Le tournoi des VI nations fait une pause ce week-end, laissant les organismes se reposer avant de repartir dès la semaine prochaine. Pour l’instant la France occupe la première place avec deux victoires et recevra son premier match du tournoi au Stade de France le week-end prochain. Pour l’occasion, l’Écosse se déplacera avec la volonté de réaliser un gros coup après celui réalisé à Twickenham. En attendant cette affiche, la rédaction vous propose de replonger dans le match Écosse – France lors du tournoi des VI nations 2012. Une rencontre symbolique pour ces deux nations qui entameront une longue traversée du désert par la suite. ( Crédit Photo REUTERS/David Moir )
Entre continuité et nouveau projet
Lors de ce match, les deux nations ne sont clairement pas sur la même dynamique. D’un côté, la France sort d’une coupe du monde réussie même si la défaite d’un point en finale contre la Nouvelle-Zélande ( 7/8 ) laisse encore un gout amer à cette équipe. De nombreux changements ont été effectués avec l’arrivée de Philippe Saint-André comme sélectionneur en remplacement de Marc Lièvremont. Au niveau de l’effectif peu de nouveaux joueurs font leur apparition dans la liste du nouveau sélectionneur à l’exception de Wesley Fofana et Yoann Maestri. Pour le reste, on retrouve la plupart des joueurs ayant disputé la dernière finale arbitrée par Craig Joubert.
Pour l’équipe écossaise, la dynamique n’est clairement pas la même. Le XV du Chardon n’est pas parvenue à sortir de la poule B, devancé par l’Angleterre et l’Argentine. Pour la première fois de son histoire, l’Écosse ne parvient pas à se qualifier pour les 1/4 de finale. Une grosse déception mettant fin au cycle de l’ancienne génération.
Pour ce tournoi, Andy Robinson doit faire sans ses deux cadres que sont Chris Paterson et Nathan Hines qui ont pris leur retraite internationale. Un vrai coup dur pour cette équipe qui voit partir l’ancien recordman de sélections avec le XV du Chardon ( depuis dépassé par Ross Ford ) et toujours meilleurs réalisateurs de cette équipe. Véritable légende, son départ fait beaucoup de mal à cette équipe. Le sélectionneur anglais doit donc lancer de nouveaux joueurs pour commencer ce cycle. Ainsi six joueurs font leur apparition dans la liste écossaise. Parmi les petits nouveaux, on retrouve des joueurs que l’on connaît bien comme Stuart Hogg, Duncan Weir, Lee Jones ou encore Rob Harley. Des joueurs prometteurs qui tenteront de relancer cette équipe. Pour le reste, on retrouve toujours les joueurs expérimentés comme Mike Blair, Dan Parks ou encore les frères Lamont. On retrouve aussi des jeunes déjà bien installés dans cette équipe comme Greig Laidlaw et Richie Gray. Un effectif intéressant sur le papier mais ce tournoi va être une véritable déception pour le XV du Chardon.
Des équipes à la dynamique différente dans ce début de tournoi
Avant de s’affronter lors de la troisième journée du tournoi, les deux nations ont eu des parcours relativement différents. D’un côté l’Écosse s’est inclinée lors du match d’ouverture contre l’Angleterre à Murray Field sur le score serré de 6 à 13. Des regrets pour les Écossais tant les Anglais ont eu du mal pour cette entrée dans le tournoi. À la suite de cette rencontre, Dan Parks a décidé de prendre sa retraite internationale immédiatement. Une décision prise après une erreur de sa part sur un coup de pied de dégagement contré par Charlie Hodgson permettant à ce dernier de marquer le seul essai de la rencontre à la 41ème minute. Une retraite difficile à encaisser pour l’Écosse mais le joueur ne se sentait plus capable de jouer avec le XV du chardon: « J’y pensais mais le premier match des VI nations était contre l’Angleterre et pouvoir jouer était énorme pour moi. Après réflexion, après avoir discuté avec ma famille, je suis arrivé à la décision que le moment était venu de prendre ma retraite. » ( Dan Parks ). Un véritable choc pour cette équipe qui perd en l’espace de quelques mois 3 joueurs majeurs du rugby écossais dans les années 2000: « La réaction de tous les gars quand Parksy a annoncé sa retraite a été un silence étourdissant et de l’émotion. Dan est un membre extrêmement populaire et respecté de l’équipe et sa contribution à certaines des victoires les plus célèbres d’Écosse ne peut être sous-estimée. » ( Mike Blair ).
