Site icon Café Crème Sport

Chloé Valentini : « En sélection, le jeu est très rapide, il faut être concentrée en permanence ! »

Médaillée d’argent à l’Euro de handball au Danemark, Chloé Valentini a des ambitions plein la tête. La native de Morteau espère porter le maillot si convoité des Bleues aussi longtemps que possible. Performances en compétition internationale, avenir en club et vie professionnelle, l’ailière bisontine s’est exprimée pour le CCS. Alors installez-vous, prenez un bon café crème et immergez-vous dans l’univers de l’internationale française.

On l’a appris jeudi dernier, vous quittez Besançon à la fin de la saison pour rejoindre Metz. Que ressentez-vous à l’idée de quitter le club pour lequel vous jouez depuis maintenant 10 ans ? 

C’est forcément une décision compliquée, cela fait dix ans que je joue pour l’ESBF, dont huit années pros en première division. C’est dur de se dire qu’on va tout quitter. Mais objectivement, je n’ai pas trop réfléchi à tout cela, j’ai bien évidement des objectifs en tête : jouer la Ligue des champions. C’est donc un peu une évidence, pour atteindre mes objectifs, je devais quitter mon club de cœur. Cela risque d’être dur à la fin de la saison mais je sais que de belles choses m’attendent à Metz.

Vous avez évoqué la Ligue des champions, c’est un argument solide qui a dû vous convaincre pour rejoindre Metz ?

Évidemment ! Jouer la Ligue des champions est un objectif que je me suis toujours fixé. Je souhaite passer un pallier, évoluer dans ma carrière de joueuse et jouer à un niveau supérieur. En rejoignant Metz, j’ai aussi envie de me mettre en difficulté, d’avoir de la concurrence mais surtout de continuer à apprendre et progresser. Dans un grand club comme celui-ci, je pense avoir tout ce dont j’ai besoin.

Vous semblez avoir vraiment envie de relever de nouveaux défis, voir jusqu’où vous serez capable d’aller ? 

Oui forcément, cela fait neuf ans que je joue en D1 à Besançon. Évidemment je n’ai pas seulement eu besoin de claquer des doigts pour avoir tout cela, j’ai beaucoup travaillé. Mais aujourd’hui, j’ai l’impression d’avoir un peu fait le tour. Ici, je sais déjà comment vont se passer les choses. J’ai envie de voir comment je peux réagir en ayant moins la confiance du coach, moins de temps de jeu. Je pense que c’est aussi comme cela que je vais progresser sur le plan mental notamment.

À Metz, Chloé retrouvera Orlane Kanor et Méline Nocandy, ses coéquipières en sélection. Crédit : Maury Golini

« Jouer la Ligue des Champions est un objectif que je me suis toujours fixé. Je souhaite passer un pallier, évoluer dans ma carrière de joueuse et jouer à un niveau supérieur. »

Chloé Valentini

Beaucoup de vos coéquipières en équipe de France jouent en Europe de l’Est notamment en Russie et en Hongrie. Béatrice Edwige avait même déclaré que Györ était l’écurie mondiale du hand féminin. Comment voyez-vous cela ? Est-ce que jouer en Europe de l’Est est un passage indispensable dans une carrière de handballeuse ?

Pour moi Györ est le meilleur club au monde. Les championnats russes et hongrois ont de très bonnes équipes, bien ancrées en Ligue des champions. Bien sûr, toute joueuse rêve de jouer à Györ ! Mais il ne faut pas brûler les étapes, je suis à Besançon encore cinq mois, je vais ensuite rejoindre Metz et disputer la Ligue des champions. J’ai aussi envie de voir comment je m’adapte à cette compétition européenne, avec un niveau plus élevé que ce que j’ai l’habitude de voir. Étape par étape !

À Besançon l’année 2021 commence plutôt bien ! Vous éliminez Bourg-de-Péage en Coupe de France, gagnez face à Paris 92, et malgré la défaite face à Brest, vous réalisez un match solide. Être dans le top 5 du classement à la fin de la saison c’est crédible pour vous ?

