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TDF 2020 – Le col de la Loze, le petit dernier qui a tout d’un grand

Le Tour de France se mesure ce mercredi à un tout nouveau col dans l’univers alpin : le col de la Loze. Celui-ci relie désormais les vallées de Méribel et de Courchevel, culmine à 2304 m d’altitude et présente la particularité non négligeable d’être réservé aux cyclistes, fermé aux voitures. C’est donc la première fois que les coureurs professionnels du Tour de France ont rendez-vous au sommet de ce col, encore inconnu du plus grand nombre. Et pourtant, il y a beaucoup à en dire… Nous vous proposons à cette occasion de faire plus ample connaissance.

Un nouveau col

C’est un projet dont on commençait à entendre parler avec insistance dans les 3 Vallées il y un an, en Tarentaise. La volonté de bitumer une voie faisant la jonction entre les vallées de Méribel et de Courchevel, stations de ski lorgnant à raison sur le monde du vélo. C’est finalement devenu réalité au printemps 2019 lorsqu’on put inaugurer cette nouvelle montée à travers l’organisation d’une ascension chronométrée sur le versant de Courchevel. Ensuite c’est allé très vite : le Tour de l’Avenir vient s’y essayer sur l’autre versant dès le mois d’Août, avec une montée sèche depuis Brides-les-Bains. Ces champions en devenir s’en souviennent encore. Et finalement on a rapidement eu la confirmation que le col flambant neuf avait déjà su séduire Christian Prud’homme et ASO, organisateurs du Tour de France. Ceux-ci n’attendaient pas plus longtemps et le mettaient au programme de l’édition 2020. Depuis on attend avec impatience de voir les meilleurs coureurs du monde se mesurer à ses pentes diaboliques. Et bonne nouvelle, ce moment, c’est maintenant !

Sommet du col de la Loze, 2304 m d’altitude.

Profil du col

Les coureurs du Tour de France monteront ce mercredi 16 septembre au col par le versant Méribel, le même que lors du Tour de l’Avenir, et sans nul doute le plus difficile ! Après s’être envoyés la Madeleine, ils plongeront dans la vallée et enchaineront donc, sans transition ou presque, avec la montée finale vers la Loze. Comme leurs cadets, ils traverseront le village de Brides-les-Bains et après un virage à angle droit sur la droite, entameront les 22km de montée. La première partie du col, qui les amènera jusqu’à Méribel, n’est pas particulièrement violente. C’est une pente régulière, aux pourcentages raisonnables, caractéristique de ces routes d’accès vers les stations de sports d’hiver. Après avoir passé successivement les Allues et le Raffort, les coureurs arriveront au village principal de Méribel, ils prendront alors à gauche direction Altiport pour atteindre le pied de la partie finale du col de la Loze, 8 kilomètres plus haut.

C’est ce tronçon-là qui a été bitumé il y a tout juste un an, donnant ainsi naissance à cet empêcheur de rouler à plat. C’est là, aussi, que les choses vont se faire vraiment sérieuses. Sur une petite route assez étroite, les coureurs vont pouvoir s’en donner à cœur joie et se faire une guerre de tous les diables, dans les ruptures de pentes à répétition et les pourcentages infernaux qui sont la marque de fabrique de cette rampe tendue vers le ciel. Notons en passant que cette route n’a pas été pensée comme un col routier à la base, et ça se voit. C’était une piste utilisée par les VTT ou les véhicules se rendant en altitude pour intervenir sur les remontées mécaniques. Ainsi n’y a-t-il pas eu de terrassement ou de travail particulier afin de rendre la pente plus raisonnable, régulière. On s’est contenté d’apposer par dessus une couche de goudron pour créer un col. Le résultat ? Une pente parfaitement déraisonnable, pour notre plus grand plaisir !

