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Ligue des Champions : Le RB Leipzig a-t-il intérêt à espérer une « remontada » face à Liverpool ?

Deuxième de Bundesliga et désormais concurrent le plus sérieux du Bayern en championnat, Leipzig s’affirme petit à petit comme l’un des meilleurs clubs à l’échelon européen. Demi-finaliste du Final 8 l’été dernier, le club estampillé Red Bull a su se sortir d’un groupe compliqué lors de la phase de poules de Ligue des Champions, qui comprenait le PSG et Manchester United. Aux premiers abords dos au mur avant son huitième de finale retour face à Liverpool, après une défaite 0-2 à l’aller, la bande à Julian Nagelsmann est pourtant dans une situation loin d’être désespérée. Si une qualification marquerait comme une confirmation dans les ambitions du club, une élimination pourrait s’avérer salvatrice. En point de mire, la quête d’un premier titre.

Des raisons d’y croire

Au match aller, Leipzig a fait deux cadeaux à Liverpool dont ont profité Salah et Mané pour donner un avantage conséquent aux Reds. Ce revers n’a pas stoppé l’excellente dynamique des hommes de Nagelsmann qui viennent d’aligner 8 victoires consécutives dans les compétitions nationales outre-Rhin. Les partenaires de Sabitzer restent sur d’excellentes prestations offensives puisqu’ils ont mis 3 buts à chacune des trois dernières journées de Bundesliga face au Hertha Berlin, au Borussia Mönchengladbach et à Fribourg. Lors des deux derniers matchs de championnat, le Français Nkunku a été excellent en étant à la fois buteur et passeur. De bonne augure en l’absence de l’arrière gauche Angelino, meilleur buteur du club en 2020/21 avec sept buts. L’attaquant Alexander Sorloth, véritable supersub, a apporté sa contribution sur cinq buts lors des trois dernières sorties des siens, et fait partie des 15 buteurs différents des Roten Bullen.

« Nous avons un retard de deux buts à remonter, il va falloir prendre un peu plus de risques, mais on ne peut pas oublier que si on prend un but, il faudra en marquer trois. L’objectif c’est de refaire le retard, mais sans se jeter à fond dès le début, en ayant en tête la défense de notre propre but. Notre qualité en attaque était la même il y a trois semaines, mais notre confiance en nous a augmenté avec nos bons résultats en Allemagne. »

Julian Nagelsmann sur son approche du match

Imprévisible et offensive, la stratégie de Nagelsmann s’organisera sur la solidité de son dispositif en 3-4-3. En effet, Leipzig peut se targuer d’avoir la défense la plus efficace de la Bundesliga cette saison, ayant concédé seulement 20 buts en 24 matches. Lors de la phase de groupe, le club allemand a montré de très bonnes dispositions, notamment à domicile où ils ont remporté leurs trois rencontres face à l’Istanbul Basaksehir, et surtout contre le PSG (2-1) et Manchester United (3-2). Leipzig a obtenu de très bons résultats face aux clubs anglais ces dernières saisons, puisqu’il avait déjà sorti Tottenham l’an passé en 1/8e.

Face à Liverpool, Julian Nagelsmann tentera d’écrire l’histoire du RB Leipzig. Objectif, réaliser la 1ère remontada de l’histoire du club (source : The Athletic)

En face, Liverpool vient de s’incliner lors de 6 des 7 dernières journées de Premier League. Les Reds ont remporté leur seul match sur la pelouse de la lanterne rouge, Sheffield United (0-2). Lors de ce passage, les hommes de Klopp ont disputé 5 matchs à domicile pour 5 revers face à Brighton, Manchester City, Everton, Chelsea et Fulham ce week-end. Battus en milieu de semaine par Chelsea, Liverpool était attendu au tournant face aux Cottagers dimanche. Klopp ayant décidé d’aligner une équipe fortement remaniée et a vu ses hommes s’incliner une nouvelle fois (0-1). Sans idée, les Reds sont en manque de réussite à Anfield où ils n’ont pas marqué dans le jeu en 2021, soit 7 rencontres. Klopp compte sur la Ligue des champions pour se relancer, mais s’attend à un match compliqué face à une équipe de Leipzig en pleine bourre, et sans Van Dijk, Henderson, Matip et Gomez.

