Lens est sans conteste l’équipe surprise en Ligue 1 cette saison. Les Sang et Or, nouvellement promus, occupent la 7ème place du classement avec un bilan de 27 points en 16 matchs et comptent déjà 8 victoires. Plus que le résultat, c’est surtout la manière qui est épatante. Les Artésiens jouent un football décomplexé et offensif, à l’image de l’enfant prodige revenu au pays : Gael Kakuta (7 buts et 3 passes décisives), bien secondé par le trio Sotoca-Ganago-Kalimuendo, auteur de 13 réalisations. Ce dernier, prêté par le PSG pour une saison, ne cesse d’impressionner depuis son arrivée lors du dernier jour du mercato “estival” à la Gaillette. A 18 ans, il a déjà marqué 4 buts en 5 titularisations et s’impose comme l’un des plus grands potentiels de sa génération. Focus sur celui qui pourrait bien inspirer une suite à bienvenue chez les Ch’tis.
L’histoire entre le natif de Suresnes et le Racing Club de Lens est déjà intime avant même que le jeune prodige ne porte la tunique Sang et Or. En effet, celui qui rejoint le centre de formation du PSG en 2012, à 10 ans, se fait déjà remarquer face aux nordistes lors d’un 32ème de finale de Coupe Gambardella, en janvier 2020, en marquant deux buts et délivrant deux passes décisives lors d’une victoire 6-2 des siens. Déjà intégré au groupe pro parisien lors de cette saison 2019/20, étant par exemple convoqué lors du Final 8 à Lisbonne, l’été dernier. C’est vraiment lors de cette campagne 2020/21 que la carrière du jeune Titi parisien va s’accélérer.
En effet, dès la deuxième journée de L1, Kalimuendo est titulaire avec le PSG face… à Lens. Profitant d’un nombre important d’absent, il connaît donc cet été sa première titularisation avec son club formateur. Ce soir-là, le Racing lance son aventure en Ligue 1 en prenant les 3 points face aux finalistes de la Ligue des Champions, à travers une démonstration d’intention qui va les caractériser par la suite.
Lens s’est montré séduisant : pression permanente sur l’adversaire, volonté de défendre en avançant, pressing intensif à la perte de balle, déploiement de cinq chasseurs (les milieux récupérateur, le n°10, les deux attaquants), aidés par des marathoniens sur les ailes, lorsque l’adversaire décide de relancer court.. C’est à travers ce discours que Kalimuendo, conscient qu’il sera très difficile pour lui d’obtenir du temps de jeu à Paris, rejoindra le RC Lens en prêt (avec option d’achat mais le PSG garde une priorité) lors de la dernière journée du mercato. Il ne tarde d’ailleurs pas s’imposer dans l’effectif Sang et Or, bénéficiant de la blessure à la cheville de Ganago, qui éloigne le camerounais des terrains pendant plusieurs semaines.
Exemple de précocité et de maturité
Depuis son arrivée, il totalise 4 réalisations et 1 passe décisive. À cela s’ajoute, un doublé en amical contre Anderlecht, un CSC provoqué lors du match contre Reims et un pénalty obtenu contre Brest (transformé par Sotoca). Le tout avec seulement 421 minutes au compteur. Ainsi, Arnaud Kalimunendo n’est que le 16ème temps de jeu de l’effectif artésien, même si il faut prendre en compte que son arrivée est intervenue 5 semaines après le début du championnat.
Peu importe, il n’a pas de temps à perdre. En signant son premier but en Ligue 1 à l’âge de 18 ans, 10 mois et 2 jours, il est par ailleurs devenu le 2ème plus jeune buteur de l’histoire du Racing dans l’élite, étant seulement devancé par Raphael Varane, buteur à 18 ans et 12 jours lors de la saison 2010/2011. Confirmation en devenant le premier joueur du RC Lens à inscrire un but lors de chacune de ses trois premières titularisations en Ligue 1.
À travers ces chiffres, le jeune attaquant s’impose comme l’un des exemples d’un championnat français laissant place aux jeunes. En effet, il fait partie des 26 joueurs né en 2002, comptant au moins une apparition en Ligue 1 cette saison. Un record parmi les 5 plus grands championnats européens : La Bundesliga n’en compte que 19, la Serie A en a 14, 10 pour la Liga et seulement 3 pour la Premier League. Parmi eux, Kalimuendo se distingue en se montrant l’un des plus décisifs avec ses 4 buts, le leader étant le joueur du Borussia Dortmund, Giovanni Reyna (3 buts et 4 passes). Toutefois, il possède le meilleur total de buts pour un joueur né au 21ème siècle (après le 1er janvier 2001), a égalité avec l’attaquant du FC Barcelone, Ansu Fati.
Ganago – Kalimuendo : l’attaque des clones
Depuis le début de saison, Lens a osé provoquer les erreurs, ce qui veut dire aussi oser ouvrir des espaces dans le dos des chasseurs, et de s’inspirer de ce que fait l’Atalanta depuis plusieurs saisons. Et cela a porté ses fruits contre le PSG, Nîmes, Bordeaux et Dijon. C’est d’ailleurs ainsi que Kalimuendo a signé sa première réalisation contre les Bourguignons. Son pressing intense et haut, pour empêcher une relance courte de l’adversaire, a provoqué l’erreur de Racioppi, dont le dégagement a été contré par l’attaquant lensois, dans les filets adverses. Un but qui n’est pas sans rappeler celui de son comparse, Ignatius Ganago face.. au PSG.
C’est d’ailleurs dans ce sens que Franck Haise désirait par dessus tout le recrutement du Titi et cela avant même la blessure de l’ancien niçois. Le but étant d’apporter un profil de finisseur alors qu’à ce stade de la saison, Sotoca, Banza et Jean, avaient du mal à s’adapter à la Ligue 1.
« C’est un attaquant assez complet, il y a de la vitesse, de la qualité dans les déplacements de la profondeur dans son jeu mais pas uniquement ça. Ca fait, avec les 4 attaquants qui ont joué cette saison, une rotation supplémentaire. Il a des similitudes avec Ignatius Ganago au niveau de la capacité à prendre les espaces, les appuis qu’il propose, on cherchait aussi quelqu’un qui se rapprocherait de lui au niveau du profil. »
Franck Haise, entraineur du RC Lens
Il faut dire que l’un comme l’autre sont des clones quasi parfait, de par leurs morphologies :
- 1m78 et 63 kg pour Kalimuendo
- 1m76 et 78 kg pour Ganago
De plus, l’un comme l’autre brillent par leurs adresses et leurs efficacités devant le but. Début novembre, selon les données de la LFP, Kalimuendo, comme Ganago, cadraient plus de 50 % de leurs tentatives : 5 sur 8 (9 sur 16 pour le Camerounais), pour un but tous les 3,33 tirs (3,2 pour Ganago). À ce niveau, le duo se hissaient dans le top 5 du championnat où seuls Volland, Mavididi sont plus réalistes (2,6 tirs par but chacun). Ce que confirme toujours les statistiques actuelles

