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Kimi Raïkkönen : un homme de glace puissance 324 !

324 ! C’est la barre ahurissante que s’apprête à franchir Kimi Raïkkönen, dans un peu plus de deux heures. En effet, lors de ce Grand Prix de l’Eifel, le pilote finlandais va prendre la piste pour la 324e fois de sa carrière, un record. Propriété du pilote brésilien Rubens Barrichello jusqu’alors, avec 323 courses, ce record historique va changer de possesseur pour la première fois depuis 2011 (date à laquelle Barrichello a pris sa retraite). Pour l’occasion, le CCS revient pour vous sur la carrière exceptionnelle d’un des pilotes les plus sous-côtés de sa génération, « Iceman ».

Né le 17 octobre 1979, à Espoo (Finlande), Kimi Raïkkönen s’intéresse très jeune aux sports mécaniques et participe dès ses 8 ans à plusieurs championnats de karting, dans son pays natal. Jusqu’à ses 20 ans il enchaîne les courses et les victoires dans la discipline et devient l’un des plus gros espoirs de son pays.

Kimi Raïkkönen, en 1997 au volant de son Kart. (KAI GUSTAFSSON ∕ OM ARCHIVES)

En 1999, il décide d’enfin sauter le pas et de participer à des courses de monoplaces. C’est en Formule Renault et sous l’égide de Manor Motorsport que le jeune pilote finlandais se lance dans le grand bain… et de quelle manière ! En effet, victorieux lors de ses quatre premières courses en 1999, Raïkkönen poursuit sur sa belle lancée lors de l’an 2000, remportant 7 des 10 courses et en s’adjugeant le titre de Formule Renault britannique avec autorité et sans aucune contestation possible. Dans la continuité il participe à trois courses de Formule Renault européenne et remporte deux d’entre elles (il signe également deux poles positions et deux meilleurs tours).

Des débuts remarqués avec Sauber

Ses performances ne passent pas inaperçues et l’écurie suisse de Formule 1, Sauber, lui propose de faire des essais sur le circuit du Mugello. Après avoir impressionné les ingénieurs de l’équipe de Peter Sauber, ce dernier lui offre ni plus ni moins la possibilité de devenir pilote titulaire d’une écurie de Formule 1. Malgré quelques tergiversations avec la FIA – cette dernière est alors réticente à l’idée de donner une super-licence à un pilote aussi jeune et aussi inexpérimenté en monoplace -, le finlandais obtient finalement le précieux sésame (à titre provisoire au début) et peut participer à la saison 2001 de Formule 1. Son tout premier coéquipier se nomme Nick Heidfeld ; le pilote allemand est lui aussi un jeune loup dans la discipline, mais a déjà une saison dans les jambes puisqu’il a participé au championnat en 2000 au volant d’une Prost GP.

Kimi Raïkkönen dans sa combinaison Sauber au côté d’un autre rookie, un certain… Fernando Alonso. (Twitter F1History1)

Ses débuts sont tonitruants. En effet, lors du premier Grand Prix de la saison, en Australie, « Iceman » réalise une belle performance en terminant septième de la course, pas suffisant pour inscrire son premier point… mais c’était sans compter sur un coup de pouce du destin bienvenue, puisque le quatrième, Olivier Panis, se voit être disqualifié, ce qui offre par conséquent un point au jeune pilote Sauber. Au cours de la saison, le finlandais termine deux fois à la quatrième place (Autriche et Canada) et une fois à la cinquième (Grande-Bretagne), remportant au total 9 points et se classant dixième au championnat du monde.

Il est rapidement considéré comme un futur grand et une autre écurie frappe à la porte, il s’agit de McLaren. L’écurie britannique qui vient de perdre son double champion du monde finlandais, Mikka Häkkinen, partis à la retraite, voit d’un bon oeil l’arrivée du jeune Kimi Raïkkönen. Malgré le fait que son coéquipier, Nick Heidfeld, ait réussi une meilleure saison (huitième au championnat du monde avec 12 points) et soit un « protégé » de Mercedes, motoriste de McLaren, c’est bien le finnois qui accède au baquet de la deuxième force du plateau.