Cela risque d’être compliqué. Le championnat de France est vraiment très relevé. Il y a bien sûr Brest et Metz qui sont un peu au-dessus mais il n’y a que des belles équipes. Forcément on donnera tout pour être dans les cinq premières et espérer une place en coupe d’Europe la saison prochaine. Mais avec le Covid le championnat est un peu chamboulé… beaucoup d’équipes ont encore des matchs en retard. Par exemple, Brest est 2e au classement mais il leur manque encore trois matchs. Quand toutes les journées seront rattrapées, les choses bougeront forcément. À Besançon, on est une équipe qui se bat sur chaque match, je sais qu’on verra notre maximum pour terminer le plus haut possible.

À l’ESBF, beaucoup de vos coéquipières viennent, comme vous, du centre de formation du club. Est-ce une force pour la suite de la saison ? 

Oui on est une équipe plutôt jeune à la différence d’autres équipes en France. Par exemple, certaines de nos joueuses n’ont pas encore signé de contrat professionnel alors que dans des équipes comme à Metz ou à Brest, quasiment toutes les joueuses ont le statut de pro. On rentre au centre de formation à l’âge de 18 ans, s’en suivent généralement quatre ans de formation. Le plus souvent, c’est à 22 ans que l’on signe notre premier contrat pro. Mais de plus en plus de clubs font signer leurs jeunes avant la fin de leur formation pour ne pas les laisser filer ailleurs !

Chloé Valentini et l’ESBF sont bien armés pour la suite de la saison. Crédits : Arnaud Castagné

Au Café Crème Sport on a suivi de très près ton Euro avec les Bleues, félicitation pour cette belle deuxième place ! Qu’avez-vous appris de ces confrontations de très haut niveau, vous sentez-vous plus mature sur le terrain ? 

Pour moi, la différence la plus marquante entre la sélection et le club, est la rapidité du jeu et la concentration qu’il faut avoir. Le jeu est tellement rapide que si tu as deux secondes d’inattention, tu le paies cash. Il faut toujours donner le meilleur de soi-même pour ne rien regretter et pouvoir jouer un maximum. Dans un championnat d’Europe comme l’Euro, on ne peut pas jouer une heure tous les matchs, c’est tellement intense… En Équipe de France on a la chance d’avoir un groupe très élargi, Olivier (Krumbholz, sélectionneur de l’équipe de France féminine de handball) a confiance en tout le monde et essaye de donner du temps de jeu à chacune d’entre nous. Chaque joueuse est mise dans les meilleures conditions et peut apporter ce qu’elle a de mieux à offrir sur le terrain. C’est ce qui fait notre force et ce qui nous a permis d’aller chercher la médaille d’argent !

Physiquement, comment revient-on après une compétition si intense ? 

C’est très très dur ! D’abord vous avez l’euphorie d’être enfermée pendant un mois, à gagner des matchs. On joue un match, on se repose et on rejoue le lendemain, il faut constamment se reconcentrer. Tu reviens à Besançon avec la médaille, on essaye de profiter un peu avec nos proches, de fêter un peu tout cela. Mais sans mentir, j’en bave un peu physiquement et mentalement, je sens que j’ai épuisé beaucoup d’énergie durant ce mois de décembre. Malgré tout, à Besançon, j’ai la chance d’avoir un staff qui m’écoute, quand je me sens trop fatiguée, le préparateur physique me laisse un peu souffler. C’est important de sentir que je suis comprise.  J’ai aussi pas mal de séances de kiné car après un mois de compétition intense, on revient avec pas mal de pépins un peu partout !

« Pour moi, la différence la plus marquante entre la sélection et le club, est la rapidité du jeu et la concentration qu’il faut avoir. »

Chloé Valentini

Mentalement aussi tout cela doit être éprouvant ? 

