Morgan Sanson était l’un des hommes forts d’André Villas-Boas à l’Olympique de Marseille. Mais si l’arrivée de Milik entretient l’idée de jouer avec deux attaquants, il ne reste que quelques jours à Pablo Longoria pour compenser ce départ. Grâce aux données Statsbomb et un outil d’analyse de données, on a effectué une série de repérages des milieux européens pour sélectionner les meilleures options. Focus sur ce dossier.
L’incertitude sur André Villas-Boas et son style de jeu peu défini ont un impact dans cette recherche, mais la presse indique que Pablo Longoria aurait déjà pointé un profil « peut-être plus offensif » que Morgan Sanson. Il paraît évident qu’avec le profil des milieux marseillais, Sanson était la solution la plus hybride pour son entraîneur. Utilisé dans un double pivot avec Rudi Garcia, Villas-Boas l’a plus régulièrement utilisé à gauche d’un milieu à trois, voire plus haut selon l’animation et l’adversaire, mais aussi en soutien de Dario Benedetto. Son profil crée avec l’outil démontre cette polyvalence, et il est plutôt surprenant : il est dans le 75e centile ou plus dans quatre attributs, avec une création de tirs seulement inférieure à 35% de l’échantillon.

La création d’un profil de données ne fait que prouver que peu de milieux sont capables de proposer un profil aussi complet. Cela nécessite un bon mélange de capacités défensives (conscience défensive, volume, anticipation) et d’implication sur les mouvements offensifs de l’équipe (quantité et qualité des tirs crées). Sous les consignes de Villas-Boas, Morgan Sanson répétait en moyenne 39.2 actions défensives pour une création de 3.8 tirs par match.
Recruter un milieu complet est crucial pour Marseille. Néanmoins, on peut comprendre le choix de pondérer les attributs du côté créatif du jeu tant la production de tirs crées par Sanson a diminué de 37% cette saison.

Même constat pour Valentin Rongier, dont la production de tirs crées a diminué de 46%. Ces chiffres mettent en évidence la difficulté des milieux marseillais à contribuer aux tirs de leur équipe, mais on peut trouver une corrélation avec le fait que Marseille tire 25% de moins que la saison passée. Alors que l’arrivée d’Arkadiusz Milik est une bonne nouvelle, avec les données actuelles, il est difficile d’imaginer que Rongier et Cuisance puissent l’alimenter de bons ballons. Effectivement, leurs faibles rangs centiles sur l’attribut « Expected » signifient qu’ils ne créent pas des tirs dans les meilleures positions de marquer, et cela renforce la nécessite de ce recrutement.
Cette étude consiste à réduire un échantillon de plus de 500 milieux en une liste de joueurs restreinte et viable au profil recherché. Pour cela, l’outil nécessite quelques ajustements de données. Explications.
Quelques ajustements..
Effectivement, les premiers résultats faisaient apparaître des milieux comme Yangel Herrera (Granada) et Habib Maiga (Metz) au-delà du 90e centile, ce qui signifiait que de nouveaux ajustements devaient être apportés car ce n’est pas le profil de milieu recherché, ils sont trop axés sur leur conscience défensive.
Le choix de trois attributs défensifs et offensifs a permis de présenter des milieux les plus complets au-delà du 90e centile. Il était aussi nécessaire de hiérarchiser les attributs en essayant de pondérer l’aspect créatif et offensif du profil, donnant principalement plus de poids sur la quantité et la qualité des tirs créés du joueur. Cela augmente les chances de repérer des milieux complets, à la fois consciencieux défensivement, capables de presser haut mais aussi de créer des chances de marquer. Ces ajustements ont notamment permis de faire apparaître Mason Mount et Giovani Lo Celso au-delà du 95e centile, ce qui est encourageant pour découvrir les options viables lorsque l’on filtre la liste par valeur marchande.

Leonardo Bittencourt | Werder Brême
Ce premier choix démontre que l’âge n’a pas été un filtre important, mais il est probablement le premier joueur que l’on cocherait sur cette liste. Puisque l’arrivée de Milik donne de nouvelles possibilités tactiques à Villas-Boas, la perspective d’attirer un joueur polyvalent devient pertinente. Aussi à l’aise dans une position axiale qu’excentrée, à l’aise des deux pieds, on estime qu’il puisse couvrir plusieurs postes et c’est une chose importante pour Marseille.