Rendez-vous manqué avec McLaren

Passé du Karting à l’une des écuries les plus mythiques de la F1 en à peine trois ans, Raïkkönen réalise pourtant une saison 2002 en demi-teinte. Après une première course encourageante, à Melbourne, où il termine troisième et monte pour la première fois de sa carrière sur le podium, Kimi enchaîne six courses sans entrer dans les points, alors que dans le même temps son coéquipier, David Coulthard, accumule les podiums et remporte même le GP de Monaco. En face la concurrence écrase tout sur son passage, les Ferrari de Michael Schumacher et Rubens Barrichello sont absolument imbattables (ces derniers remportent 15 des 17 courses de la saison…). McLaren et Williams se partagent les miettes et finalement lors de la deuxième partie de saison, le finlandais se réveille quelque peu et engrange de gros points (il termine trois fois sur le podium lors des neuf derniers GP). Il totalise, à l’issue de la saison, 24 points et termine sixième au championnat du monde.

Pour la saison 2003, les attentes ne sont pas au rendez-vous, la voiture est quasiment la même que la saison précédente (la voiture pour la saison 2003 n’étant pas encore prête) avec quelques améliorations. Mais contre toutes attentes, le pilote finlandais réalise une saison exceptionnelle, remportant notamment sa première course lors du GP de Malaisie, à Sepang. Il monte six fois sur le podium lors des sept premières courses de la saison et vire en tête du championnat après le GP de Monaco avec 48 points au compteur, soit quatre de plus que Michael Schumacher.

Résumé de la première victoire de la carrière de Kimi Raïkkönen, à noter qu’il s’agit également du premier podium de la carrière de Fernando Alonso.

Malheureusement pour lui et son écurie, l’émergence de la Williams de Juan Pablo Montoya lors de la deuxième partie de saison ainsi qu’une perte de performance de sa voiture (la MP4/17) auront raison des espoirs de titre du pilote finlandais. Malgré quatre podiums lors des six dernières courses, Kimi Raïkkönen échoue à deux petits points du sacre et Michael Schumacher remporte une nouvelle fois le titre. Un titre que « Iceman » n’aura jamais la chance de remporter avec McLaren.

En effet, en 2004 sa voiture est catastrophique, il n’est pas en mesure de se battre pour le titre malgré une victoire de prestige lors du GP de Belgique devant les deux Ferrari de Michael Schumacher et de Rubens Barrichello et termine à une lointaine septième place au championnat du monde. En 2005 et 2006 il assiste presque impuissant à l’hégémonie de Renault et de Fernando Alonso et même s’il impose une belle résistance au pilote espagnol lors de son premier sacre en 2005 et termine vice-champion du mond, il n’aura jamais semblé être en mesure de lutter pour le titre. En cours de saison 2006, Raïkkönen réfléchi très sérieusement à son avenir après cinq ans d’échec chez McLaren. Ce dernier décide de céder aux sirènes venant d’Italie et de chez Ferrari. Jean Todt (directeur de la Scuderia) cherche alors un remplaçant à « Schumi » et place de grands espoirs dans le pilote finlandais. Le 10 septembre 2006 la décision est connue, Kimi Raïkkönen s’engage pour les trois prochaines saisons avec l’écurie au cheval cabré.

2007, année de la consécration

Début 2007, Räikkönen débarque donc à Maranello. Les essais hivernaux sont bons, la compétitivité de la F2007 ne semble plus à prouver et Felipe Massa (son nouveau coéquipier) et lui font donc figure de favoris avant le début de saison. En face, McLaren a changé son lineup en engageant le double champion du monde, Fernando Alonso, ainsi qu’un jeune rookie… un certain Lewis Hamilton.

Le début de saison du pilote finlandais est pour le moins compliqué. Il remporte, certes, la première manche du championnat, en Australie, mais rentre assez vite dans le rang. En effet, Kimi semble avoir du mal avec sa nouvelle voiture et surtout avec ses nouveaux pneus puisqu’après cinq saisons chez Michelin, lorsqu’il était chez McLaren, il doit maintenant s’adapter aux pneus Bridgestone. Durant son temps d’adaptation les McLaren de Lewis Hamilton et Fernando Alonso prennent le large au championnat du monde. Le pilote britannique est seul leader après sept manches avec 58 points, Alonso le suit avec 48 points, Felipe Massa est troisième avec 39 points et Raïkkönen pointe à une très décevante quatrième place avec seulement 32 points… à 26 points de son remplaçant chez McLaren. Le peu loquace Finlandais fait face à un flot de critiques inédit pour lui, mais cela ne l’empêche pas de continuer à travailler, ce qui s’avèrera payant…

