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La voiture balais : retour sur la deuxième semaine du Tour de France

Après une première semaine rythmée qui a vu Thibaut Pinot être le premier favori à baisser les armes, la deuxième semaine est annoncée comme une semaine de « repos » pour les prétendants à la victoire. Pour autant le parcours proposé ne laisse pas de répit et il est entendu que ce Tour de France est très nerveux et que si la course ne se gagne pas, elle peut se perdre sur des étapes anodines. Après une journée de repos stressante pour cause de tests COVID, tout les coureurs ont repris la route. Le CCS vous refait vivre la semaine qui vient de s’écouler sans le patron de la grande boucle testé positif.

Des sprints, des chutes, des sprints..

L’étape entre les deux îles est redoutée de tous. Deux coureurs s’extirpent du peloton mais le peloton a décidé que ça ne sera pas leur jour. La première tentative de bordure a lieu à 101km de l’arrivée sous l’impulsion des Quick Step passés maître en la matière. L’équipe, qui a été piqué au vif de se faire surprendre lors de l’étape 7, décide de prendre la course en main. Si par manque de vent la tentative ne fonctionne pas, elle tend la course davantage et on assiste à la première chute 2 kilomètres plus loin. Vont suivre plusieurs autres chutes, la plupart du temps à cause des infrastructures routières (îlots directionnels, rond point). L’une d’elle va mettre Guillaume Martin à terre et contraindre Davide Formolo à l’abandon entrainant une grosse perte pour Tadej Pogacar. Une deuxième tentative de bordure a lieu à 18km de l’arrivée sans faire de victime chez les favoris. Les Sunweb attaquent le dernier kilomètre avec un train impressionnant pour favoriser la victoire de Cees Bol mais ils sont vite débordés par Morkov, poisson pilote de Bennett, qui le récompense en franchissant la ligne en première position devant Ewan et Sagan. L’irlandais reprend le maillot vert à Sagan grâce à cette victoire.

Le jour suivant promet un nouveau sprint massif malgré des petites bosses en fin de parcours. Seul Mathieu Ladagnous fini par s’échapper dans un long raide solitaire qui ne peut aller au bout. Il est repris à 46km de l’arrivée et le sprint massif a bien lieu. La dernière ligne droite est en montée et c’est Ewan qui va l’emporter en costaud à Poitiers au terme d’un sprint magnifique. La photo finish montre 4 coureurs qui se tiennent en moins d’un mètre. Peter Sagan est finalement déclassé pour avoir poussé Van Aert qui a miraculeusement tenu sur son vélo. Il perd de précieux points dans la course au maillot vert. La suite du Tour de France sera plus difficile pour les sprinteurs car il n’y a plus d’étapes totalement plate avant l’arrivée à Paris.

Un enchainement de costaud

La 12ème étape, la plus longue de cette Grande Boucle, mène le peloton à Sarran en passant sur les terres de Raymond Poulidor. Après un début d’étape uniquement animée par le sprint intermédiaire, c’est la Sunweb qui décide de prendre les choses en main à 42km de l’arrivée. Ils reprennent les quelques échappés qui n’ont jamais pu prendre beaucoup d’avance. Benoot et Kragh Andersen partent, vite rejoint par Marc Soler. Marc Hirschi les rejoint également. Marc Soler place une nouvelle attaque à 27km de l’arrivée dans la montée du Suc au May et il est tout de suite contré par le Suisse. Dans le même temps, Julian Alaphilippe attaque dans le peloton avec son coéquipier Dries Devenyns, avec 1 minute à boucher. Il monte le Suc au May à la même vitesse qu’Hirschi mais ne le reprend pas, il a attaqué trop tard. La Sunweb donne une leçon tactique et deux coureurs de l’équipe viennent dans le groupe d’Alaphilippe en prenant des faux relais afin d’empêcher la poursuite. La troisième tentative est la bonne pour le prodige Suisse, révélation de ce Tour, qui gagne en ayant perdu très peu de temps sur ses poursuivants. Alaphilippe n’a pas été assez aidé et a été victime de problèmes mécaniques qui n’ont rien arrangés.

