Rugby

Géorgie, l’éveil des Lelos ?

Appelée pour remplacer le Japon dans la nouvelle Autumn Nations Cup (13 novembre – 6 décembre), la Géorgie essaye depuis des années d’intégrer le gotha du rugby européen. Où en sont les Lelos aujourd’hui ?

La nouvelle a dû être accueillie comme une bénédiction du côté de Tbilissi. Forfait en raison des restrictions liées au Covid-19, le Japon ne participera pas au Tournoi des Huit Nations – officiellement nommé « Autumn Nations Cup » – organisé en Europe dans deux mois. Et la Géorgie s’est emparé avec plaisir de la place laissée vacante.

Une belle occasion pour les Lelos – le surnom de la sélection – de se mesurer aux meilleurs. « Nous allons jouer face à des équipes plus fortes que nous et ce tournoi sera une excellente occasion d’apprendre de leur expérience, a déclaré l’entraîneur Levan Maisashvili à l’AFP. Notre but est de montrer nos meilleures qualités et d’engranger un maximum d’expérience. »

Une mauvaise dynamique

Cet automne, les Géorgiens seront placés dans la poule de l’Angleterre, de l’Irlande et du pays de Galles (l’autre poule est constituée de la France, de l’Ecosse, de l’Italie et des Fidji). Pour une équipe pas forcément habituée à jouer régulièrement contre des nations du Tier 1, la marche pourrait s’avérer bien trop haute.

« L’équipe n’est pas dans un temps fort, elle est en pleine phase de reconstruction, pas dans une phase ascendante. »

Claude Saurel, ancien sélectionneur de la Géorgie (1995-2003)

D’autant que la situation actuelle n’est pas la plus favorable pour les joueurs du Caucase. Le championnat national n’a toujours pas repris, plusieurs cadres expérimentés ont raccrochés, comme l’inoubliable Mamuka Gorgodze (75 sélections), l’entraîneur néo-zélandais Milton Haig est parti, et la fédération est en pleine restructuration.

« Le ministère des sports a désigné un bureaucrate qui gère les affaires courantes, ce qui fait que la fédération géorgienne est sous tutelle du ministère, a expliqué Claude Saurel, ancien sélectionneur des Lelos (1995-2003), à L’Equipe. Il faudra attendre le mois de décembre pour que les élections aient lieu… L’équipe n’est pas dans un temps fort, elle est en pleine phase de reconstruction, pas dans une phase ascendante. »

La jeunesse au pouvoir

Heureusement, la Géorgie peut compter sur un profond réservoir de talents. Souvent cantonnée à une sélection d’avants puissants et forts en mêlée, l’équipe brille de plus en plus par la qualité de ses trois-quarts. A Brive, par exemple, la charnière formée par le demi de mêlée Vasil Lobzhanidze (23 ans) et l’ouvreur Tedo Abzhandadze (21 ans) est promise à un brillant avenir sur la scène internationale. « On est actuellement dans un processus de changement de générations, appuie Maisashvili. Nombre de joueurs expérimentés nous ont quittés, mais le renouveau arrive, des jeunes joueurs très prometteurs… »

Tedo Abzhandadze, le jeune ouvreur géorgien, promis à un bel avenir. (Crédit photo : Rugbyrama)

Et grâce à l’expérience engrangée par ses nombreux expatriés, en Top 14 et en Pro D2 notamment, la Géorgie est parvenue à s’incruster dans le paysage du rugby mondial. Sa sélection des moins de 20 ans, qui fait mieux que résister lors des championnats annuels, ainsi que ses nombreuses victoires dans le Tournoi des Six Nations B (sept depuis 2006) en attestent. Mieux, la Géorgie est aujourd’hui à la 12e place du classement World Rugby, soit trois places devant l’Italie…

Une opportunité pour intégrer le gotha européen ?

« Nous sommes des leaders parmi les équipes de second plan, estime Maisashvili. Nous nous situons entre les équipes de premier et de second plan. On ne joue avec des équipes de premier plan que deux fois par an. C’est ça notre problème principal. Si nous avons plus de possibilités de les affronter, alors nous arriverons beaucoup plus vite à un niveau qui nous permettrait d’être prêts pour le Tournoi des Six Nations. »

La Géorgie avait été largement dominé par le pays de Galles de Josh Adams (43-14), lors du Mondial au Japon l’an passé. (Crédit photo : Associated Press)

Car il est là, le réel objectif de cette équipe géorgienne. Depuis des années, la Fédération se bat pour que les Lelos intègrent la prestigieuse compétition continentale. Mais, pour Saurel, la meilleure chance de la Géorgie est passée : « La période était plus propice entre 2003 et 2008. À cette époque, nous pouvions aligner une collection de joueurs de haut niveau, et nous rivalisions avec l’Italie. Ce Tournoi des Huit Nations, en novembre, peut donner des idées. Rien de tout cela ne serait arrivé sans le Covid-19, c’est une occasion inespérée pour la Géorgie de se mettre en évidence et d’essayer de montrer qu’elle a, peut-être, le niveau pour espérer intégrer très vite le Tournoi des Six Nations. Mais je crains quand même que ce ne soit très difficile… »

Face aux géants britanniques, la Géorgie fera forcément figure de petit poucet. Aussi bien techniquement que tactiquement, leurs adversaires seront bien supérieurs. Les Lelos auront pour eux le courage et la détermination de placer le Caucase sur la carte du rugby européen. Pour voir en l’automne 2020 le début d’un éveil.

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