Deux semaines se sont écoulées depuis l’ouverture de la saison en NHL, le 13 janvier dernier. Après un démarrage timide, les équipes semblent avoir trouvées leurs repères et nous proposent désormais une belle qualité de jeu. Certaines franchises assument leur statut de favorites, d’autres surprennent les observateurs. Certains joueurs repartent sur les mêmes bases que les années précédentes, d’autres semblent avoir franchit un cap. Mais derrière les équipes et les patineurs qui brillent, il y a celles et ceux pour qui le début de saison rime avec déception. Bien évidemment, il est trop tôt pour les juger. Il s’agit d’un simple avertissement pour des joueurs et des équipes dont on attendait plus. Florilège.
Les attaques new-yorkaises
À l’heure où nous écrivons ces lignes, les Rangers viennent de battre les Sabres de Buffalo en prolongation (3-2 OT), seulement leur deuxième victoire de la saison. Les Islanders étaient aussi sur la glace. En tête 3-0 à la fin de première période, ils ont subit un terrible retour des Caps et s’inclinent finalement 3-6 contre Washington. La majorité des équipes ont disputé au moins 7 matchs. Dans la Division Est, les deux franchises de New-York occupent les dernières places.

Comme beaucoup, nous attendions avec enthousiasme les Rangers et les Islanders pour cette saison 2021. L’équipe entraînée par David Quinn était la bonne surprise de l’exercice précédent avec une attaque prometteuse, portée par Artemi Panarin et Mika Zibanejad. Avec l’ajout du numéro un du dernier repêchage, Alexis Lafrenière, considéré comme “talent générationel”, les attentes et l’excitation sont aussi grandes que justifiées pour les Blue Shirts. Il en va de même pour les Islanders qui ont étonné beaucoup d’observateurs lors des dernières séries. Grâce à un jeu collectif surprenant et une efficacité redoutable, les Isles se sont hissés en Finales de la Conférence Est, tombant contre les futurs champions du Lightning.

Les Rangers totalisent seulement 5 points en 7 rencontres, dernier bilan de la Division Est et 29ème de la Ligue. Alors qu’ils ont terminé la dernière saison avec la 5ème meilleure attaque de NHL (3,33 buts par partie) et le 3ème meilleur taux de conversion des tirs tentés (10,7%), l’offensive des Rangers semble éprouver davantage de difficultés en 2021. Actuellement, ils sont la 28ème attaque de la Ligue avec 2,57 buts par match et affichent le 26ème pire taux de conversion des tirs avec un triste 7,7%. La différence est flagrante. Alors comment expliquer une début de saison si chaotique ?
D’abord, en regardant la physionomie des matchs, le bilan des Rangers semble peu révélateur. Terrassés lors du match d’ouverture par les Islanders (0-5), les Blue Shirts ont renvoyé la pareille lors du second match (4-0). Une double confrontation représentative de ce début de saison où le déroulement d’une rencontre peut varier d’un jour à l’autre. Ensuite, 4 défaites consécutives, toutes par un seul but d’écart ou après une séance de fusillades. Rien d’alarmant pour l’équipe la plus jeune de NHL (25,6 ans en moyenne). Mais voilà, les soucis offensifs des Rangers ne sont pas la responsabilité des jeunes joueurs.
Bien que son apport statistique ne soit pas glorieux pour le moment, Alexis Lafrenière s’est bien intégré au sein du collectif et prend ses marques progressivement dans la grande ligue. Lors du dernier match des Rangers, il a inscrit son premier but en NHL contre les Sabres, un but gagnant en prolongations. De même, Kaapo Kakko est peut-être encore frêle mais semble bien décidé à passer un cap cette saison, mental notamment. Il n’a inscrit que 2 buts en 7 matchs mais affiche le deuxième meilleur taux de réussite au tir de son équipe avec un 16,7% sur 12 tentatives. Enfin, c’est surtout Filip Chytil qui a impressionné avec ses 3 points en 5 matchs. Malheureusement, il s’est blessé au haut du corps et est annoncé out entre 4 et 6 semaines.
