Cruel premier tour. Qu’on soit issu péniblement des qualifs ou à peine sorti d’un autre tournoi, il n’est jamais aisé de sortir dès son entrée en lice. Encore moins cette année, sans ovation, sans soleil, sans public. Les trois premiers jours de cette édition 2020 de Roland-Garros sont passés, voyant les principaux favoris se qualifier sans peine. Toutefois, la terre battue parisienne n’a pas été propice à tout le monde. Retour sur les premiers faits d’armes.
Savoir être expéditif, la marque des grands
A quoi peut-on reconnaître un favori à la victoire finale ? A son talent intrinsèque, certes. A sa force mentale, aussi. A se montrer impitoyable, surtout. En ce premier tour, ils sont nombreux parmi les têtes de séries les plus hautes à ne pas avoir squatté longtemps les courts de Roland. Le numéro 1 mondial Novak Djokovic n’a pas eu à batailler longtemps face au Suédois Mikael Ymer. En à peine une heure et demie et 5 jeux concédés, le Serbe a à coeur de mettre toutes les chances de son côté et ainsi effacer son élimination polémique de l’US Open. Tout comme « Nole », Dominic Thiem ne s’est pas fait piéger. Face à Marin Cilic qui avait tout de l’adversaire piège pour un premier tour, le récent vainqueur du Grand Chelem américain n’a pas concédé de manche à son opposant. Il sera opposé à Jack Sock lors du second tour. Enfin, Rafael Nadal a retrouvé sa résidence secondaire et a montré aux rares spectateurs des tribunes parisiennes qu’il allait être au rendez-vous pour glaner un vingtième Grand Chelem. En deux heures, il a écarté le Biélorusse Gerasimov pour rejoindre le tour suivant. Le Top 3 est là.

Lors de ces premiers tours, on hiérarchise souvent les candidats au titre suivant le nombre de sets qu’ils laissent à leurs adversaires. Ainsi, se sont qualifiés en 3 manches sèches Alexander Zverez (3-0 face à Novak), Stanislas Wawrinka face à Andy Murray, Diego Schwartzman (3-0 contre Kecmanovic), ou encore Robert Bautista Agut tombeur de Richard Gasquet et Karen Kachanov (en moins de deux heures contre Majchrzak). Moins efficace mais non moins qualifiés, on retrouve Kei Nishikori, Denis Shapovalov qui ont lâché un set. Que ce fut laborieux cependant pour les récents finalistes du tournoi d’Hambourg. Trois jours après leur finale allemande, Stefanos Tsitsipas et Andrey Rublev ont eu besoin de cinq manches pour accéder au précieux deuxième round. Face à Jaume Munar, 109ème joueur à l’ATP, le Grec a concédé les deux premiers sets avant d’enclencher la vitesse supérieure. Rublev quant à lui était opposé à Sam Querrey ; comme son malheureux adversaire de la semaine passée, il a attendu la troisième manche pour prendre l’ascendant sur son adversaire, après avoir perdu les deux premières au tie-break.
Du côté du tableau féminin, l’incontournable Serena Williams s’est qualifié aux dépens de son homologue américaine Kristie Ahn 7-6, 6-0. Un score éloquent, qui traduit toutes les difficultés de Serena dans la première manche. Peu mobile en début de partie, l’ex numéro 1 mondiale a su compenser ses lacunes par sa puissance et toute son expérience. Une fois la première manche acquise au tie-break, elle a déroulé les six jeux suivants en une demi-heure. Tout comme elle, les principales têtes de série se sont imposées : Simona Halep, leader au WTA, Elina Svitolina, Petra Kvitova ou encore Sofia Kenin. A suivre lors du second tour, Jelena Ostapenko, titrée en 2017, et qui n’avait plus gagner un match à Roland depuis, retrouvera Karolina Pliskova, tête de série n°2, qui a concédé la première manche de son match face à l’Égyptienne Mayar Sherif. Enfin, la très prometteuse américaine Cori Gauff s’est elle aussi imposée lors de son entrée en lice dans le tournoi face à Johanna Konta, et rejoint le deuxième tour à seulement 16 ans.
Des locaux bien à la peine
« On n’a pas vraiment l’impression de jouer à domicile » déclarait Corentin Moutet sur la terrasse de France Télévisions après son match marathon face à Lorenzo Giustino (voir par ailleurs). En effet, dans ce Roland-Garros si particulier, les athlètes français ne peuvent pas compter sur le soutien accru des foules parisiennes habituellement présentes. Est-ce la seule explication aux nombreuses contre-performances françaises ? Non. Bien sûr que non. Qu’il s’agisse de l’ancienne garde ou de la nouvelle génération bleu-blanc-rouge, autant dans le tableau masculin que du côté des femmes, la France n’y est pas. Gaël Monfils, Adrian Mannarino et Richard Gasquet se sont tous inclinés en trois manches malgré leur expérience de la terre battue parisienne, respectivement face à Bublik, Ramos et Bautista Agut. Tout aussi expérimentée, Pauline Parmentier a disputé le dernier match de sa carrière ce mardi 29 septembre face à la Russe Veronika Kudermetova (2-6, 3-6). Un dernier baroud d’honneur pour la désormais retraitée.