Un apport indispensable au jeu lensois
Lens est une équipe qui sait où elle va et qui varie ses sorties de balle, grâce notamment à la qualité de sa triplette arrière (Gradit-Badé-Medina). Plutôt justes techniquement (88% de passes réussies pour Gradit et Medina, 82% pour Badé), les trois hommes sont alors capables de jouer long – on voit souvent l’un d’entre eux sortir balle au pied avant d’enclencher une transversale vers le piston opposé -, mais aussi de trouver l’un des deux attaquants entre les lignes lorsqu’ils décrochent.
Le 3-5-2 permet d’étirer le bloc adverse, et Lens utilise bien cette force grâce à des pistons formés pour le poste – et non des joueurs placés dans ce rôle par défaut. Une fois la sortie de balle assurée, le Racing réussit à enchaîner rapidement grâce à un Kakuta, fin techniquement et à une belle complémentarité devant. Sotoca (ou Banza) intervient en point de fixation, puisque grâce à son physique et à sa capacité à remporter des duels aériens (48 % en moyenne sur 9,81 tenté par match), il permet de casser la ligne défensive adverse et crée un décalage pour Kakuta et/ou l’attaque de soutien : Ganago ou Kalimuendo, en charge de prendre la profondeur dans l’espace libre.

C’est en ce sens que les qualités de Kalimuendo sont primordiales. Sa grosse pointe de vitesse lui permet d’être très dangereux par ses appels en profondeur. C’est ainsi qu’il a égalisé contre Angers, à la réception d’un caviar de Gaël Kakuta, le néo-international Espoirs n’a pas tergiversé. Un pied droit solide, une demi-volée franche. Puissant et véloce, il se révèle aussi très utile dans son jeu dos au but, en appui, avec une remarquable conservation de balle.
Très intéressant dans son jeu sans ballon, Kalimuendo sait aussi se montrer efficace lorsqu’il l’a entre les pieds. Ainsi, l’attaquant lensois est tout à fait à l’aise lorsqu’il doit s’associer avec ses partenaires et fait preuve d’une certaine habilité technique en combinant en passe courte pour créer un déséquilibre dans les petits espaces (recherché à 265 reprises par ses coéquipiers). Il n’hésite d’ailleurs pas à s’insérer entre les lignes sur les attaques placées pour faire remonter le bloc (82 ballons touchés en zone médiane et 88 en zone offensive sur 165 au total). Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’il fait souvent les bons choix en contre-attaque (592 mètres parcourus avec le ballon vers le but adverse pour 918 au total), signe d’une bonne vision du jeu. Enfin, sa vélocité et son accélération sur les premiers mètres en font un joueur dur à défendre et capable de grosses différences une fois lancé (comme contre Brest où il obtient un pénalty).

Avant tout, ce qui marque chez Kalimuendo, c’est sa capacité à être un vrai tueur devant le but. Véritable machine à marquer en jeunes, il se montre très précis et efficace à la finition, comme nous le confirme les xG où il est en nette sur-performance : 4 buts pour un Xg de 2,57 (il aurait dû marquer environ 2 à 3 buts selon ses performances). En outre, son jeu de tête est vraiment excellent pour un joueur de sa taille (1,78m), ce qui est un atout considérable pour lui. Son placement dans la surface est aussi remarquable, ce qui lui permet d’avoir souvent un temps d’avance sur son défenseur.

En bref, Arnaud Kalimuendo est un attaquant complet, aussi bien tueur devant le but qu’utile pour son équipe dans le jeu. Prêté à Lens avec option d’achat, difficile de savoir où il jouera dans 1 an mais une chose est sûre : il est promis à un très bel avenir. En attentant, il est l’une des pièces maitresses de la très bonne première partie de saison des Lensois et qui sait, une fois qu’ils auront assuré leur objectif martelé du maintien, pourraient-ils se mettre à rêver d’une place en Coupe d’Europe ?