Le mercredi 13 janvier dernier, Palmeiras s’est fait peur face à River Plate. Vainqueurs 3-0 au match aller, les Brésiliens ont bien cru voir cette finale leur passer entre les doigts. “Épique et polémique” titrait Lucarne Opposée après cette rencontre. River Plate s’est vu refuser un but qui aurait du être valable, deux possibles penalties non-sifflés. Pour couronner le tout, Rojas a dû laisser ses coéquipiers à 10 après un carton rouge sévère. Mais la défaite 2 buts à 0 suffit au bonheur du Verdão. Il retrouvera Santos. Quelques heures plus tard, le Peixe a humilié Boca Juniors, 3-0, après le match nul et vierge de l’aller. Une rencontre 100 % brésilienne en finale de la plus belle des compétitions sud-américaine, la Copa Libertadores. Une première depuis 2006.
Le Brésil a donc rendez-vous ce soir, samedi 30 janvier, à 21 heures, au mythique Maracanã de Rio de Janeiro. À quelque 400 kilomètres, à Sao Paulo, “il y a beaucoup d’excitation pour cette finale” confirme Marcelin Chamoin, rédacteur Brésil pour Lucarne Opposée, même si elle se jouera à huis-clos. L’attente a été longue pour les deux clubs : 21 ans pour Palmeiras, 10 ans pour Santos. Échec interdit.
Santos en outsider de cette Copa Libertadores
Pourtant, rien ne laissait présager un tel parcours de Santos. Plongé dans la crise, le club avait vu, cet été, trois de ses joueurs demander la résiliation de leur contrat pour défaut de paiement. “Santos a de gros problèmes financiers, le club n’a pas pu recruter en 2020 et a, du coup, un effectif limité” poursuit Marcelin Chamoin. Leur 10e place en championnat cette saison n’est donc pas une surprise. “La vraie surprise, c’est cette finale de Libertadores et les larges victoires contre Grêmio (4-1) et Boca (3-0)” continue-t-il. Mais l’équipe a brillé dans en Copa Libertadores et cette position d’outsider pourrait, selon lui, retirer un peu de pression avant la finale.
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Devant, Marinho réalise une saison pleine : 20 buts et 7 assists en 33 matchs, toutes compétitions confondues. Avec ses 4,17 tirs par match, il pèse beaucoup sur les défenses adverses par son activité. À ses côtés, Kaio Jorge et Soteldo forment “un trio très intéressant, analyse Marcelin Chamoin. Les trois joueurs se complètent bien”. Le premier, “une pépite”, a déjà scoré à cinq reprises dans cette compétition. Son jeu rugueux lui permet de s’imposer malgré son jeune âge (19 ans). Le second est “un super joueur qui peut faire la différence individuellement, comme il l’a fait contre Boca Junior”. Mais c’est le manque de régularité qui empêche Santos de rêver plus grand. “Contre Palmeiras, même si Marinho est un joueur qui peut se créer beaucoup d’occasions, il faudra être efficace car en face, ils ne devraient pas céder beaucoup de situations dangereuses” explique Marcelin Chamoin.