Les responsables des défaillances offensives des Rangers sont ceux censés porter la franchise. Chris Kreider, Ryan Strome et Mika Zibanejad connaissent un début de saison très compliqué avec 6 points, dont seulement 3 buts cumulés sur les 7 premières rencontres. Même le leader de l’équipe, Panarin n’a pas été brillant bien que son apport statistique soit conséquent avec ses 8 points en 7 matchs. David Quinn a réalisé quelques ajustements dans les deux dernières rencontres contre les Sabres. Si au premier match les attaquants des Rangers ont eu du mal, la dernière rencontre a été plutôt convaincante. Et il faudra que ces attaquants expérimentés élèvent rapidement leurs niveaux de jeu pour être plus efficace en avantage numérique puisque les Rangers ne convertissent que 13,8% (23ème) de leurs occassions dans cette situation. Dans tous les cas, il faudra bien qu’un jeune comme Kakko ou Laffi explose si l’un des anciens, et on pense à Zibanejad ici, baisse de niveau pour enrayer les défaillances offensives des Rangers.

Comme leurs voisins, les Islanders éprouvent de sérieux problèmes offensifs et pour eux, la tâche semble plus difficile à résoudre. Avec 6 points en 7 matchs, les Isles sont la 30ème attaque de la Ligue, à égalité avec des Ducks qui sont loin d’être une référence. Nous avons tous en mémoire la force offensive des Islanders en Séries qui a inscrit 66 buts en 22 matchs, soit 3 buts par rencontre, le deuxième meilleur total des dernières séries. Mais il faut l’admettre, l’attaque des Isles n’était pas la force principale de l’équipe de Barry Trotz la saison dernière. Mais tout de même, avec des Séries aussi convaincantes, on s’attendait à un début de saison plus réussi sur le plan offensif.
D’abord, ce qui saute aux yeux c’est que la première ligne des Islanders demeure la principale menace de l’équipe. Le trio Anders Lee-Matthew Barzal-Jordan Eberle a porté l’attaque au nombre de buts et en ce qui concerne les chances de marquer. Ils ont inscrit 8 des 14 buts de New-York. Cette ligne est la plus régulière et la plus efficace de l’équipe, mais elle rappelle les Islanders de 2009 à 2014, l’époque d’une dépendance offensive à John Tavares. Comme son aîné, si Barzal est ciblé et piégé par la défense, l’attaque des Islanders devient presque inefficace. Mais le plus gros problème des Isles vient de la deuxième ligne sans aucun doute.
Barry Trotz l’a admit lui-même, la ligne Anthony Beauvillier-Brock Nelson-Josh Bailey était la meilleure ligne des Islanders dans la bulle d’Edmonton. Beauvillier s’est blessé au bas du corps et sera probablement indisponnible pour un bon moment. En 5 matchs, l’attaquant de 23 ans n’a enregistré qu’un seul point. Il en va de même pour Josh Bailey en 7 rencontres, lui qui avait inscrit 20 points en 22 matchs de Séries éliminatoires. Et que dire de Brock Nelson ? Le deuxième centre n’est que l’ombre de lui-même, inscrivant 2 buts en 7 matchs, il a commis des erreurs préjudiciables dans les défaites des siens. En l’absence de Beauvillier, c’est Kieffer Bellows qui prend le poste d’ailier gauche sur cette ligne. Le garçon se bat, mais le renouveau de cette ligne passe évidemment par un retour de Nelson et Bailey à leurs meilleurs niveaux.
Peu à peu, Trotz tente de trouver des solutions mais son manque de profondeur rend difficile de mettre ces deux joueurs en concurrence. Léo Kamarov n’a pas spécialement convaincu lors de ses deux premiers matchs, notamment parce qu’il ne possède pas les qualités nécessaires pour faire briller un centre comme Jean-Gabriel Pageau sur la troisième ligne. JGP comptabilise seulement 3 points en 7 matchs mais il semble souffrir des rotations de son entraîneur. Les espoirs pourraient venir d’Oliver Walhstrom, 11ème choix de 2018. Premier match contre les Caps et premier but pour l’attaquant de 20 ans. Quoiqu’il en soit, avec une deuxième ligne franchement défaillante, l’absence de Beauvillier, la déception de Bailey/Nelson, Barry Trotz a du travail pour rendre les Islanders de nouveau efficace en attaque. On attend beaucoup mieux.