L’ascenseur émotionnel est énorme…Pendant un mois on est constamment sous pression, on est concentrées, et on gagne une médaille. Quand on rentre à la maison on essaye de relâcher un peu tout cela. Ce n’est pas du tout le même ressenti que lorsqu’on joue en championnat, ce n’est pas la même préparation. Dans une compétition comme l’Euro, dès qu’un match se termine, il faut immédiatement penser à la rencontre suivante, c’est très éprouvant. En championnat, on a parfois une semaine pour préparer un match, ce qui nous laisse plus de temps pour souffler physiquement mais aussi mentalement.

L’Euro de hand a été la première compétition collective internationale depuis le début de la crise sanitaire. On a beaucoup parlé de « bulle sanitaire » pour évoquer votre isolement durant la compétition. Comment fait-on pour s’adapter à cette situation ?

Nous n’avons pas pas le choix. Toutes les 48h on devait faire un test Covid, porter masques et gants lors des repas. Mais le plus dur était de ne pas pouvoir sortir. Personnellement, j’ai l’habitude d’aller me balader avant les rencontres, cela me permet de mettre dans mon match et là c’était interdit.  Lors de compétition comme celle-ci, nous décompressons en allant se balader, boire un café, et tenter de décrocher un peu et de se détendre. Mais cette année, rien de tout cela n’a été possible. Mais malgré tout, je trouve que nous l’avons bien vécu.

Chloé Valentini et les Bleues ont décroché la médaille d’argent à l’Euro 2020. Crédit : Eurosport

En parallèle de ta vie d’handballeuse, vous avez obtenu votre diplôme de moniteur éducateur. Pourquoi était-ce important pour vous de continuer vos études malgré ton statut de joueuse professionnelle ? Comment avez-vous su gérer les deux casquettes ? 

Ça a été compliqué pour moi de trouver ma voix, ce que je voulais faire. Je ne voyais que le hand. Mais en grandissant je me suis vite rendu compte qu’il était important d’avoir un diplôme qui me plaisait. De me dire que si je voulais arrêter le hand demain, ou si je me blessais ou autre que je puisse avoir un métier que j’aime faire. Sincèrement ça a été compliqué surtout au début, il a fallu gérer l’emploi du temps, jongler entre les entraînements, les cours, les stages pour mon diplôme, et les stages avec l’équipes de France. Je partais le matin à 7h avec un gros sac et je rentre le soir à 20h après l’entraînement c’était des grosses journées. J’ai mis ma vie perso un peu de côté à ce moment. Mais par contre j’ai adoré apprendre, me remettre en question et voir autre chose que du handball. J’ai eu la chance d’être à l’école et en stage avec des personnes qui m’ont compris et aidé.

Cet été, et on croise les doigts, auront lieu les JO à Tokyo. L’or olympique est la seule médaille qu’il manque aux Bleues pour rentrer un peu plus dans l’histoire… Sans se mettre trop de pression je suppose que Tokyo est toujours dans un coin de ta tête ?

J’ai participé au Mondial au Japon, à l’Euro au Danemark où nous avons fait une médaille d’argent. Forcément, les JO sont dans un coin de ma tête mais après je ne me mets pas plus de pression que ça, étape après étape. À moi seul de prouver et de montrer que je veux être aux JO cet été.

« Je ne voyais que le hand. Mais en grandissant je me suis vite rendu compte qu’il était important d’avoir un diplôme qui me plaisait. »

Chloé Valentini

Quel est votre meilleur souvenir avec l’ESBF ? 

Un match de coupe d’Europe en Russie, nous étions pas du tout favorites mais on a gagné avec une salle remplie de spectateur qui hurlaient. Rien ne pouvait nous arriver et j’adore cette sensation.

Avec les Bleues sur le terrain ? 

Sincèrement tous les matchs de l’Euro sauf la finale… J’adore porter le maillot bleu et être dans cette équipe, tout le monde a le même objectif et donne tout pour y arriver en plus chaque personne est bienveillante.

Quitter la version mobile