En défense aussi, la situation pourrait être meilleure. Même si Santos réalise un Brasileirão très correct au vu de la situation du club, “la défense est perfectible car l’équipe, encore jeune, manque de maturité” poursuit-il. En témoigne les 44 buts encaissés en championnat. Une déconcentration qui leur a parfois coûté des points. À 8 reprises cette saison (sur 19 rencontres), Santos n’a pas réussit à conserver son avantage après avoir ouvert le score. Pire encore, contre Bragantino, deux fois, puis contre Quito en Libertadores, ils se font rejoindre dans le temps additionnel, laissant des points sur le bord de la route ou perdant un avantage précieux. Les joueurs du Peixe connaissaient leurs faiblesses.
Palmeiras plus solide tactiquement
L’arrivée sur le banc d’Abel Ferreira a fait beaucoup de bien à Palmeiras. Il a assuré en conférence de presse d’avant match que les deux équipes seront “sur le même pied d’égalité”. Marcelin Chamoin n’est pas de cet avis : “L’équipe me semble plus solide tactiquement. Il ont des joueurs très intéressants et mis à part cette demi-finale retour, ils savent très bien gérer les matchs. Devant, le duo Luiz Adriano – Rony a brillé cette saison en Libertadores”. En effet, cette saison, le premier tourne à 0,99 but par match, le second 0,95 passe décisive toutes les 90 minutes. Solide en contre-attaque, les Abel Ferreira avait décidé de laisser la possession du ballon à River Plate (66 %) et pourrait être tenté de faire de même ce soir, “face à une équipe qui, [elle aussi] aime jouer en contre-attaque. Cela lui permettra de faire évoluer son plan de jeu en fonction” poursuit-il.
Le coach a drastiquement modifié le visage de Palmeiras. “Sur le début d’année, avec Vanderlei Luxemburgo, et malgré le titre dans le championnat paulista et la phase de groupe de Copa Libertadores à 16 points, l’équipe était assez peu inspirée et le jeu était décevant, poursuit le rédacteur de Lucarne Opposée. L’arrivée de Ferreira a permis de développer un fond de jeu intéressant”. Il a également lancé plusieurs jeunes, ce qui n’est pourtant pas dans l’ADN du club. Contre River, les trois milieux de terrains avaient 20 ans de moyenne d’âge. Cela leur permet d’avoir une profondeur de banc conséquente et de pouvoir jouer sur l’ensemble des tableaux : championnat paulista remporté en début d’année, une finale de Coupe du Brésil, cette finale de Libertadores et une belle cinquième place au Brasileirão.

Une rivalité grandissante
Si leur histoire commune remonte aux années 1920, la rivalité entre les deux clubs voisins débute réellement dans les années 50, après une victoire 7-6 de Santos. Rivalité renforcée en Campeonato Paulista, l’année suivante, en 1959, lorsque Palmeiras décroche le titre de champion après trois matchs de playoffs face au rival. À cette époque, seul ce championnat ne compte. Un titre qui n’échappera plus aux deux équipes jusqu’en 1969.
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Les années se suivent et les rencontres s’accumulent entre les deux équipes. Toujours très suivi au pays. “En 2015, Santos et Palmeiras se sont affrontés en finale du championnat paulista, puis en finale de la Coupe du Brésil, les deux matchs du Brasileirão de cette année-là ont également été marqués par des polémiques et des provocations. Mais le match le plus important entre les deux clubs, c’est bien cette finale de Libertadores” conclu Marcelin Chamoin.

L’apogée de cette saison
Quoi qu’il se passe ce soir, il y a quelques joueurs qu’il faudra garder à l’œil. Parmi eux, le jeune Gabriel Menino. Très polyvalent, il peut évoluer arrière droit, milieu défensif ou milieu droit. Marcelin Chamoin est dithyrambique à son sujet : “Il fait preuve d’une grande maturité et est très important tactiquement”. À ses côtés, un autre joueur formé au club. Il ose la comparaison avec Paul Pogba : “C’est sa première saison mais il affiche déjà une grande maturité dans le jeu, est très bon défensivement et peut porter le ballon vers l’avant, notamment grâce à ses crochets très efficaces”. Il poursuit dans l’effectif de Palmeiras et porte l’attention sur Gabriel Veron qui doit confirmer mais qui pourrait peser sur cette finale de Copa Libertadores s’il rentre en cours de partie.

De l’autre côté, il cite pêle-mêle : “Kaio Jorge a marqué cinq buts au cours de la Coupe du monde U17 en 2019 et sera titulaire à la pointe de l’attaque. Il devrait rejoindre l’Europe prochainement. Soteldo est un joueur très agréable à voir jouer. Et Marinho peut-être le meilleur joueur du Brésil à l’heure actuelle”. Vous êtes prévenus et vous savez où porter votre attention ce soir.
Au jeu des pronostics, Marcelin Chamoin se risque à une victoire 1-0 de Palmeiras pour cette finale de Copa Libertadores, sans trop prendre de risques : “Même si Santos a vraiment les moyens d’aller chercher ce titre”. Reste à savoir la manière dont les deux équipes vont aborder cette rencontre. Palmeiras cherchera-t-il à contenir Santos pour ne leur laisser que très peu d’espaces ou adoptera-t-il une posture plus offensive ? Seul Abel Ferreira a la réponse pour le moment. “En cas de match fermé, il faudra être très efficace et la différence pourrait se faire sur un exploit individuel, termine-t-il. Sur une finale, l’équipe la plus réaliste a de bonnes chances de l’emporter”. Réponse dès ce soir, à 21 heures.
(Image de couverture : MARCA)