La F2007 progresse en cours de saison et Kimi peut alors montrer tout son talent de pilote. Il remporte alors coup sur coup les Grands Prix de France et de Grande-Bretagne. Cela étant après le GP d’Italie, à Monza, où McLaren fait un nouveau doublé, les flèches d’argent occupent toujours les deux premières places du championnat (Hamilton 92 points, Alonso 89 points) et Raïkkönen a toutes les peines du monde pour revenir sur les deux voitures de Woking, il occupe la troisième place avec 74 points au compteur, début septembre. Tandis qu’il ne reste plus que quatre courses (Belgique, Japon, Chine et Brésil), « Iceman » possède donc encore 18 points de retard sur Lewis Hamilton, mais alors que le dénouement de la saison approche, les tensions entre les deux pilotes McLaren n’ont jamais été aussi vives, d’autant que l’écurie de Woking doit également faire face à une affaire d’espionnage envers Ferrari (ce qui lui coûtera le titre constructeur). Kimi Raïkkönen s’impose alors à Spa-Francorchamps, le 16 septembre et renoue enfin avec la victoire en réalisant une véritable démonstration. Au Japon, le pilote Ferrari est victime de la mauvaise stratégie de son équipe et ne termine que troisième, alors que Hamilton de son côté s’impose sur le tracé du Mont Fuji. À Shangai, le sort est cette fois du côté du finlandais. En effet, tandis que Hamilton fait la course en tête, suivi par Raïkkönen, le pilote britannique fait une terrible erreur en rentrant aux stands et est contraint d’abandonner, offrant ainsi la victoire sur un plateau au pilote finlandais.

Il ne reste plus qu’une course, le GP du Brésil et la situation au championnat est la suivante : Lewis Hamilton, premier avec 107 points, Fernando Alonso, deuxième avec 103 points et Kimi Raïkkönen, troisième avec 100 points. Pour être champion du monde, le finlandais doit s’imposer à Sao Paulo tout en espérant des soucis du côté de McLaren, surtout pour Hamilton. Lors des qualifications, c’est Felipe Massa le « régional de l’étape » qui décroche la pole, Raïkkönen, de son côté décroche le troisième temps et partira intercalé entre les deux McLaren. Le dimanche, les Ferrari caracolent en tête, Felipe devant Kimi, tandis qu’Hamilton est vite relégué en fond de peloton suite à un souci technique, le plan est parfait pour Raïkkönen. Alonso étant scotché à la troisième place, il suffit à Kimi de passer Massa pour être champion. Après le deuxième et dernier arrêt aux stands, il ressort sans problème devant le Brésilien, mène ensuite tranquillement la course et coupe la ligne d’arrivée en vainqueur et en champion du monde 2007 ! À 28 ans et après deux échecs, il rejoint enfin au Panthéon ses compatriotes Keke Rosberg et Mika Häkkinen.

Retour sur l’un des GP les plus mythique de l’histoire récente de la Formule 1.

Cependant, il doit attendre un mois pour voir son succès confirmé. En effet, les BMW et les Williams sont accusés d’avoir utilisé de l’essence « réfrigérée » à Interlagos. Comme ces monoplaces ont fini la course devant Hamilton, septième, leur éventuel déclassement aurait offert au Britannique les points nécessaires à l’acquisition de la couronne mondiale au détriment d’Iceman. Mais la FIA confirme le classement du GP du Brésil et Räikkönen est bien déclaré champion du monde.

Boucler la boucle chez Sauber/Alfa Romeo

Après deux années bien plus ternes du côté de la Scuderia Ferrari et malgré une prolongation de contrat jusqu’en 2010, le finlandais sent qu’il n’est plus en odeur de sainteté chez Ferrari. En septembre 2009, la nouvelle est officialisée, Kimi Raïkkönen quitte Ferrari et est remplacé par son grand rival, Fernando Alonso (revenu entre temps chez Renault, après l’échec de 2007). Deux options s’offre au finlandais : revenir chez McLaren ou quitter le monde de la Formule 1 pour se lancer en Rallye WRC. Il choisit la deuxième option et se retire donc de la F1. Malgré des performances globalement médiocre en Rallye, il poursuit pour une deuxième saison (il s’essaye également à la NASCAR) bien que les spéculations aillent bon train quant à son retour en F1. Finalement, en fin d’année 2011, Raïkkönen et son agent Steve Robertson entame des négociations avec Williams pour un retour, mais les négociations traînent en longueur et Kimi se tourne finalement vers Lotus-Renault (anciennement Renault).

