Vendredi 24 juillet, le Conseil de Paris a décidé à l’unanimité, que la future Arena 2 Porte de la Chapelle portera le nom d’Alice Milliat, en vue de Paris 2024. Alors qu’aucun équipement olympique ne porte le nom d’une femme aujourd’hui, la ville de Paris rend hommage à une des plus grandes militantes pour la reconnaissance des femmes dans le sport. Portrait d’une Grande Dame.
Premiers combats
Née en 1884, Alice Milliat se retrouve, à l’âge de 24 ans, veuve et totalement indépendante (fait assez rare à l’époque pour le souligner). Rapidement elle s’investit dans différents sports comme le hockey sur glace, le football et le tennis, mais décide finalement de se consacrer pleinement à l’aviron, au sein de Fémina Sport, premier club omnisport féminin parisien. En 1915, elle devient présidente de son club, et s’engage dans le combat qui sera celui de sa vie : faire des sportives des athlètes accomplies et reconnues par leur pairs. Avant la fin de la Première Guerre mondiale, en décembre 1917, Alice Milliat devient trésorière de la Fédération des Sociétés Féminines Sportives de France (FSFSF) puis accède à sa présidence en 1919. Alice prend les rênes de la Fédération et étend son champ d’action. Dans la foulée de sa nomination, la FSFSF organise les premiers championnats de France de football, basket, cross, natation et hockey féminin. Mais cela ne suffit pas, Alice Milliat voit plus grand. En 1919, elle sollicite le Comité International Olympique (CIO) et lui suggère d’inclure des épreuves féminines d’athlétisme aux prochains Jeux.

Vers la création de la FSFI
Après quelques sollicitations, Pierre de Coubertin, fondateur et directeur du Comité Olympique refuse, et répond que : « Les Jeux Olympiques doivent être réservés aux hommes. Le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les vainqueurs… ». La femme, réduite à une forme de « pom-pom girl » censée supporter l’homme dans ses prouesses physique, ne doit pas se mêler à l’activité sportive. Mais il en fallait plus pour impressionner la Dame ! Persuadée que les femmes ont amplement leur place aux JO, Alice a alors répondu « Puisque c’est ainsi, je vais faire mes propres JO entre meufs ! » Bon ce n’est peut-être pas la retranscription exacte mais dans l’idée, c’est la même chose. Ainsi, en 1921, elle crée la Fédération Sportive Féminine Internationale (FSFI) et l’année suivante, organise les premiers championnats olympiques féminins au Bois de Vincennes. Les réactions sont vives et le président du Comité Olympique d’athlétisme qualifiera cette « Olympiade femelle » d’ « impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte ». Sympa… Mais qu’importe, le premier événement sportif féminin a bien lieu, n’en déplaise aux détracteurs.

Acceptation et intégration
La nouvelle s’ébruite, le premier championnat olympique féminin a eu lieu, et le CIO ne peut plus ignorer Alice Milliat et ses Dames. Quelques années plus tard, en 1928, les premières épreuves féminines d’athlétisme sont ajoutées aux Jeux d’Amsterdam. Mais de peur de se faire radier des Jeux suivants, la FSFI continue d’organiser ses championnats féminins, en parallèle des JO. Les éditions s’enchaînent et la compétition prend de l’ampleur. Lors de la troisième édition, à Prague, Alice Milliat réunit 200 femmes de 17 nationalités différentes, devant plus de 15.000 spectateurs. En douze ans, la Fédération Sportive Féminine Internationale organise quatre Jeux Olympiques féminins et réunit plusieurs milliers de spectateurs. Le sport féminin s’est alors démocratisé, les sportives ont pu s’exprimer dans des compétitions réunissant les plus grandes athlètes du monde. En 1938, la FSFI est dissoute, mais pour la bonne cause ! Le CIO intègre de manière durable, les épreuves féminines lors des Jeux Olympiques. Alice Milliat meurt en 1957 et passe la flamme du combat pour l’égalité, à tout un chacun.

En 2016, la fondation Alice Milliat est créée et vise à promouvoir et améliorer la médiatisation des pratiques féminines sportives. À noter que lors des JO de Tokyo, on prévoit 48,8% de femme. Il aura fallu attendre presque cent ans pour obtenir une quasi-parité lors de Jeux Olympiques. Le combat pour la reconnaissance des sportives dans leur propre milieu est un combat de tous les jours. Merci Alice.