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Les matches à huis clos ont-ils influé sur les résultats ?

Dans le monde du football, le fait de jouer à domicile ou à l’extérieur a toujours relevé d’une importance primordiale. Bien souvent, le lieu de la rencontre peut sembler changer radicalement le cours d’une rencontre, parfois en dépit du niveau des équipes. D’ailleurs, en championnat, une victoire semble impérative à la maison, alors qu’un nul hors de ses bases est déjà une satisfaction. Et l’on s’en rend compte au niveau comptable ; la 3ème équipe à l’extérieur en Ligue 1 la semaine dernière y avait remporté autant de points que la 13ème à domicile. Depuis le début de la crise du COVID, le 12ème homme a quitté les tribunes, parfois même en intégralité, est-ce que cela se ressent sur le terrain ?

Moyenne de points par match à domicile (rouge) et à l’extérieur (bleu). En pointillés, la moyenne de buts marqués

La surprise en constatant l’évolution de la Ligue 1 c’est que non, l’interruption due à la COVID et les restrictions parfois absolues de spectateurs n’ont PAS amélioré les performances extérieures. Avec une performance de 1.033 point par match, c’est même l’exact inverse qui s’est passé, puisque la moyenne n’a jamais été aussi faible depuis la saison 2016-2017 (1,037 pt/match). Cette saison-là avait pourtant été particulière puisque les trois leaders du championnat, Monaco, Paris et Nice, n’avaient perdu à eux trois que 2 rencontres à domicile de toute la saison.

Il est pourtant étonnant de voir une baisse encore plus conséquente, la saison dernière avait été particulièrement médiocre en terme de résultats hors des bases (1,057 pt/match). Il faut dire que du fait du calendrier, Paris (1er) était l’équipe qui avait joué le moins à l’extérieur, avec Lille (4e) et Nice (5e), et Toulouse (20e) est l’équipe qui s’était déplacé le plus souvent. Si l’on fait plus attention, on se rend compte qu’en 2019-2020, 11 équipes avaient perdu au moins la moitié de leurs matches à l’extérieur. Le TFC n’avait d’ailleurs jamais gagné. On peut dire à ce niveau que l’absence de supporters n’a donc pas influencé les résultats, mais les variations laissent à penser à une part importante du facteur du calendrier.

Le contraste, justement si l’on compare avec la saison interrompue par le confinement, c’est que l’on constate une augmentation radicale du nombre de buts, de 1,029 but/match marqué à l’extérieur à 1,15. Deux explications, liées entre elles, permettent de mieux apprécier cette évolution. D’une part, le nombre de buts d’une manière générale a augmenté, car le nombre de buts par match est passé de 2,51 à 2,67 sur ces premières rencontres de Ligue 1. D’autre part, le nombre de cartons rouges assez impressionnant de ce début de saison, 29 en 60 matches. Le sous-nombre affaiblit donc les défenses, surtout lorsque cela arrive à une équipe à domicile qui par nature ne va pas vouloir chercher à fermer le jeu. Attention à nouveau à l’échantillon de matches plutôt faible, et il faudra probablement attendre la mi-saison ou la fin des mesures de restriction pour avoir un avis définitif.

Nombre de pts/match des équipes à l’extérieur

Premier constat, la Ligue 1 est donc une anomalie, mais n’est pas la seule. Chaque championnat conte sa propre réalité. D’abord la Premier League, lors de la saison 2019-2020 avant l’interruption confinement ne voyait que 1,156pt/match à l’extérieur, la faute à son top 6 de folie qui approche les 2 pts/match à domicile. Liverpool en tête, comptait 100% de victoires à Anfield avant la pause, faisant chuter la moyenne par rapport à la saison précédente. A la reprise au mois de juin, le haut du tableau a légèrement ralenti la cadence mais a tout de même assuré ses places européennes, pendant que les petits clubs ont profité du relâchement pour aller grapiller des points pour se sauver, Brighton et Southampton en tête avec aucune défaite hors de leurs bases. Premiers effets également de l’absence de supporters.

En Espagne aussi, le changement est bien présent, et même de manière spectaculaire puisqu’au lieu d’une moyenne habituellement plus faible que les autres pays européens, les Ibères sont désormais au milieu (+0,24 pt/m). Lorsque l’on regarde plus attentivement le classement 2019-2020 après confinement, on se rend compte que le Real Madrid, le FC Barcelone, l’Atlético Madrid et le FC Séville (et Grenade) n’y comptent aucune défaite. Ces quatre équipes devaient déjà se préparer toutes pour les échéances européennes qui arrivaient après. Mais il est plus probable que les autres clubs étaient habituellement poussés par leur propre public à aller de l’avant pour titiller les géants lors des confrontations directes.

Pour la Bundesliga, l’augmentation est forte (+0,21) mais moins qu’en Espagne. Surtout, la moyenne se rapproche de 1,5, ce qui signifierait que la moitié des matches s’achèvent par une victoire de l’équipe extérieur, étonnant. D’autant plus que l’Allemagne est l’équipe à avoir le plus réintégré ses supporters dans les stades. Pour rappel, les clubs peuvent actuellement accueillir jusqu’à 20% de la capacité totale de l’arène. Cependant il faut dire que le championnat outre-Rhin est habituellement très offensif dans les deux sens, et la baisse de pression de la part des supporters nivelle la différence entre les équipes. Ici, à contrario de l’Espagne où les petits clubs ne parviennent plus à tenir, ici les grands clubs se sont affaiblis à domicile. A la maison, le Bayern Munich est passé de 11 buts encaissés en 13 matches à 7 en 6 matches. Le Borussia Dortmund, sans son mur jaune, est passé d’invaincu en 12 matches, à 3 défaites sur ses 7 dernières rencontres.

La Serie A a connu tout comme la Ligue 1 une baisse du nombre de points pris hors des bases. Ce championnat a été plus durement touché par le virus et il est probable que beaucoup de joueurs ont été absents pour s’isoler. Chaque cas est à prendre séparément mais il est étonnant de voir qu’après la pause, la Lazio, la Juventus et le Napoli se trouvent tous trois dans la deuxième partie de classement des équipes à l’extérieur. Ces trois mêmes qui joueront les coupes d’Europe cette saison, et donc censées être les grosses équipes qui prennent des points à l’extérieur.

Chaque championnat à sa propre situation qui doit être prise à part. Le faible échantillon de matches ne permet pas une étude équitable de la situation post-confinement. Néanmoins, il serait faux de dire que le football n’a pas évolué sur le terrain. On peut voir sur ce tweet et l’article qui l’accompagne que plusieurs statistiques, dont le nombre de fautes, ont connu un évolution. Il sera intéressant, peut-être dans un an, d’étudier globalement les résultats avant/pendant/après les restrictions de public. En attendant, il est bon de se rappeler du classement des moyennes d’affluences (identique à celui du taux de remplissage) dans les stades : 1. Bundesliga 2. Premier League 3. Liga 4. Serie A 5. Ligue 1. Et de le comparer avec les résultats de cet article. De là à considérer que les supporters ont une influence directe sur les résultats, voire sur le championnat, il n’y a qu’un pas …

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