Son profil crée est incroyable. Il a probablement la palette la plus forte et complète de la liste, car aucun de ses attributs ne se situent en dessous du 80e centile. Comme toutes les options, il joue pour une équipe dont la possession (43.2%) est largement inférieure à 50%, ce qui lui donne plus de temps à défendre qu’un joueur de Stuttgart (51.5% de possession) par exemple. Mais pour cette recherche, le « possession-adjusted » n’a pas été utilisé dans les ajustements de l’outil. L’objectif n’étant pas d’évaluer l’estimation du volume défensif selon le style de son équipe, mais le volume réel indépendamment de son temps de jeu sans ballon.
Des tests ont été effectués sur des joueurs comme Farid Boulaya, Angelo Fulgini et Amine Harit, évoqués à Marseille notamment. Ils ont prouvé que certains profils n’avaient aucune conscience défensive, et ce n’est pas le but de cette recherche. Les attributs défensifs signifient que Leonardo Bittencourt est consciencieux défensivement, n’hésitant pas à harceler et presser (74% de son activité défensive) ses adversaires. Néanmoins, cette conscience ne brouille pas sa capacité à créer des situations de tirs, ni la qualité, et il correspond particulièrement au profil recherché puisqu’en deux fois moins de minutes jouées, il a déjà marqué autant de buts qu’en 2019/2020 (4 buts).
Jean-Paul Boëtius | Mayence
Pour une équipe qui marque 15% de buts de moins qu’une équipe moyenne, Mayence s’est tout de même permis de céder Jean-Philippe Mateta (7 buts), son meilleur buteur. S’il était difficile d’imaginer Mayence céder un autre joueur offensif, les dernières informations de Bild ont évoqué un intérêt du Stade Rennais. Dommage, on aurait pu dire que Flo Maurice nous avait lu.
Mayence est très en difficulté en Bundesliga, et si le club venait à être relégué, Jean-Paul Boëtius serait une excellente option cet été pour l’Olympique de Marseille. Mais sa présence au 96e centile du profil est la preuve que les données ont correctement été ajustées pour le profil recherché, et qu’il mérite une attention particulière dès cet hiver.

Si sa position naturelle est plutôt offensive, axiale ou sur les ailes, son profil est suffisamment complet pour couvrir de nombreuses zones du terrain. Mayence a beaucoup joué dans un 3-5-2 avec trois milieux axiaux, dans lequel Jean-Paul évoluait comme Nicolò Barella à l’Inter de Conte. Il a également joué un cran plus haut, axe ou excentrée, dans un système type 4-2-3-1 notamment. Son profil met en évidence cette polyvalence, se manifestant par une présence au 73e centile et plus dans les six attributs.
D’autres données indiquent qu’il serait davantage un milieu passeur que buteur, puisque 77% de son modèle attendu par match est en xG assisted. Une statistique plus basique confirme cela : il n’a toujours pas marqué cette saison, mais ne traine qu’une séquence de 1xG. Pas forcément de l’inefficacité mais un instinct de passeur. À son crédit, Mayence est une équipe très pauvre offensivement et on peut imaginer ses attributs offensifs progresser avec une équipe plus dominatrice d’un championnat plus faible.
Adrien Thomasson | Strasbourg
Il était difficile d’imaginer que l’outil puisse repérer un joueur ayant joué pour Evian-Thonon, et ses références à 27 ans ne font probablement pas rêver. Dans cette étude, ses statistiques correspondent tout de même à plus de 3000 minutes jouées en Ligue 1 depuis 2019, et via un ajustement des données de chaque championnat (selon le système de ranking « Elo »), les statistiques ont été ajustées à la baisse car la France est considéré comme le plus faible du top 5.
Néanmoins, le voir au 95e centile du profil fait de lui une option très sérieuse pour remplacer Morgan Sanson, probablement plus accessible que Leonardo Bittencourt et Jean-Paul Boëtius. Alors que les données du championnat sont ajustées, il est intéressant de comparer Morgan Sanson avec un joueur du même championnat.

