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Nabil Fékir, c’est l’histoire d’un gone, en Andalousie

“I récupe the ball and Memphis give me a good pass and I shot and I score”. Il n’est peut-être pas le fluide dans la langue de Shakespeare mais si l’on en croit les algorithmes de l’Observatoire du football CIES (Centre International d’Étude du Sport), Nabil Fékir est le meilleur joueur français de ce premier trimestre 2021. Vraiment ? Analyse. 

En effet, avec une note de 87,6, il se place 6e des cinq grands championnats, derrière Lionel Messi, Robert Lewandowski, Jorginho, Rúben Dias et Cristiano Ronaldo (classement qui prend en compte uniquement les joueurs ayant participé au deux-tiers du temps de jeu cette année). Une récompense qu’il doit à sa régularité et à son importance dans le XI de Manuel Pellegrini : avec 2 014 minutes jouées en championnat, il est le deuxième joueur le plus utilisé par le coach chilien (derrière Emerson). Mieux encore, il a débuté l’ensemble des matchs auxquels il a pris part, ne manquant que trois petites rencontres pour des problèmes musculaires (en novembre et en février). 

Nabil Fékir, gone bâtisseur

Certes, ces trois buts ne plaident pas en sa faveur, surtout avec un xG de 7,8 et après avoir pris de nombreuses fois sa chance (76 au total, dont 19 cadrés), mais il se distingue dans d’autres compartiments de jeu. Dans la construction notamment. Quand il est sur le terrain, la majeure partie des actions construites passent par les pieds de l’ancien lyonnais. Il touche environ 57 ballons par match (sachant qu’il joue en moyenne 81 minutes depuis le début de la saison), faisant de lui une véritable plaque tournante au milieu de terrain. 

Capture d’écran des frappes de Nébil Fékir en championnat 2020/2021 (Crédit : understat.com).

Il reçoit, construit, distribue, oriente. Son sens du placement et sa capacité de jeu en fait un élément essentiel dans le plan de jeu verdiblanco. Car c’est dans ce domaine, un domaine dans lequel il excellait déjà sur les bords du Rhône, qu’il continue de briller. Ici non plus, les statistiques ne traduisent pas toute son importance (6 passes décisives, 4,8 xA). Mais lui qui est venu pour être la pièce maîtresse de l’équipe ‘beticos’ a trouvé en Canales un coéquipier parfait. Sa technique, sa protection et son aisance balle au pied lui permettent de se sortir de situations dans lesquelles les simples joueurs de football perdent le ballon. Cette saison, il est l’un des joueurs qui tente le plus de dribbles (d’où un ratio de 69 % de réussite). Avec 53 dribbles réussis, il se place 6e du championnat. Il joue aussi pour le bonheur des yeux, Nabil.

Nabil Fekir of Real Betis during the Liga match between FC Real Betis and Real Valladolid on August 18, 2019 in Seville, Spain. (Photo by Pressinphoto/Icon Sport)

Gone de l’ombre

Comme vu plus haut, les statistiques ne lui rendent pas tout le travail effectué par le milieu offensif. Du moins pas celles présentées. Car il suffit de creuser un peu plus pour comprendre la raison du classement CIES. Il est à l’origine de 110 frappes depuis le début de la saison, soit 7,40 frappes par match (deuxième total le plus élevé derrière Léo Messi). Et s’il compte si peu de passes décisives, il faut en comprendre la raison. Contre Barcelone, il voit avant tout le monde l’appel que Juanmi fait derrière le dos de la défense. Justesse, puissance et précision permettent à l’attaquant verdiblanco de recevoir le cuir dans ses pieds, à l’endroit parfait. Bonne sortie de Ter Stegen ou tergiversation de Juanmi, toujours est-il que ce ballon ne sera pas bonifié, et ne rentrera pas dans les lignes de statistiques le plus souvent présentées . 

Capture d’écran du match Betis – Barcelone du 07.02.2021.
Capture d’écran du match Betis – Barcelone du 07.02.2021.

Omniprésent sans pour autant se montrer, il est l’auteur de 16 dribbles amenant un tir, faisant de lui le deuxième joueur le plus efficace dans ce domaine. Mais les dribbleurs sont souvent ceux qui reçoivent le plus de coup et Fékir ne déroge pas à la règle : 100 fautes subies en 25 matchs. Le calcul n’est pas difficile. En Espagne, ça joue dur sur lui. Mais il le rend bien. Car lui aussi aime mettre le pied : 68 fautes concédées. Preuve d’un joueur impliqué, qui en veut, qui se bat. 

Gone nonchalant 

Pour autant, sur un terrain, il peut paraître parfois nonchalant. Il met du temps à se replacer, même s’il concède peu de hors-jeu (11 au total). Lorsqu’il n’a pas envie, il ne presse pas, ou peu, laissant les adversaires prendre les espaces devant eux. L’exemple le plus criant, cette saison, est le match contre le FC Barcelone. À plusieurs reprises, il laisse Sergio Busquets avancer, gagner du terrain. Sans conséquence pour le coup, heureusement pour lui. Cette saison, le Real Betis ne récupère la possession dans les cinq secondes qu’une fois sur trois lorsqu’il se met à presser. Trop peu pour un joueur dont, certes, les tâches défensives ne sont pas sa mission première, mais qui devrait se montrer davantage efficace. 

Capture d’écran du match Betis – Barcelone du 07.02.2021.
Capture d’écran du match Betis – Barcelone du 07.02.2021.

Dans des matchs comme celui-ci, il se montre peu friand des courses à haute intensité. Pour le repli défensif, mais également lorsque son équipe récupère la possession et amorce une contre-attaque. On peut croire qu’il anticipe une récupération de balle adverse pour s’éviter le chemin inverse, mais n’apporte pas le nombre, ne propose pas de solution. Problématique pour celui qui est censé suppléer le numéro 9. Ce sont ces matchs « sans » qu’il serait bon de gommer.

Capture d’écran du match Betis – Barcelone du 07.02.2021.

Après deux saisons en Andalousie et à bientôt 28 ans, les appels de phares de gros clubs européens commencent à arriver. Les dernières rumeurs parlent du FC Barcelone ou d’Arsenal. Mais ces clubs sont-ils prêts à payer sa clause libératoire qui s’élève à quelque 90 millions d’euros ? Autre question et non des moindres : Nabil Fékir a semble-t-il disparu des plans de Didier Deschamps et nul doute que le champion du Monde a toujours le maillot bleu et l’Euro 2020 en ligne de mire. Les quelques mois restants, seront-ils suffisants pour satisfaire le sélectionneur ? Il sait ce qu’il doit faire, à savoir faire ce qu’il fait jusqu’à maintenant, en corrigeant ce qui peut l’être. En tout cas, il a déjà séduit le CIES.

(Crédit photo de couverture : Getty Images).

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