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Julien Lizeroux, l’esprit guerrier

Pendant son long périple qui le mène jusqu’à Zagreb (Croatie), troisième étape de la Coupe du monde en slalom, Julien Lizeroux revient dans un entretien plein de vérité, sur les moments marquants de sa carrière jusqu’à présent, et évoque son état d’esprit pour cette nouvelle saison. À 41 ans, le plagnard est le doyen du circuit Coupe du Monde, il entame sa 21e saison dans l’élite, et ce n’est en aucun cas pour faire de la figuration !

Entre blessures et coup d’éclats, le natif de Moûtiers (Savoie) s’est forgé un des plus beaux palmarès français en slalom. Il comptabilise 11 podiums en Coupe du monde, dont trois victoires, obtenues entre les piquets serrés de Kitzbühel, Kranjska Gora, et Adelboden. Il complète sa collection avec les nouvelles épreuves de slalom parallèle, individuelles et par équipe. Julien Lizeroux est également vice-champion du monde de slalom et de combiné à Val d’Isère en 2009, et membre de l’équipe championne du monde de parallèle à Saint-Moritz en 2017.

Julien Lizeroux couvert d’argent aux mondiaux de Val d’Isère en 2009.

Si vous deviez retenir cinq moments de votre carrière, lesquels choisiriez-vous ?

C’est hyper dur d’en sélectionner seulement cinq, mais je dirais :

23 janvier 2000, ma première Coupe du monde, à Kitzbühel ! J’en avais pris pleins les yeux, j’avais fait la reco’ avec Hermann Maier (54 victoires en Coupe du monde et 4 gros globes de cristal), et j’avais tout regardé, sauf le tracé ! (résultat, il ne verra pas la 2ème manche).

18 février 2001 à Shigakogen (Japon), je signe mon premier top 10 en Coupe du monde. Je gagne la 2ème manche, et je remonte de la 27e à la 8e place ! Cette course m’a toujours motivé durant les 5 années très galères que j’ai vécu ensuite. Je me suis dit que si j’avais gagné une manche une fois, j’étais capable de le refaire.

Un 9 mars 2000 pour une première sur le slalom nocturne de Schladming.

Ces années de galères débutent à Aspen (USA), le 25 novembre 2001, avec une première rupture des ligaments croisés du genou. Eloigné une année des pentes de la Coupe du monde, il revient le 24 novembre 2002 à Park City, et enchaîne les non-qualifications en seconde manche. En 2003, c’est la cheville qui est touchée, avant les ligaments croisés, une nouvelle fois, à Chamonix, en janvier 2005.

18 décembre 2006, j’arrive à me qualifier pour une deuxième manche pour la première fois depuis plus de 5 ans, et Aspen en novembre 2001 (soit 1849 jours, une éternité). Je termine 6e !

« 25 janvier 2009 à Kitzbühel, (là ou tout avait commencé neuf ans plus tôt), j’obtiens mon premier podium, qui est aussi ma première victoire en Coupe du monde. Je tournais autour du podium depuis deux ans, et on fait le doublé avec JB Grange dans la Mecque du ski, juste avant les Championnats du monde de Val d’Isère.

SKI ALPIN / KITZBUEHEL"Un jour extraordinaire" pour LizerouxEN VIDEO Son  interviewEN PHOTO La joie partagée

Des mondiaux à domicile mémorables pour le Plagnard, puisqu’il devient en une semaine vice-champion du monde de combiné (son premier podium dans la discipline, avant un second quelques jours plus tard en Coupe du monde à Sestrières), et de slalom !

17 novembre 2013, j’effectue mon retour à Levi (Finlande), après deux ans et demi sans Coupe du monde (Kitzbühel 23 janvier 2011), à cause de mon genou gauche bien abimé. Je me qualifie en seconde manche avec le dossard 63, et je termine 17e !

Lors des trois saisons suivantes, de 2015 à 2017, le Plagnard retrouve de la confiance, gagne en régularité, et se rapproche à nouveau des sommets du slalom mondial. Durant cette période, il termine 25 de ses 30 slaloms dans les points, avec notamment une 5e place à Wengen, et deux 4e place à Saint-Moritz et Schladming. Il retrouve alors une solide place dans le top 15 mondial, avant ces trois dernières saisons, de redescendre dans la hiérarchie. Le tricolore n’est pour l’instant pas parvenu à se qualifier en seconde manche, mais il garde la même envie et ce mental de guerrier qui le caractérise, avant d’affronter les grandes classiques de janvier.