Gagner et se qualifier, une nécessité ?

Mais le contexte est à prendre en considération, Liverpool étant écarté dans la course au titre de champion d’Angleterre, une réaction est obligatoire en Ligue des Champions qui reste la seule possibilité d’obtenir un trophée cette saison pour la bande à Jürgen Klopp. Etonnamment, remporter la C1 est peut-être la possibilité la plus probable de se qualifier pour la prochaine édition. La quatrième place en championnat, appartenant actuellement à Chelsea, étant à sept points. Liverpool possédant un match de plus que la plupart de ses concurrents. Délocalisé, comme le match aller à Budapest, Liverpool profitera que la rencontre ne se joue pas dans le stade habituel d’Anfield en raison de la situation sanitaire.

« Ce n’est pas un sujet pour nous. Nous n’avons préparé aucune vidéo de motivation pour montrer des remontadas, les nôtres ou celles d’autres équipes. Les matches du passé n’ont aucune influence sur notre partie contre Liverpool. Les gars savent que des choses folles se sont déjà produites en football, qu’on peut remonter un retard, mais ça reste une tâche très difficile pour nous. »

Julian Nagelsmann à la question d’une possible remontada

En début de saison, Markus Krösche, directeur sportif de RBL déclarait  » Lors de la dernière saison de Ligue des Champions, nous avons fait sensation sur la scène internationale en atteignant les demi-finales et nous avons montré de quoi notre jeune équipe est capable. Notre objectif est bien sûr de revenir aux huitièmes de finale malgré le groupe difficile (Manchester United, PSG, Istanbul Başakşehir). ». Leipzig part donc serein : jamais un coach n’a été limogé depuis l’accession en Bundesliga. Les successions ont toujours été planifiées, le choix des hommes dicté par une vision à long terme. Les dirigeants n’exigent rien d’autre de Nagelsmann que de continuer à faire grandir le club. Le parcours en LDC l’an passé étant une progression inattendue, dix ans après l’apparition du club, en Oberliga (D5). À l’heure actuelle, personne ne lui reprochera une élimination. Dans ce cas, les « Roten Bullens » joueraient les compétitions domestiques à fond. Car contrairement à leurs adversaires du soir, géant aux six titres européens et aux dix-neuf titres de champion, Leipzig et Nagelsmann sont toujours en quête de leur premier trophée.

RB Leipzig – Bayern : nouveau duel pour la suprématie en Allemagne ? (source : 90 minutes.com)

L’an passé, l’accumulation des compétitions a couté cher au RBL. Champion d’Automne (Herbstmeister) à l’issue de la phase aller (Hinrude) avec une moyenne de 2,18 points et 2,82 buts par match. Le Rückrunde (phase retour) n’a pas été du même acabit, la moyenne de points par match étant tombée à 1,63, en raison d’une moyenne de but également en chute : 1,9 par match. Aujourd’hui, les Saxons sont plus que jamais dans le coup pour le titre en Bundesliga puisqu’il ne compte que deux points de retard sur le Bayern. Avec onze matchs encore à jouer dans cette édition 2020-2021, tout reste possible. D’autant plus que Leizpig va recevoir le Bayern le 3 avril prochain, lors du choc de la 27e journée. Et ce duel au sommet aura lieu quelques jours avant les quarts de finale de la Ligue des champions, que les Munichois, vainqueurs 4-1 sur la pelouse de la Lazio lors du huitième aller, ont plus de chance de disputer que les Lipsiens. Qualifiés également pour les demi-finales de la Coupe d’Allemagne à la suite de leur succès sur Wolfsbourg (2-0), ils font figure de favoris en l’absence des Bavarois, déjà éliminés.