Malgré l’arrivée d’Habib Diallo (7 buts), sa valeur de buts attendus par match n’a pas changé (0.27xG) entre les deux saisons. Cette donnée indique que Thomasson est toujours impliqué de manière positive dans les mouvements offensifs de Strasbourg, et la quantité de tirs qu’il crée reste supérieure à 81% de l’échantillon. Cependant, on constate une perte d’efficacité entre les deux saisons. Alors qu’il marquait tous les 6.3 tirs (0.35 buts par match) en 2019/2020, c’est deux fois plus cette saison (13 tirs pour 0.14 buts par match). Moins décisif donc, mais la qualité moyenne de tirs a quant à elle augmenté de 0.03xG (12% à 15% de probabilité de marquer), et fait de lui le joueur qui créer les tirs de meilleure qualité de nos options. Effectivement, son rang élevé (88e centile) à l’attribut « Expected » signifie qu’il est capable de trouver les bonnes positions de tirs pour marquer, à la passe ou à la finition.
Son profil est peut-être un peu décevant sur son activité défensive, surtout quelle a diminué de 19% entre les deux saisons de références. Néanmoins, on peut trouver une corrélation avec une diminution de l’activité défensive de son équipe qui représente 13%. À l’inverse, la perspective de recruter un milieu efficace est intéressante, compte tenu des méformes de Florian Thauvin et Dimitri Payet et de l’inefficacité de Dario Benedetto, car Milik ne réglera pas seul les maux offensifs de l’OM.

La qualité des tirs crées par de Thomasson ne lui assure pas pourtant de l’efficacité puisqu’il est l’option qui sous-performe le plus son modèle attendu. À l’inverse, pourtant au 65e et 77e centile sur la quantité et qualité des tirs crées, Morgan Sanson est le plus efficace parmi la liste d’options, juste devant Ludovic Blas.
Ludovic Blas | Nantes
Dans cette étude, les statistiques de Ludovic Blas s’étendent sur deux saisons de Ligue 1, mais au fil de ses 146 matchs de Ligue 1 depuis qu’il a 17 ans, il a joué relayeur, dans un milieu à deux ou trois, meneur de jeu et même sur un côté, ce qui lui permet de proposer une solution très polyvalente pour son entraîneur. C’est une option intéressante lorsque vous recherchez un joueur pour une équipe dont le style de jeu n’est pas défini.

Son profil créé par l’outil brosse une image très complète du profil recherché : il crée des situations de tirs, dribble fréquemment lorsqu’il touche le ballon (toutes les 9 touches de balles) et peut autant défendre que la moyenne des milieux européens.
La qualité des tirs qu’il crée (63e centile) est la plus faible de la sélection de joueurs mais l’imaginer dans une équipe plus dominatrice peut lui offrir de meilleures positions de tirs. Ou du moins estimer qu’il pourrait trouver des attaquants mieux placés, comme Milik, car ses données prouvent qu’il crée plus de situations de tirs que 80% de l’échantillon. Cette perspective est plutôt intéressante quand on a vu précédemment qu’il sur-performait son modèle attendu. Effectivement, si ses statistiques ont nettement diminué entre les deux dernières saisons, comme l’intégralité des joueurs offensifs de son équipe, il n’a jamais été aussi décisif que cette saison, alors que son équipe marque 33% de buts de moins qu’une équipe moyenne : 0.33 buts par match, soit déjà 5 buts en 16 matchs.
Christoph Baumgartner et Aymen Barkok méritaient autant d’attention sur leur profil, mais plusieurs facteurs ont rendu ces options moins réalisables que celles cités. D’une part, la valeur marchande de Baumgartner (18 millions d’euros) est probablement trop élevée pour Marseille, et l’on ne voit pas Hoffenheim négocier son départ à la baisse. D’autre part, si le temps de jeu d’Aymen Barkok est peu significatif (639 minutes), il est peu probable de le voir quitter Francfort qu’il a rejoint cet été. Avec 121.9 comme score de similarité avec Morgan Sanson, il mérite que l’on continue de surveiller ses performances.
Ces quatre options représentent les profils les plus similaires à Morgan Sanson. Si son départ est jugé positif pour de nombreux supporters, cette étude prouve que les options citées pourraient compenser la faible contribution des milieux marseillais aux mouvements offensifs. Si Pablo Longoria hésite, il peut nous consulter.