De courts replats laissent place à des portions ultra pentues, eux-mêmes s’effaçant devant une nouvelle zone plus plane, à laquelle succède une rampe à la raideur démente… Et ainsi de suite. De mètre en mètre, qui plus est à la fin d’une étape intervenant dans la troisième semaine du Tour, c’est un vrai combat qui attend les champions. Et on escompte que cela devrait nous offrir un vrai beau spectacle. Après les premiers virages dans les arbres, ils en sortiront, iront chercher une épingle à gauche et, à partir de là, affronteront 3 kilomètres de ligne droite qui les portera au sommet. Dans des passages qui dépasseront les 20 %. Vertigineux. Pour l’anecdote ces 3 kilomètres, en période hivernale, on les dévale dans l’autre sens, et skis aux pieds. Ça donne une idée. Il leur faudra lutter jusque dans les tout derniers mètres, jetant toutes leur force dans la bataille, tant il n’y aura aucun espace de répit avant le franchissement de la ligne. Toutes les conditions sont donc réunies, on attend du grand spectacle ! Et on ne peut imaginer que le scénario ne soit à la mesure de l’impatience suscitée par ce nouveau venu plus que prometteur.

Les dernières encablures vers le col de la Loze que les coureurs graviront pour la première fois en compétition lors de la 17ème étape du Tour ce mercredi 16 septembre 2020.

Pour quel profil de coureur ?

Maintenant que nous avons fait connaissance, subsiste une dernière question : à qui profite le crim… ce col ?! Qui a les qualités les plus à même de le faire briller et s’exprimer dans un tel col ? Vues les forces en présence et les états de forme sur cette édition 2020, et considérant ce qui s’est passé dans le Grand Colombier notamment, il y a fort à parier que Roglic et Pogaçar seront là. On se dit en effet que c’est bien la bannière slovène qui pourrait battre au vent dans le ciel de Savoie ce soir. Mais pour lequel? En d’autres circonstances, avec 2 passages à 2000 m et plus, quand on connaît les qualités naturelles des Colombiens rompus à la vie en altitude, on aurait aussi pu miser sur Bernal. Mais on apprend ce matin qu’il a préféré abandonner pour se reconcentrer sur la fin de saison… Quid des autres Colombiens? Quintana n’a probablement pas les jambes. Uran ? Martinez ? Miguel Angel Lopez ? Peut-être.

À moins que la nouvelle donne chez Ineos ne permette à un coéquipier, libéré de ses obligations collectives, de jouer sa carte individuelle. Carapaz pourrait ainsi tenter de reprendre l’échappée en espérant une issue plus heureuse qu’hier. Les Jumbo laisseront-ils toutefois une chance de victoire aux échappés ? Rien de moins sûr. Face à la densité folle de l’étape, qui n’a d’égale que celle de leur groupe, les Bataves devraient rouler fort pour éviter toute déconvenue et décourager les velléités offensives de leurs adversaires directs. Condamnant du même coup les ambitions des attaquants de la première heure. Aux alentours de 17h, ils se présenteront finalement devant ce juge de paix nommé Loze. Et là, tout pourra arriver. N’importe quelle défaillance serait fatale et condamnerait sa victime. Il flottera dans l’air une odeur de souffre, une odeur de sang, de celles qui précèdent souvent les moments de sport les plus mémorables. « On se le souhaite en tout cas ». Et à partir de là, que le meilleur gagne !

Au matin de cette rencontre tant attendue entre le col de la Loze et le peloton professionnel du Tour de France, c’est avec une excitation fébrile que l’on se projette vers ce moment dont on espère qu’il tiendra toutes ces promesses. Pour ne pas mentir, des deux coureurs slovènes évoqués plus haut, on compte sur le plus jeune, Tadej Pogaçar, qui a déjà démontré tout son talent et son goût pour l’offensive, pour dynamiter une course trop prévisible et sous contrôle. Un rapide détour par les sites de météo laisse apparaître un risque d’orages pour cet après-midi. Et si les conditions climatiques s’en mêlaient… Et si c’était un morceau d’anthologie qui nous attendait… Il ne nous reste plus qu’à attendre. Et à compter les heures. Les coureurs ne sont pas encore à Paris. Impatience.

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