Après la plus longue étape, le peloton attaque l’étape avec le plus de dénivelé (4400m). Alaphilippe, vexé d’avoir échoué la veille, attaque le premier à 180km de l’arrivée. Un premier groupe de 5 se forme avant d’être rejoint par 12 autres coureurs. 3 EF, 2 Bora et 2 Quick Step composent notamment ce groupe. Le peloton laisse partir, l’écart montant jusqu’à 10 minutes, et on assiste à 2 courses différentes : celle pour la victoire d’étape et celle pour la victoire finale. A 87km de l’arrivée, Romain Bardet et Quintana chutent à plus de 50km/h. Le français se relève une première fois avant de retomber, il est sonné mais fini tout de même par repartir. A l’avant Powless s’isole avant d’être rejoint par Schachmann. L’Allemand lâche l’Américain ce qui oblige les EF1 à rouler derrière. A 13km de l’arrivée Daniel Martinez attaque dans le groupe des poursuivants. Seul Lennard Kamna arrive à suivre. Ils finissent pas rejoindre Schachmann à 2km de l’arrivée et c’est une course tactique qui s’engage entre les deux Bora et le Colombien. Kamna attaque par deux fois sans mettre à défaut Martinez qui finit par s’imposer au sprint après une dernière attaque de l’Allemand. Dans le peloton des favoris, Ineos décide de durcir la course dans le col de Nérone. Romain Bardet et Guillaume Martin font les frais de cette accélération, ils perdent environ 3 minutes à l’arrivée. La Jumbo n’est pas mise à défaut et c’est Pogacar, qui a promis d’attaquer tant que ses jambes vont lui permettre, qui s’échappe dans le Puy Mary. Seul Roglic le suit, les autres sont lâchés. Le jeune Slovène sans complexe va ensuite faire son maximum pour suivre son aîné en mode rouleau compresseur sur la fin de l’ascension. Bernal perd 37 secondes sur la ligne. Les écarts ne sont pas rédhibitoires mais l’impression visuelle donnée par Roglic lors de cette montée difficile laisse penser qu’il est imbattable. Dans la soirée le verdict tombe pour Romain. Commotion cérébrale, il doit abandonner. Son histoire sur le Tour avec AG2R se termine de façon triste mais il faut souligner le courage du Français d’avoir terminé l’étape à seulement 2’30 de Roglic dans cet état. Respect.

Le Lombardie à la Française

L’étape 14 entre Clermont Ferrand et Lyon, promise aux puncheurs ou aux sprinteurs en cas d’arrivée massive a été une ode à la tactique de course du début à la fin. C’est la course au meilleur qui a rythmé le début d’étape. Bennett ayant fini très loin la veille, la Bora a tout de suite l’intention de le décrocher afin de permettre à Sagan de récupérer de précieux points pour le classement du maillot vert. Son équipe attaque fort dans la première côté du jour et il réussit à distancer Bennett tout en intercalant des hommes afin de grignoter au plus vite son retard. A 130km de l’arrivée, la Bora durcie la course une deuxième ascension du jour. Le but est simple, distancer Bennett le plus possible afin qu’il ne puisse pas disputer le sprint. Après de longues minutes de mano à mano entre la Quick Step et la Bora, c’est la dernière qui l’emporte et ouvre la voie royale à son leader. Les 2 échappés, qui n’ont jamais vraiment de possibilité de victoire, sont repris avant Lyon. C’est la que l’équipe Sunweb va nous démontrer une nouvelle sa science tactique quelques jours après la brillante victoire d’Hirschi. La première salve est envoyée par Tiesj Benoot dans la côté de la Duchère. Il est vite repris et se sont De Gendt, puis Alaphilippe qui attaquent dans le côte de la Crois Rousse avant d’être imités par Hirschi. A chaque fois c’est Sagan qui va chercher les attaquants. Sauf qu’à force de faire rouler ses équipiers, il se retrouve esseulé et c’est Soren Kragh Andersen qui profite d’un moment de flottement à 3km de l’arrivée qui prend sa chance alors que tout le monde s’attend à un sprint massif. Il résiste de fort belle manière au peloton et va cueillir une nouvelle victoire pour cette équipe Sunweb pleine de panache. Sagan n’est pas bredouille, il revient à 43 pts de Sam Bennett. Décevant compte tenu du travail immense de son équipe, qu’il a salué, tout au long de la journée.