Comme elle, Océane Dodin, et Kristina Mladenovic n’ont pas survécu au premier écrémage. Cette dernière a vécu un match particulier. Après une préparation tronquée par un confinement forcé dans la bulle de l’US Open, elle se présentait face à Laura Siegemund pour retrouver du rythme et de la confiance. Mais alors qu’elle pensait remporter le premier set après que son adversaire ait retournée une balle après deux rebonds, l’arbitre accorde le point à l’Allemande. Un fait de jeu qui s’avéra déterminant. Malgré sept balles de set, la Française ne conclut pas et s’écroule dans la seconde manche. Autre grande désillusion dans le camp français, Ugo Humbert, pourtant quart de finaliste à Hambourg, n’a pas passé le premier tour. Gilles Simon non plus. Face à Denis Shapovalov, l’expérimenté français n’a pu remporter qu’un set, la faute notamment à un service défaillant.
Du spectacle au milieux des gradins déserts
Mais, cocorico ! Parmi ce marasme et ces contre-performances, il y a tout de même des survivants français après ces trois premiers jours. Dans un affrontement franco-français face à Chloé Paquet, Alizé Cornet s’est imposé en deux manches. Plus compliqué pour Caroline Garcia, qui faisait face à l’Estonienne Anett Kontaveit, mais une victoire tout de même, en trois manches, et un second tour abordable face à Aliaksandra Sasnovich. Clara Burel, elle aussi s’est qualifiée, tout comme Fiona Ferro. Côté masculin, Pierre-Hugues Herbert a déroulé face à l’Américain Michael Mmoh, et retrouvera Alexander Zverev ce mercredi. Benoît Paire, après un US Open avorté et polémique, a réussi ses débuts dans le tournoi en effaçant le coréen Soonwoo Kwon en trois manches. Peut-être la meilleure chance française dans le tableau masculin, le tempétueux Avignonnais n’a pas encore brisé de raquette. Enfin, Benjamin Bonzi et Hugo Gaston complètent le tableau des survivants.

Si les Français n’ont globalement pas briller, ils nous ont tout de même tenus en haleine. En premier lieu, impossible de ne pas évoquer le match épique de Corentin Moutet face à Lorenzo Giustino. Après 6h05 de combat sur deux jours, le jeune Français s’est incliné certes, mais à apporté un peu de panache à ce maussade début de tournoi. La veille, c’est Jérémy Chardy qui s’est confronté à la même mésaventure. Opposé à l’Autrichien Rodionov, le tennisman français menait logiquement deux manches à rien avant de voir revenir son adversaire, pour une victoire 10 jeux à 8 dans le cinquième set.
La logique règne à Rolland-Garros. Toute la logique ? Non. Un peuple résiste encore et toujours à l’envahisseur. Les Français déçoivent globalement dans la fraîcheur de la porte d’Auteuil, dans les tableaux simples en tout cas. A l’aube du second tour, les résistants et résistantes tricolores se comptent sur les doigts des deux mains. Mais au-delà de nos chers protégés, un tournoi intéressant se présage. Les états de formes en début de seconde semaine devraient faire la différence pour des athlètes plus ou moins préparés à ce tournoi spécial. Si les favoris sont pour l’instant au rendez-vous, personne n’est à l’abri d’une mauvaise surprise.