Lors du second match, les Écossais se déplacent à Cardiff pour y affronter les futurs vainqueurs du tournoi, le Pays de Galles. Pendant une mi-temps, le XV du chardon résiste et parvient à rester à hauteur du XV du poireau ( 3/3 à la mi-temps ). Mais la deuxième période va être un véritable cauchemar pour cette équipe qui ne va pas parvenir à stopper les accélérations galloises. Alex Cuthbert puis Leigh Halfpenny par deux fois permettront au XV du poireau de l’emporter. Quelques points positifs sont à retenir côté écossais avec la belle performance de Laidlaw qui remplaçait Dan Parks, récent retraité. Le joueur d’Édimbourg inscrit les 13 points de son équipe.
Un mauvais début de tournoi qui contraste avec celui des Français plutôt réussi. Pour son premier match, le XV de France s’est retrouvé à jouer l’Italie. Une rencontre maitrisée par les Français avec 4 essais dont le premier de Wesley Fofana pour sa première sélection. Après une première victoire convaincante, la France devait accueillir une nouvelle fois au Stade France mais cette fois-ci le XV du trèfle. Malheureusement les conditions n’ont pas permis le maintien du match. En effet, le terrain du Stade de France était gelée rendant impossible la rencontre. Quelques jours plus tard, il a été décidé que la rencontre se jouera le 4 mars.
Le XV de France se déplace donc en Écosse avec une seule victoire mais espère bien en ajouter une deuxième face à un XV du chardon en plein doute.
Une confrontation sous le signe de la nouveauté
Pour cette troisième journée du tournoi, les Écossais et les Français ont décidé de faire démarrer de jeunes joueurs. Dans le XV du chardon, le jeune arrière Stuart Hogg fait sa première en tant que titulaire. Après avoir connu sa première sélection contre le Pays de Galles, l’international écossais débute dans le XV de départ. Un autre joueur va connaitre sa première sélection durant ce match. En effet Duncan Weir n’a pas eu la même chance que son coéquipier Hogg lors de la précédente journée, étant le seul remplaçant à ne pas être rentré contre le Pays de Galles. Pour ce match, il rentrera à la 48ème minute à la place de Greig Laidlaw. Dans le XV français, deux joueurs vont connaitre leur première titularisation. Ainsi Yoann Maestri et Wesley Fofana font partie du XV de départ après avoir joués leur premier match contre l’Italie lors de la première journée du tournoi.
Comme à leur habitude, les Écossais commencent plutôt bien le match avec le premier essai de Stuart Hogg avec le XV du chardon dès la septième minute après un très bon renversement de jeu de Laidlaw. Les Écossais sont poussés par Murrayfield et ses 67 130 spectateurs. Ils continuent à mettre sous pression la France et récupèrent une pénalité à la 25ème minute, leur permettant de mener 10 à 0. Mais les Français se reprennent et après une très bonne passe sur un pas de Vincent Clerc, Fofana traverse la défense écossaise pour inscrire son deuxième essai international en deux matchs. Les Français semblent enfin rentrés dans leur match et égalisent sur une pénalité de Morgan Parra à la 38ème minute. Après un bon début de match, les Écossais et les Français sont dos à dos à la mi-temps.
La deuxième période voit la France passer pour la première fois devant avec une nouvelle pénalité de Morgan Parra. On pourrait penser que la France va tranquillement dérouler face à une équipe d’Écosse qui peine à être constante sur 80 minutes. Mais c’est tout le contraire qui va se passer. Sur une récupération dans un ruck, John Barclay permet au XV du chardon de mener une contre-attaque parfaitement conclue par Lee Jones qui inscrit son premier essai avec l’Écosse pour sa troisième titularisation. Le XV du chardon repasse devant la France à 25 minutes de la fin du match. Néanmoins, le XV de France reprend l’avantage après un très bon travail de Julien Malzieu pour battre Lee Jones en 1 contre 1. Il parvient à se retrouver seul face à Hogg et décale parfaitement Maxime Medard qui l’avait suivi. L’arrière du Stade Toulousain n’a plus qu’à conclure pour inscrire le deuxième essai français de la journée. La France n’a pas laissé les Écossais espérer et reprend l’avantage seulement deux minutes après leur essai. Un avantage que le XV de France va conserver jusqu’à la fin, Lionel Beauxis enterrant les derniers espoirs du XV du Chardon avec un drop à la 68ème minute. Une victoire finale 23 à 17 à Édimbourg permettant à la France de rester invaincue dans ce tournoi après deux matchs.