Evgeni Malkin

S’il y a bien un attaquant qui déçoit en ce début de saison, c’est bien lui : Evgeni Malkin. Du haut de ses 34 ans, l’attaquant russe des Pens donne l’impression d’être hors de forme, loin de son meilleur niveau. Malkin n’a enregistré que 3 points au total sur ses 8 matchs et une évaluation de -3. Après avoir remporté plus de la moitié de ses mises au jeu pour la première fois de sa carrière l’année dernière, il a régressé à seulement 45% cette année. En plus, ses revirements atteignent un niveau record de 5,32 pour 60 minutes, bien au-dessus de son pire total en saison qui était de 4,06 pour 60 minutes en 2018-2019. Bien évidemment, il n’a disputé que 8 matchs, un échantillon de jugement très faible. On pourrait ainsi penser qu’il ne s’agit qu’un retard à l’allumage pour le futur membre du Temple de la Renommée mais ces quatres derniers matchs sont les plus révélateurs de ses difficultés.
Evgeni Malkin n’a inscrit aucun but sur les quatre dernières parties des Pens, ne tirant que 5 fois au but lors de ces rencontres. Le plus impressionnant dans cette méforme réelle est le niveau de son patinage. Puissant et véloce, Malkin est l’un des meilleurs patineurs des 10 dernières années. Sur ce début de saison, il semble patiner sur du sable. Dans un récent entretien accordé Josh Yoe pour The Athletic, Malkin a reconnu ne pas être à son niveau et l’explique notamment par sa préparation physique en Russie :
“Je comprends que je ne joue pas très bien en ce moment. C’est une saison différente, un camp court, pas de matchs de pré-saison. Mais je dois me regarder dans le miroir et me battre pour aider cette équipe à gagner. Je ne suis pas content de mon jeu. Je viens à la patinoire tous les jours et je me bats à chaque quart de travail. C’est dur de jouer. Pas de fans. C’est un peu différent. Mais nous sommes tous dans la même situation en ce moment, moi y compris.”
Il faut aussi dire que ses partenaires de seconde ligne n’ont pas réellement aidé Malkin. Cette ligne contrôle moins de 37,5% des buts attendus et moins de 40% des chances de danger élevé, selon Natural Stat Trick. Malkin doit aussi s’adapter puisqu’il se retrouve avec deux nouveaux coéquipiers sur cette ligne : Evan Rodrigues et Kasperi Kapanen. Le premier a reculé de la première à la seconde ligne cette saison et le second est un petit nouveau, qui n’a pas participé aux camps des Penguins. Mais il serait injuste de ne pas pointer du doigt les difficultés de Malkin qui n’a tenté que 15 tirs cette saison pour un taux de réussite de 6,7%, le pire de sa carrière.
Si les Pens veulent revenir sur les devants de la scène, il faut que Malkin sorte de son rôle de créateur pour les autres et adopte une mentalité de marqueur pour justement, porter cette deuxième ligne encore un peu neuve. Peu d’inquiétudes pour lui, il doit retrouver son niveau physique et tout peut se débloquer ensuite.
La défense de Columbus

Avant de crier au scandale, tempérons notre propos : la défense de Columbus n’est pas une réelle déception, mais au vue de sa perfromance en Séries, nous nous attendions à mieux. Sans constestation possible, la défense et le gardien des Blue Jackets constituent le point fort de cette formation. La question mérite d’être posée : où est passé le Top 4 défensif de Columbus ?
En regardant les années précédentes et les Séries, les paires Werenski/Jones et Gavrikov/Savard étaient censées apporter une réelle plus-value en attaque tout en étant un mur défensif. Mais en regardant les 7 premières rencontres de Columbus, on s’apperçoit que l’apport de la ligne bleue vient essentiellement du troisième duo composé de Mickael Del Zotto et Dean Kukan. Ils sont tout simplement les meilleurs pointeurs de leur équipe chez les défenseurs avec respectivement, 4 et 3 points.