Des enjeux au delà du sportif

Après avoir atteint les demi-finales de la LDC la saison dernière, la réputation européenne du RB Leipzig a été renforcée. À l’étranger, les fans et les médias considèrent en grande partie Leipzig comme un club de football normal. Ces derniers affirment souvent que le succès du RBL est positif pour le football allemand, et il est facile de comprendre pourquoi. Pour beaucoup, ils ont les meilleures chances de mettre fin au monopole du Bayern sur la Bundesliga. Toutefois le son de cloche est différent en Allemagne. Du côté sportif, les concurrents du RB Leipzig notent un progrès relatif, mais pas encore une situation établie. Le directeur général du BVB, Hans-Joachim Watzke, note en ce sens « Le RB Leipzig est un de nos rivaux sportifs. Mais pour être la deuxième force en Allemagne, il en faut beaucoup plus. Le succès sportif sur une longue période, le rayonnement culturel, les fans, l’ensemble du paquetage est important. Encore une fois, C’est un dur rival. Et pourtant, je continue à nous voir comme la deuxième force en Allemagne« .

« C’est la philosophie, je savais aussi que quand j’ai signé, nous avions des exigences légèrement différentes que peut-être à Dortmund ou au Bayern. Il est normal que chaque entraîneur s’efforce toujours d’en faire plus. C’est normal qu’on veuille être champions un jour. Tous ceux qui jouent en Bundesliga devraient avoir l’envie d’avoir le plus de succès possible.

Julian Nagelsmann lors du interview à SZ en juin 2020

Dans l’opinion médiatique, les ressentiments existent encore, à l’image du magazine de football 11Freunde qui a volontairement ignoré le traitement de leur demi-finale contre le PSG, se justifiant « RB Leipzig n’est pas un club de football, mais une imitation. Il s’agit d’un projet marketing, mis en place uniquement pour renforcer la marque Red Bull. Il n’a jamais eu l’intention de simplement jouer au football« . Une opinion partagée par une majorité de fans Allemands. Ainsi, l’an passé, les fans de Gladbach se sont tus dans le match à Leipzig durant les 19 premières minutes en signe de protestation (le chiffre 19 symbolisant le nombre de membre au conseil d’administration du RBL). Dès lors, il apparait pour les médias étrangers et notamment anglo-saxons – habitués à un football mondialisé et à la présence d’actionnaires étrangers au sein des clubs – que dans le football allemand, il semble être un péché de réussir quand vous n’avez pas de « vraie » histoire et que les critiques résultent de sentiments envieux de la réussite de Leipzig.

Banderoles hostiles au RB Leipzig par les fans de Kaiserslautern (source : Dialetick football)

Pourtant, le vent tourne quelque peu et les critiques envers le projet semblent s’atténuer petit à petit outre-Rhin. Si les arguments pourtant sur l’absence d’identité et de tradition se font encore échos, le respect quant au succès de Leipzig est désormais ancré. Le RBL est pleinement considéré et possède une image « très simple, éternellement jeune, romantique. L’idée d’une équipe qui, pendant des années, devient une structure harmonieuse et fait ensemble quelque chose que l’on n’aurait jamais cru capable de faire. Cette équipe représente quelque chose qui rend le football adorable« . Une opinion décriée par 11Freunde, qui dénote le manque d’esprit critique de leurs confrères, le projet étant encore aujourd’hui non viable : le club possédant une dette colossale (qui a atteint 230 millions d’euros), que la firme comble via des arrangements aux statuts douteux (à l’image du contournement de la loi 50 + 1).

La tâche de Julian Nagelsmann dans cette deuxième saison est d’essayer de combler l’écart sur le Bayern et de remplacer le Borussia Dortmund comme principaux prétendants au rôle de dauphin des Bavarois. Malgré la perte de Timo Werner cet été, le coach prodige est en passe de réussir son pari. Au delà des ambitions sportives, c’est surtout l’ancrage du projet qui est aujourd’hui au centre des attentions : Entre nouvelle épopée européenne et quête d’un premier trophée, le RB Leipzig est à un tournant de son évolution cette saison. Si son image reste décriée, son statut semble de plus en plus considéré en Allemagne mais surtout dans le monde du ballon rond. Signe que le pari de Mateschitz est réussi, Red Bull donne des ailes.

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