LIZEROUX Julien

Si vous aviez un seul truc à changer ?

Je ne changerais surtout rien ! J’ai construit ma carrière en ne lâchant jamais rien dans les moments difficiles. Qu’ils soient physiques ou mentaux, ils ont forgé mon caractère, et m’ont fait devenir ce que je suis actuellement… Après dans le monde des bisounours, si on m’enlève les blessures, ça change fortement la donne !

Quel conseil donneriez-vous au Julien Lizeroux qui débute en Coupe du monde ?

En termes de motivation, d’implication et de sérieux, je ne changerais pas grand-chose. Je me suis souvent blessé quand j’étais en pleine forme, et mes blessures m’ont beaucoup diminué physiquement. Alors je ferais encore plus attention, et je mettrais encore plus l’accent sur les séances ludiques.

21 ans après vos débuts au plus haut niveau, où trouvez-vous la motivation et les ressources pour continuer à « se faire mal » lors de la prépa ?

Ce n’est pas facile tous les jours…. Mais dans l’ensemble, il y a plus de points positifs que négatifs. J’aime beaucoup le travail foncier et les activités ludiques. Tout le travail de musculation et de proprioception ne me dérange pas du tout. Le plus dur, c’est le travail lactique qui est extrêmement exigeant. Sur les skis, certaines séances avec beaucoup d’intensité sont compliquées pour moi… Le plus difficile c’est d’encaisser les secondes à l’entraînement !

Des entraînements que le jeune Lucas Braathen (NOR) était honoré de partager avec son idole de jeunesse.


Ces dernières saisons sont malheureusement plus compliquées, ce sont le plaisir et la forme toujours présentes qui vous poussent à continuer ?

Rien ne me pousse à continuer ! Je continue parce que j’en ai envie. Je me pose souvent la question de savoir si je continue parce que j’ai peur d’arrêter, ou si j’en ai envie. Et je pense sincèrement que je ne choisis pas la solution de facilité en continuant, car je suis obligé de sortir de ma zone de confort quotidiennement, pour essayer de rivaliser avec les plus jeunes. Le challenge est plutôt sympa à relever ! Mais c’est sûr que je suis beaucoup moins performant qu’il fut un temps, mais aussi plus qu’il fut un autre !

Quelle est votre relation avec les plus jeunes, on imagine que vous devez être une belle source d’inspiration pour eux ?

L’ambiance du groupe, la relation avec les autres, ce sont aussi les raisons pour lesquelles je continue la compétition. Nous nous entendons tous très bien. L’ambiance est travailleuse et déconneuse ! Le mélange des générations est top.

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Une équipe de France unie pour célébrer le doublé de Clément Noël à Wengen. Crédit : Agence Zoom

Je ne sais pas si je suis une source d’inspiration, en tous les cas les jeunes en sont une vraie pour moi, et je m’inspire d’eux tous les jours ! Nous échangeons beaucoup et nous progressons ensemble.

Comment avez-vous vécu cette prépa perturbée par la crise sanitaire ?

Plutôt très bien ! Confinement au calme à la maison. Notre préparation n’a pas du tout été perturbée, nous avons pu nous entrainer normalement. Nous avons juste dû adapter la programmation au calendrier, et être patients. Une longue attente qui a finit par se remarquer à l’approche de cette nouvelle saison …

Comment appréhendez-vous cette nouvelle saison, quels sont vos objectifs ?

Je l’aborde comme un jeune dans ma tête, et beaucoup moins jeune dans mon corps… Le seul objectif, c’est d’être au départ des 2e manches. Je ne pense pas au week-end prochain, je vis au jour le jour !

Après un début de saison délicat, Julien Lizeroux va aborder les classiques de janvier avec l’envie de retrouver la place qui est la sienne, à savoir dans les 30 meilleurs mondiaux. Il aura même une double occasion de briller à Kitzbühel (reprise du slalom de Wengen), avant de se rendre à Schladming la semaine suivante. Son immense expérience sera sans aucun doute un énorme atout sur ces pistes techniques. Il devra composer avec les jambes du jour, et compter sur l’engagement toujours maximal qui le caractérise !

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