La première paire dispose d’un énorme temps de jeu, aux alentours des 25 minutes, mais a du mal à contribuer offensivement. Werenski cumule 2 points, dont 1 but en 8 rencontres et une triste évaluation de -5. Seth Jones n’a récolté qu’un seul point et affiche un différentiel de -7… Respectivement, leurs xFG% (buts attendus par pourcentage) sont de 38,7% et 37,3%. Concrètement, lorsqu’ils sont sur la glace, Columbus marque 3 buts et en encaisse 5 par leurs adversaires. La deuxième paire est un peu meilleure, mais reste toujours sous les 50% : le xFG% de Gavrikov est de 47,7% et celui de Savard est de 46,2%. Del Zotto et Kukan ? 57,9% et 55% ! La seule paire dans le positif chez les Blue Jackets. John Tortorella a bien conscience de ce problème :
Del Zotto et Kuks (Kukan) ont probablement été notre paire la plus cohérente, ce qui est vraiment bon mais aussi inquiétant pour moi. Nos quatre premiers doivent mieux jouer.
Le Top 4 défensif de Columbus éprouve de grosses difficultés à la relance et peine à effectuer des passes transversales pour trouver les attaquants. Tortorella a déjà tenté de redéfinir son Top 4 en faisant jouer Werenski avec Savard comme il y a deux ans quand Seth Jones s’est blessé. Werenski et Jones sont des défenseurs à vocation offensive, les voir ensemble sur la même peut s’avérer contre productif même si les dernières séries ont prouvé le contraire. Il semble tout de même plus équilibré de voir des paires Jones/Gavrikov et Werenski/Savard où les rôles offensifs et défensifs semblent évident.
Les Blue Jackets sont à leur meilleur niveau quand leur Top 4 est capable de tenir la rondelle et relancer proprement. Il faut absolument que ces paires reviennent à leur niveau pour donner des chances à Columbus de tenir le rythme de la saison.
Carter Hart
Les images ci-dessus ont beaucoup fait parlé chez les partisans des Flyers et reflètent bien le début de saison de Philadelphie. Cette frustration du jeune gardien de 22 ans est arrivée après une défaite 6-1 des Flyers contre les Bruins de Boston. En regardant le classement, il n’y a rien d’alarmant : les Flyers sont 3ème de la Division Est avec 11 points en 8 matchs, dont 5 victoires. En regardant les rencontres, le constat est tout autre.
Carter Hart a été l’une des principales figures de la réussite des Flyers en Séries avec des performances de très haut-niveau. Cette saison, il affiche un bilan de 3-2-1 mais surtout un pourcentage d’arrêt de .896 avec 20 buts accordés. Bien loin de ses deux années précédentes où il avoisinné les .915. Surtout, avant la double confrontation contre les Devils, Carter Hart a accordé 4 buts ou plus au cours de ses trois derniers départs, une première dans sa jeune carrière. Mais voilà, derrière le début de saison difficile de Hart, c’est bien la défense et même l’attitude générale des Flyers qui inquiètent sur les 8 premiers matchs disputés.
Les Flyers ont concédé 25 buts cette saison, soit le 21ème rang de la Ligue. Surtout, Hart a du faire face à 192 tirs cette saison, soit le 5ème plus haut chiffre ex-aequo de NHL. Si l’implication des défenseurs et l’absence très préjudiciable de Couturier handicapent les performances de Hart, il faut admettre que le rôle des grands gardiens est bien de sauver son équipe même dans les instants les plus difficiles. Pour le moment, cette saison, Carter Hart n’y arrive pas. Revenu aux affaires face aux Devils, Hart a réalisé une très belle performance contre les Devils en effectuant 33 arrêts sur 34 tirs concédés. Deux victoires consécutives pour Phila après une série de deux matchs à oublier contre les Bruins. Simple effet face à des adversaires moins redoutables ? Peut-être. Nous aurons des éléments de réponse dans quelques jours, le 3 et 5 février avec une nouvelle double confrontation contre les Bruins.
Evidemment, l’échantillon d’analyse est très faible, peut-être trop. Considérer cette article comme une liste de joueurs ou de secteurs à surveiller dans les semaines à venir. Les attaques new-yorkaises sont décevantes, mais il y a des motifs d’espoir, notamment chez les jeunes Rangers. Malkin hors de forme ? Oui, mais probablement pas pour longtemps. La défense de Columbus contre-productive ? Un réajustement des duos pourrait changer la donne. Hart en péril ? Il faudra qu’il réponde présent face aux Bruins. Pour lire les bonnes surprises de ce début de saison, rendez-vous demain !