Ses deux saisons chez Lotus-Renault sont convaincantes. Au côté de Romain Grosjean, le finlandais s’impose comme un vrai leader d’écurie et en deux saisons, Iceman grimpe à quinze reprises sur le podium remportant même deux courses (Abou Dabi 2012 et Australie 2013). Il termine troisième au championnat en 2012 et cinquième en 2013 (en ne courant pas les deux dernières courses de la saison suite à un problème de dos).

Kimi Raïkkönen au volant de sa Lotus E20, en 2012. (Wikipedia)

Malheureusement, ce problème de dos récurent mettra fin au partenariat entre Lotus et Kimi Raïkkönen. Pour la saison 2014, Kimi retourne chez Ferrari et fait équipe avec… Fernando Alonso, toujours chez la Scuderia. Sa saison est très compliquée et les Ferrari ne sont pas armées pour rivaliser avec les Red Bull de Sebastian Vettel et Daniel Ricciardo et surtout avec les Mercedes de Lewis Hamilton et Nico Rosberg. Il termine la saison à une peu reluisante douzième place au championnat du monde avec seulement 55 points.

En 2015, Fernando Alonso quitte Ferrari et est remplacé par Sebastian Vettel. Pendant quatre saisons (2015/2016/2017/2018) Raïkkönen et Vettel, vont tant bien que mal, essayé de mettre fin à l’hégémonie Mercedes, mais sans réussite. Le finlandais terminera une fois sixième (2016), deux fois quatrième (2015 et 2017) et une fois troisième (2018) au championnat du monde. Lors de son retour chez Ferrari, Raïkkönen devient donc le second pilote de l’écurie, d’abord derrière Alonso puis derrière Vettel, une situation qui frustre Iceman mais qu’il va finir par accepter au fil des saisons. Durant ses cinq saisons au sein de la Scuderia il ne remportera qu’une seule victoire (à Austin, en 2018), mais montera sur le podium à 26 reprises.

Kimi Raïkkönen lors de sa dernière victoire en Formule 1 (à priori), à Austin, en octobre 2018. (formula1.com)

Pour la saison 2019, Ferrari remplace Kimi par le jeune talent de Sauber, Charles Leclerc. Le finlandais fait le chemin inverse et intègre l’écurie de ses débuts (devenus Alfa Romeo). Après une première partie de saison très correcte, l’Alfa Romeo rentre dans le rang et Raïkkönen a du mal à se battre pour les points. Il sort tout de même une superbe performance en terminant quatrième lors d’un GP du Brésil complètement fou.

Cette saison, Alfa Romeo n’est plus en mesure de se battre pour les points et voir un champion comme Kimi Raïkkönen à l’agonie avec sa voiture, chaque weekend fait presque mal au coeur. Cela étant, le finlandais devrait, selon les dernières rumeurs, prolonger d’un an son contrat et faire une dernière pige la saison prochaine au côté de… Mick Schumacher, le fils de Michael. Actuellement à 324 GP, Kimi devrait terminer la saison à 330 GP et pourrait approcher voire dépasser les 350 s’il participe au championnat, la saison prochaine. Bref, une véritable légende vivante de ce sport !

Dans une discipline qui tend à se lisser de plus en plus, avoir un personnage aussi détaché voire cynique par moment (ce qui lui a valu son surnom « Iceman ») vis-à-vis de son propre sport, dans le paddock apporte un vrai vent de fraîcheur malgré le fait qu’il ait dépassé la quarantaine depuis quelques temps maintenant. Même si son record ne devrait pas tenir tant de temps que ça puisqu’avec le retour l’an prochain de Fernando Alonso (pour probablement deux saisons… voire plus) un autre pilote à plus de 300 GP sera sur la grille et que des pilotes comme Lewis Hamilton et Sebastian Vettel, qui ont déjà dépassé les 250 GP, devraient eux aussi poursuivre pour plusieurs saisons, sans compter le prodige Max Verstappen qui approchera les 120 GP à seulement 23 ans à la fin de la saison. Mais quoiqu’il en soit profitons, pendant que nous le pouvons, d’un des meilleurs pilotes de sa génération, Kimi Raïkkönen !

(Crédits photo de couverture : Getty Images)

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