arrache la première médaille de son histoire. Une médaille de bronze glanée suite à une belle victoire contre l’Islande. Les Bronzés sont nés. L’année suivante, cette même équipe de France surfe sur la vague du succès pour remporter l’argent aux mondiaux. Et en 1995, ceux qu’on appelle désormais les Barjots repartent enfin avec le sacre suprême, lors des mondiaux en Islande. Entre temps, le défenseur remporte son deuxième titre de champion de France avec Montpellier. En 1996, « Kalou » et l’EDF échouent à la 4ème place lors des JO d’Atlanta et le redoutable tireur de jets de 7m part aider Monaco, alors en N2. Le corps meurtri par les nombreuses blessures accumulées au cours de sa carrière, il raccroche peu après un passage en Allemagne, au TSV Bayer Dormagen.

Entraîneur et soutien pour son fils

Avant même la fin de sa carrière de joueur, Pascal Mahé s’est naturellement intéressé au poste d’entraîneur. Dès sa signature à Monaco, il est entraîneur-joueur, prenant comme modèle son ancien sélectionneur, Daniel Constantini. En Allemagne, l’ancien champion du monde s’occupe de la préparation physique, mais aussi de coacher les jeunes et l’équipe réserve de son club. C’est à ce moment-là que son fils, Kentin, est intégré au sein du club. Ce dernier avait déjà fréquenté Monaco en junior, lorsque son père y était.

« J’ai toujours voulu imiter mon père et devenir handballeur professionnel »

Kentin Mahé

Sur le terrain, Kentin n’est pas le rugueux défenseur qu’était son père, mais il possède nombre de qualités. Sa vitesse, son intelligence et surtout son shoot font de lui un superbe joueur, qu’il vaut mieux avoir dans son équipe. Un véritable facteur X. Comme Pascal, Kentin est un redoutable tireur de jets de 7 mètres. C’est d’ailleurs lui qui les tire principalement en équipe de France, depuis la retraite internationale de Michaël Guigou.

Kentin Mahé avec l’équipe de France. (Crédits : Sport 365)

L’ailier/demi-centre est donc formé en Allemagne, dans le club de son père et passe professionnel en 2008. Déjà scruté par l’équipe nationale tricolore, il participe à plusieurs tournois juniors dont les championnats d’Europe 2010, où il termine meilleur buteur et joueur. Cela lui vaut d’ailleurs d’être sélectionné par l’équipe de France A dès 2010, alors qu’il n’a que 19 ans. Passionné par la culture allemande qu’il découvre très tôt dans sa vie, « Tinou » ne cherche pas à passer par le championnat français comme l’avait fait son père. Après le Bayer Dormagen, il rejoint successivement Gummersbach et Hambourg. Comme son père, il échoue en finale de la Coupe des vainqueurs de Coupe en 2011. Quatre ans plus tard, avec les Hambourgeois, il perd cette fois la finale de la Coupe de l’EHF, alors qu’il inscrit 10 buts lors du dernier match.

Le sacre mondial, 20 ans après…

Kentin décide alors de rejoindre Flensburg à partir de 2015. Mais encore une fois, la frustration continue. Roi des 2cde places, Mahé est vice-champion d’Allemagne en 2016 et 2017, et finaliste de la coupe d’Allemagne lors des mêmes saisons. Il réussit enfin à remporter le championnat allemand pour la première et unique fois de sa carrière en 2018. En parallèle, avec l’équipe de France, il est sélectionné en tant que doublure de Michaël Guigou pour les championnats du Monde de 2015. Au Qatar, Mahé n’a pas peur et se montre très important pour la France, qui remporte le tournoi. 20 ans après son père, Kentin est lui aussi champion du monde, avec les Experts.

Il récidive même en 2017 en France, permettant aux tricolore d’empocher leur 6ème sacre mondial. Entre temps, il participe à la conquête de la médaille d’argent, ramenée des JO de Rio en 2016. Kentin est aussi sur le terrain lors des derniers tournois internationaux en date, le championnat d’Europe 2018 et du Monde 2019, où se sont deux médailles de bronze qui remplissent son palmarès. Lors de ces deux compétitions, il fini d’ailleurs deux fois meilleur buteur. Il manque cruellement à l’équipe lors des championnats d’Europe 2020. Blessé, il ne participe pas à la déroute des Bleus.

Pour le championnat du monde qui se déroule actuellement en Égypte, Kentin est bien là, et ça se sent déjà. Exceptionnel offensivement, il inscrit 9 buts lors de la première victoire des Bleus, face à la Norvège. Une victoire surprise pour une équipe en plein doute, mais qui peut s’appuyer sur ses leaders. Et Kentin en fait bel et bien partie.

Kentin et Pascal Mahé posent avec leurs médailles (Crédits : Quentin Reix, lechorepublicain)

“Je suis fier de Kentin, je suis fier de notre famille »

Pascal Mahé

En club, il quitte pour la première fois le championnat allemand en 2018 pour rejoindre les Hongrois de Vezsprém. Avec son nouveau club, la malédiction des finales perdues continue puisqu’il s’incline en finale de la Ligue des Champions de l’EHF, en 2019, face au Vardar Skopje. Il doit se consoler avec sa nomination en tant que meilleur demi-centre du tournoi. À 29 ans, Kentin a encore de belles choses à vivre, que ce soit en club, ou en équipe de France. Et qui sait, il est peut-être possible de voir un jour réunis les deux Mahé ensemble dans un même club en France. L’un en tant que joueur et l’autre en tant qu’entraîneur. Après avoir coaché Chartres, Pascal Mahé est désormais l’entraîneur de Caen, qui évolue actuellement en Nationale 1.

À eux deux, ils ont rapporté 8 médailles internationales à l’équipe de France de handball. Pascal et Kentin Mahé ont marqué de leur empreinte l’histoire de leur sélection. Ils totalisent plus de 400 matchs et près de 1 100 buts pour les tricolores. Pionnier pour l’un, assurant la relève pour l’autre, ils vivent encore aujourd’hui de la même passion et pourraient ne pas être les derniers Mahé à exceller dans le handball, puisque Kentin est papa d’une petite Vida, née en 2018.

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