Durant ce match, les arrières auront été à la fête. Pour sa première titularisation, Stuart Hogg n’a pas eu froid aux yeux avec un essai inscrit, 125 mètres parcourus avec le ballon en main et 4 défenseurs battus. Seul petit point noir à son tableau, 7 turnovers, soit 1/3 de ceux de son équipe lors de ce match. Cette rencontre symbolise parfaitement le début de carrière de Stuart Hogg capable de faire la différence mais qui relance parfois trop souvent le ballon sans temporiser. Duncan Weir aura lui aussi montré de bonnes choses. Après avoir remplacé Laidlaw à la 48ème minute pour une blessure à la tête, le demi d’ouverture écossais a essayé de se mettre en avant. Il termine le match avec une transformation réussie, 5 courses et 9 mètres parcourus. Une bonne mi-temps sur le plan personnel, l’Écosse ayant été dominée par les Français sur cette période. Avec le premier essai de Lee Jones, la jeune garde écossaise s’est mis en valeur pour ce match, laissant présager un futur plus éclaircie dans le ciel d’Édimbourg.
Pour le XV de France, Wesley Fofana s’est une nouvelle fois mis en avant avec un essai et 6 défenseurs battus. Très précieux offensivement, il aura été impérial défensivement avec 14 paquetages réalisés et 1 seul manqué. Des débuts impressionnants pour le jeune centre clermontois qui montre tout son talent sur la scène internationale. Maestri aura lui aussi été très bon pour sa première titularisation. Le deuxième ligne du Stade Toulousain a réalisé 15 plaquages et aucun manqué. Il termine le match avec le deuxième plus gros nombre de plaquages derrière Thierry Dusautoir et ses 25 plaquages réussis. Une présence importante défensivement qui aura aidé le XV de France à se maintenir dans ce match. Mais l’homme de ce match est inévitablement Maxime Medard. L’arrière du Stade Toulousain a su se rendre disponible comme à son habitude. Il n’a pas été récompensé en première mi-temps après une très belle course depuis ses 5 mètres jusqu’au camp écossais. Néanmoins, il inscrira son essai après avoir parfaitement suivi Julien Malzieu. Il termine le match avec 116 mètres parcourus et 5 défenseurs battus. Sa belle performance sera gâchée par sa sortie à la 61ème minute en raison d’une blessure au genou qui l’écartera des terrains pour 9 mois. Un gros coup dur pour la France et la suite de son tournoi.
Le début d’une longue période de disette
Pour la suite du tournoi, les deux équipes vont être en difficultés. La France va faire match nul contre l’Irlande 17 à 17 au Stade de France. Puis deux défaites, la première contre l’Angleterre à Paris ( 22 / 24 ) et la seconde au Pays de Galles 16 à 9. Le XV de France termine finalement 4ème du tournoi à raison d’une moins bonne différence de points que l’Irlande. Ce résultat constitue le plus mauvais résultat du XV de France depuis le tournoi de 2001 où l’équipe menée par Bernard Laporte avait terminé cinquième. Un tournoi difficile pour la sélection vice-championne du monde. Philippe Saint-André peut être satisfait des nouveaux arrivants Maestri et Fofana qui termina deuxième meilleur marqueur du tournoi avec 4 essais. Mais l’ancienne génération est sur la fin comme William Servat et Julien Bonnaire qui prennent leur retraite internationale lors du dernier match contre le Pays de Galles.
