Quelques semaines après la victoire surprise de Tao Geoghegan Hart sur le Giro, c’est un autre Britannique qui s’est illustré, mais cette fois-ci sur les sommets espagnols. Le géant de 26 ans, Hugh Carthy, devenu leader par défaut de la formation Education First, a fait mieux que répondre aux attentes.
Un long chemin vers la reconnaissance
Dans la lignée des Bradley Wiggins, Christopher Froome, Geraint Thomas et plus récemment Tao Geoghegan Hart, c’est un nouveau britannique, plutôt discret, qui s’est révélé sous le feu des projecteurs. Troisième de la Vuelta et vainqueur au sommet du terrible Angliru (voir article Angliru), Hugh Carthy a surpris son monde.
Un Tour d’Espagne 2020 qui lui a permis de voler de ses propres ailes. Du haut de ses 1,93m, le géant britannique n’était, jusqu’à présent, pas habitué à tutoyer les sommets. Jusqu’ici, Hugh Carthy n’avait remporté que le Tour de Corée en 2014 et le général du Tour des Asturies en 2016. Un léger palmarès pour le britannique souvent échappé mais jamais vainqueur. Son statut de grimpeur, Hugh Carthy a eu du mal à l’assumer. Enfant déjà, il montait le Mont Ventoux avec son père pendant ses vacances en France. Sur les rares routes escarpées de son pays natal, il a remporté ses premières victoires.
Non à la SKY
Dès les rangs juniors, le natif de Preston en Angleterre, s’illustre sur des courses difficiles. En remportant une étape du Tour d’Irlande et les classements de la montagne et général du Tour du Pays de Galles, le britannique s’est alors placé comme un des espoirs de son pays.
Des performances qui lui ont permis de débuter sa carrière professionnelle en 2013 au sein de l’équipe continentale britannique Rapha-Condor. Hugh Carthy va alors y remporter le premier succès de sa jeune carrière professionnelle. Des résultats concluants qui l’emmènent du côté de l’Espagne, à la Caja-Rural.
Un choix fort pour le Britannique puisqu’à tout juste 21 ans, Hugh Carthy fait le choix de l’Espagne alors que la Sky lui fait les yeux doux. Un choix qu’il a expliqué au média espagnol El Pais. « J’ai refusé l’offre des Sky parce que je n’avais pas envie de jouer les apprentis dans une grande équipe qui ne m’aurait pas considéré plus que ça à mon arrivée. Chez Sky, il fallait débarquer avec un statut, des galons qui te permettaient de ne pas être un serviteur. Moi, je n’avais gagné que des bricoles comme le Tour des Asturies ou le Tour de Corée. J’ai considéré qu’avant d’aller dans ce genre d’équipe, il fallait que je gagne des grandes courses et des étapes sur les grands Tours pour être respecté. » Un choix payant donc.
Une passerelle bénéfique
En passant par la Caja-Rural, Hugh Carthy a pu se prouver à lui-même de quoi il était capable. Souvent placé sur les courses à étapes, le géant britannique n’a pas mis de temps pour passer à l’échelon supérieur pour rejoindre la Cannondale (aujourd’hui Education First). C’est sous ce maillot que le grimpeur britannique va se révéler au plus haut niveau. Alors qu’il a à peine 21 ans, Hugh Carthy se classe 9è et meilleur jeune du Tour de Catalogne. Il va également profiter de l’invitation de son équipe à la Vuelta pour participer à son premier grand Tour, sans briller.
Malgré un palmarès toujours peu rempli, Hugh Carthy attire l’oeil. Et c’est la formation Cannondale – aujourd’hui Education First – qui rafle la mise. En attirant le géant britannique, l’équipe américaine mise sur un jeune talentueux, qui n’a que très peu prouvé. Après une année 2017 difficile, la deuxième année en World Tour va être celle de la révélation. Meilleur grimpeur de la Colorado Classic où il finira 3è du général, le nom de Hugh Carthy va régulièrement se retrouver dans le haut des classements distinctifs.
Toujours sous les couleurs d’Education First, le grimpeur d’1,93m va, en 2019, connaître l’une des plus belles saisons de sa jeune carrière : une victoire d’étape et le maillot à pois du Tour de Suisse, 11è du général, 3è meilleur jeune et deux top 5 d’étapes sur le Giro, Hugh Carthy s’affirme en tant que leader de cette équipe. Et il en veut encore plus. Mais malgré ses résultats, le coureur de désormais 26 ans, reste les pieds sur terre.
La Vuelta de la confirmation
C’est à domicile que Hugh Carthy, qui réside en Andorre, a confirmé toute l’étendue de son talent. Aligné sur la Vuelta 2020 pour épauler son leader Daniel Felipe Martinez, le britannique arrivait en forme et motivé. Mais la chute du colombien a chamboulé tous les plans. Bien placé les premiers jours de course, Hugh Carthy a dû assumer un rôle de leader pour la première fois de sa carrière sur un grand Tour. Et c’est sans complexe qu’il a provoqué tous ses adversaires. Mieux que figurer, Hugh Carthy a inquiété Primoz Roglic et Richard Carapaz. Surtout lors de la montée de l’Angliru. Sans trembler, il a accompagné les leaders avant de les déposer grosse plaque, pour s’envoler vers le plus beau succès de sa carrière.
Pour autant, le doute planait sur sa possible résistance sur trois semaines. Mais après une dernière journée de repos bien mérité, le britannique a été l’un des seuls favoris à tenir tête à Primoz Roglic sur le contre-la-montre. Sur ces derniers jours, le britannique s’est montré offensif, quitte à tout perdre. Alors que Roglic et Carapaz se marquait, le grimpeur de 26 ans a tenté d’asséner les derniers coups fatals à ses adversaires. En vain. C’est finalement la troisième place du podium qui l’attendait à Madrid, mais ce n’est sans aucun doute qu’on le reverra en trouble-fête sur les grands-Tours.
Le Tour d’Espagne 2020, certes perturbé par la crise sanitaire mondiale, a offert à Hugh Carthy l’opportunité de se faire connaître aux yeux du grand public. Esseulé dans les cols espagnols, le géant grimpeur de 26 ans a su faire preuve de panache pour mettre en danger ses rivaux et accéder à son premier podium en Grand Tour. Alors Hugh Carthy sera-t-il le prochain britannique a ramener un Grand Tour à son pays ?