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Southampton : un club à part

Le club de Southampton n’est à première vue qu’une banale équipe de milieu de tableau de Premier League. 12e après 29 journées de championnat, 11e l’an dernier et 16e en 2019, rien d’exceptionnel. Pourtant, les Saints fascinent plus d’un observateur par leur philosophie et la manière dont l’entière organisation est pensée. Aux antipodes des cadors anglais, le club du Hampshire poursuit sa voie, bien déterminé à réussir à sa façon.

Comme une famille

A Southampton, contrairement à la plupart des autres clubs, la star n’est pas un joueur mais bien le coach. Mauricio Pochettino, Ronald Koeman, Claude Puel sont des références du coaching et sont tous passés par Southampton dans la décennie 2010. Aujourd’hui avec Ralph Hasenhüttl les Saints semblent avoir trouvé leur nouveau gourou. Arrivé en décembre 2018 et prolongé en juin dernier jusqu’en 2024, l’Autrichien a la confiance du président Jisheng Gao et de son directeur sportif Matt Crocker. Vice – Champion d’Allemagne en 2017 avec le RB Leipzig, Hasenhüttl est un excellent meneur d’homme qui sait tirer le meilleur de ses joueurs. Celui que l’on surnomme le “Klopp autrichien” est à 100% investit avec ses joueurs comme en témoigne ses larmes après la victoire contre Liverpool le 4 janvier dernier.

Ralph Hasenhüttl, adepte de la « calinothérapie »

L’attachement au club ou “l’amour du maillot” est très important chez les Saints qui s’efforcent de la cultiver. Si on compare le club a une famille, le coach en est le père et les joueurs ses enfants. Dans cette optique, Danny Ings serait le grand frère, celui qui montre l’exemple. Le buteur de 28 ans est passé par le club du Hampshire étant jeune, pourtant c’est à Bournemouth qu’il commence sa carrière avant de connaître deux autres clubs de Premier League (Burnley puis Liverpool). Prêté à Southampton en 2018 puis transféré en 2019, c’est bien pour son attachement au club qu’il est revenu. Leader par l’exemple et jamais avare d’efforts, l’international anglais n’est pas moins que le 4e meilleur buteur de Premier League depuis août 2019 et même 1e si on ne compte pas les penaltys.

Le reste de la « fratrie » est en grande partie composé de joueurs anglais. En effet, avec onze joueurs étrangers Southampton est la 3e équipe du championnat anglais à en avoir le moins dans son effectif. En comparaison, les quatre équipes qui en ont le plus en comptent au moins 20. En cela les Saints se démarquent des clichés du club anglais qui construit son équipe en achetant des joueurs des autres ligues. Cette démarcation est encore plus impressionnante quand on sait que neuf joueurs du groupe professionnel sont issus du centre de formation du club. C’est le total le plus élevé du championnat et cela représente même 37,5% de l’effectif. Depuis 2006 l’académie des Saints a formé ou fait éclore pas moins de neuf internationaux (dont 5 anglais) dont certains parmi les meilleurs joueurs du monde comme Sadio Mané, Virgil Van Dijk ou Gareth Bale (même s’il est aujourd’hui plus golfeur que footballeur). Cela s’explique par la décision du directeur sportif Matt Crocker de limiter les prêts de ses joueurs.

The Southampton Playbook

Matt Crocker est un habitué de la maison. Directeur de l’Académie de Southampton de 2006 à 2013, l’anglais est revenu début 2020 en tant que directeur sportif des Saints. Son retour marque le début d’une organisation à part. Dès son arrivé il met en place le Southampton Playbook qui définit des principes très clairs. De l’académie de jeunes à l’équipe première tout le monde va jouer, parler et manger le même football. Il se base sur une formation en 4-4-2 en phase défensive qui passe en 4-2-2-2 en phase offensive, un système idéal pour avoir un bon socle défensif et faciliter les transitions. Il découpe le terrain en 6 postes et non 11 : le gardien, les défenseurs centraux, les défenseurs latéraux, les milieux centraux, les milieux latéraux et les buteurs.

Chaque poste va de pair (sauf le gardien, logique) et à un rôle bien défini qui est le même pour toutes les équipes du club. Toujours afin de faciliter la transition vers l’équipe professionnelle, l’équipe des U23 est devenue une sorte d’équipe B régulièrement supervisée par Ralph Hasenhüttl. Le centre d’entraînement ainsi que le centre de formation ont ainsi été modernisés afin de répondre aux besoins du Southampton Playbook. Cette philosophie se focalise sur le moyen / long terme en construisant intelligemment une équipe avec peu de moyens (Southampton a la 14e valeur marchande de Premier League). Et le moins que l’on puisse dire c’est que les résultats sont là. Cette saison les trois joueurs les plus utilisés par Ralph Hasenhüttl sont issus du centre de formation des Saints. Le capitaine James Ward-Prowse en fait partie. Le milieu de terrain anglais de 26 ans est même le 8e joueur du championnat qui réussit le plus de passes.

Matt Crocker & James Ward-Prowse

Une philosophie limitée

Malheureusement les contes de fées n’existent pas et la situation de Southampton n’est pas parfaite. En effet, on peut constater une absence de progression au niveau des résultats qui se traduit par une incapacité à s’installer dans le top 10 du classement. En plus de cela, l’effectif de Ralph Hasenhüttl est très limité. Seulement 24 joueurs professionnels et tous ne sont pas au niveau des exigences du club. Même si le collectif fait la force de cette formation, peu de joueurs sont utilisés car peu ont le niveau. Ainsi seuls 10 joueurs ont joué plus de quinze matchs (sur un total de 22) et cela se fait sentir quand des blessures ou des méformes obligent le coach à effectuer  du turnover. Le 9-0 subie contre Manchester United (!!!) en début de semaine peut en témoigner, tout comme la série de quatre défaites consécutives en championnat actuellement en cours. Cependant, doit-on simplement se focaliser sur les résultats moyens d’aujourd’hui ou bien tempérer car le projet de ce club se situe sur le moyen / long terme ?

Southampton est un club à part en Premier League. Pas pour ses résultats mais pour sa philosophie. Continuité dans la formation jusqu’à l’équipe première, attachement au club et vision à long terme, les Saints ne se construisent pas grâce à leur budget mais grâce à l’intelligence de leur projet. Il est peut-être trop tôt pour faire un bilan de ce projet aussi intrigant que loin des paillettes du championnat anglais. Cependant il ne faudrait pas que les résultats se fassent trop attendre au risque que Ralph Hasenhüttl ou Matt Crocker et son Playbook ne soient plus vus d’un si bon œil.

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