L’année suivante, Philippe Saint-André procédera à 18 changements dans la liste pour le tournoi. Il fait confiance à certains joueurs lancés lors des tests matchs de 2012 comme Maxime Machenaud, Yannick Forestier, Jocelino Suta, Romain Taofifénua ou encore Sébastien Vahaamahina. Jean-Marcellin Buttin, qui avait fait ses débuts lors du dernier match contre le Pays de Galles, a lui aussi été reconvoqué pour ce tournoi. Malheureusement la France ne réalisera pas un meilleur tournoi, finissant dernière du tournoi à égalité avec l’Irlande mais avec une moins bonne différence de points. Les tournois suivants ne vont guère être mieux pour ce XV de France avec comme meilleur résultat une troisième place lors du tournoi 2017. Les finalistes de la coupe du monde 2011 s’en vont les uns après les autres tandis que la jeune génération peine à convaincre. Finalement, il faudra attendre 2020 pour voir la France retrouver de sa splendeur avec une deuxième place lors du tournoi.
Pour l’Écosse, les défaites vont s’enchainer. La première à Dublin 32 à 14. La seconde est plus surprenante puisque le XV du Chardon s’est inclinée en Italie 13 à 6. Pour la première fois depuis 2007, l’Écosse termine dernière du tournoi. Il faut aussi remonter à 2004 pour voir le XV du Chardon terminer avec la cuillère en bois. Un tournoi à oublier pour cette équipe. Comme la France, le XV du chardon se trouve en grande difficulté avec une génération vieillissante mais quelques joueurs commencent à se montrer. Ce tournoi aura symbolisé la fin d’un cycle.
On peut commencer par Rory Lamont. L’arrière écossais s’est cassé la jambe lors du match contre la France et n’est jamais parvenu à revenir à son niveau et prendra sa retraite un an plus tard. Un autre cadre de cette équipe va laisser sa place. Il s’agit de Mike Blair qui prendra sa retraite internationale après les matchs d’automne en 2012. Un cadre important dans l’équipe écossaise du haut de ses 85 sélections. Un autre changement crucial va être fait après ce tournoi difficile. En effet, la fédération écossaise décidera à la fin des matchs d’automne de se séparer d’Andy Robinson. Malgré un contrat qui courait jusqu’en 2015, ses mauvais résultats et une dernière défaite contre les Tonga auront eu raison de lui. Il est remplacé par Scott Johnson par intérim. Le sélectionneur australien lancera de nouveaux joueurs pour le tournoi de 2013 comme Grant Gilchrist, Ryan Wilson, Sean Maitland ou encore Tommy Seymour. Des nouvelles têtes qui s’ajoutent à d’autres joueurs comme Matt Scott ou Stuart Hogg lancés l’année précédente.
Un tournoi réussi pour cette équipe qui retrouvera un peu de sa superbe en terminant à la troisième place du tournoi à égalité avec l’Italie mais avec une meilleure différence de points.
Mais l’Écosse va poursuivre cette période délicate avec une cinquième place lors du tournoi 2014 puis une nouvelle cuillère en bois en 2015 malgré l’arrivée de Vern Cotter en tant que sélectionneur de cette équipe. Pourtant le XV du chardon réussira une bonne coupe du monde avec un 1/4 de finale perdu contre l’Australie sur une dernière pénalité de Bernard Foley à la dernière minute. Une défaite cruelle pour cette équipe mais qui va définitivement la lancer. Que ce soit sous Vern Cotter ou Gregor Townsend, le XV du chardon va devenir une équipe redoutable. La progression de joueurs comme Stuart Hogg ou encore Finn Russell permet à l’Écosse de devenir une équipe à craindre.
Finalement ce match aura été un tournant pour les deux sélections. Pour la France, ce tournoi symbolise la fin d’une ère et le début d’une décennie compliquée avec une jeune génération en difficulté. Pour le XV du chardon c’est le début d’une lente reconstruction autour de jeunes joueurs comme Hogg, Laidlaw, Gray puis plus tard Russel. Aujourd’hui ces deux nations semblent prêtes à pouvoir dominer le rugby européen face à des nations comme l’Irlande et le Pays de Galles qui semblent entamer cette période de reconstruction. Si le match se tient bien la semaine prochaine, le vainqueur pourrait bien faire un grand pas vers la victoire finale du tournoi.