Avant l’hécatombe

Beaucoup d’observateurs ont vu cette étape du Grand Colombier comme celle qui serait déterminante dans le classement final. Intervenant juste avant la journée de repos, elle doit permettre le spectacle et les attaques. Du spectacle, il n’y en pas trop eu. Comme sur le Tour de l’Ain quelques semaines plus tôt, la Jumbo Visma a écraser la course. Tel la Sky ou Ineos de l’époque, tel un rouleau compresseur, ils ont tué toute velléité d’attaque dans le but de gagner l’étape. C’est pour cette raison qu’ils n’ont jamais laissé plus 4′ à Pierre Roland et ses compères de l’échappée. Le Français se console avec de précieux points pour le classement de la montagne qu’il pourrait être tenté de remporter si les jambes suivent. Mais en imprimant un tel rythme, ils ont surtout fait perdre le Tour à Bernal et Quintana. Alors que les coureurs jaune et noir sont encore 5 dans la montée finale, les deux Colombiens cèdent à 13 km de l’arrivée. Barguil revient sur Quintana et va lui permettre de limiter la casse à la fin. Bernal est cloué sur la route, les jambes ne répondent pas. C’est à cet instant que pour la première fois depuis plusieurs années, il rend le Team Ineos-Grenadier humain. Le train Ineos a laissé place au train Jumbo. Roglic se fait emmener dans un fauteuil par ses coéquipiers jusqu’à 600m de l’arrivée, moment qu’il choisit pour faire un sprint comme il nous a habitué maintenant. Sauf que l’attaque n’est pas tranchante, Porte et Pogacar suivent. L’Australien attaque même à 300m de l’arrivée afin de creuser l’écart sur ses adversaires au général. C’est finalement Pogacar qui lance le sprint à 150m de l’arrivée et résiste au retour de Roglic. Le jeune Slovène remporte déjà sa 14ème course chez les professionnels à seulement 21 ans. Il reprend 4 secondes à son ainé et lui montre qu’il n’est pas prêt à baisser les armes. Quintana perd 3’50 et Bernal 7’20 au général, ils sortent du top 10. La Jumbo a écrasé la course mais Roglic ne s’est pas montré impérial au moment de conclure et c’est la seule information qui permet de croire que le Tour de France n’est pas déjà joué.

Cette deuxième semaine n’a pas permis à Roglic de creuser les écarts mais il a eu le mérite d’éliminer deux prétendants à la victoire finale : Quintana et Bernal. La troisième semaine s’annonce est très dure et c’est le leader le mieux entouré qui va tirer son épingle du jeu. La Jumbo semble nettement au dessus des autres mais attention à Pogacar qui ne fait aucun complexe. Avantage Roglic avec le contre la montre à la Planche des Belles Filles la veille de l’arrivée à Paris. L’étape du Col de la Loze va être l’occasion de l’attaquer, à moins que son équipe arrive une nouvelle à étouffer les favoris. La course au maillot à poids va être intense et celle du maillot vert également. L’Irlandais Sam Bennett va t’il réussir à passer les Alpes ? Un Français va t’il arriver en maillot à poids à Paris ? Rendez-vous dimanche pour le verdict finale en espérant du spectacle d’ici la et pourquoi pas une nouvelle échappée de Marc Hirschi, le héros Suisse, révélation de ce Tour.

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