Поехали ! (Allons-y !) avait annoncé Youri Gagarine, il y a 60 ans quand sa fusée Vostok décolle de Baïkonour pour entrer dans l’histoire de l’humanité. La petite histoire ne dit pas si les joueurs du CSKA Moscou et de l’Avangard Omsk le diront avant de s’embarquer sur la glace pour le premier match de la finale du championnat KHL, le 18 Avril prochain. Leur objectif ? La Coupe Gagarine, un trophée d’environ 85 cm de haut pour une masse d’environ 19 kilogrammes d’argent -925 millièmes et plaqué or cerclé de palets avec les noms des clubs vainqueurs gravés sur chacun d’entre eux. Sur sa face avant, le portrait du célèbre cosmonaute soviétique, flanqué du premier satellite artificiel: Spoutnik 1, est gravé sur une plaque d’argent et à l’arrière un hockeyeur. Pour résumer, c’est LE Saint Graal du hockey russe.
Après une saison 2019-2020 qui a vu les séries annulées pour les raisons que nous connaissons. La saison 2020-2021 est vraiment une réussite et les séries ont vu des confrontations de grande qualité. Au final, c’est le CSKA Moscou qui est sorti d’une conférence Ouest toujours aussi compétitive. l’autre finaliste, c’est l’Avangard Omsk qui a réussi à se sortir de la très musclée, conférence Est. Petite présentation des forces en présence et de leur parcours en séries.

À l’Ouest, l’Armée Rouge est (toujours) la plus forte
Le CSKA Moscou, club historique du hockey Russe (32 titres de champion d’URSS), propriété du ministère de la défense, a vu de très grands joueurs soviétiques (Tretyak, Kharlamov, Petrov, Bobrov, Fetisov, Larionov et Fedorov entre autres) porter le célèbre maillot rouge et bleu floqué du symbole de l’armée : la fameuse étoile rouge. Même si les méthodes de recrutement sont plus que discutables, (le ministre de la défense n’avait qu’à mobiliser pour le service militaire les joueurs qui l’interessaient). Après la chute de l’Union Soviétique, le CSKA Moscou a quasiment disparu, entre des associations douteuses avec les Penguins de Pittsburgh (formidablement raconté dans le film documentaire « Red Penguins » par Gabe Polsky), des conflits internes et une scission, le CSKA est devenu l’ombre de lui-même.

Désormais devenue la propriété de l’entreprise pétrolier Rosneft, le CSKA retrouve sa splendeur d’antan. Par contre, les Moscovites, deux fois défaits en finale en 2016 et 2018 ont dû attendre la onzième saison de la KHL (2018-2019) pour enfin soulever la Coupe Gagarine, (du fait de l’annulation de la saison 2019-2020, le CSKA est toujours le champion en titre).
Cette saison, le club de l’armée rouge, domine la Conférence Ouest (60 matchs joués, 34 victoires en temps réglementaires, 5 victoires en surtemps, 4 victoires en tirs de barrage, pour 12 défaites en temps réglementaire, 3 défaites en surtemps et 2 défaites en tirs de barrage). Une domination absolue avec 9 points d’avance sur le SKA Saint-Pétersbourg. Au premier tour des séries, le CSKA retrouve son rival Moscovite : Le HK Spartak Moscou. Même si la rivalité est toujours aussi tenace, et malgré un courage héroïque, le Spartak, en difficulté depuis plusieurs saisons, ne fait clairement pas le poids face au rouleau compresseur frappé de l’étoile rouge et est balayé en 4 matchs (1-0 en surtemps, 5-1, 0-3 et 1-3).
En demi-finale de Conférence, un poids lourd s’oppose au CSKA : le Lokomotiv Yaroslavl, qui a balayé au premier tour, le club finlandais du Jokerit Helsinki. C’est une confrontation plus qu’ alléchante entre deux équipes jeunes (24 ans de moyenne pour le CSKA et 25 ans de moyenne pour le Loko) et ultra talentueuses. Dès le premier match, le Lokomotiv inflige la première défaite des séries au CSKA (2-0). L’armée rouge se reprend au match 2, avec une large victoire (4-1) avant de s’imposer à nouveau lors du match 3 en surtemps (2-1OT). Le match 4 pour le Lokomotiv avec une victoire (3-0) pour égaler la série. Au match 5, Le CSKA doit s’en remettre à sa défense pour finalement s’imposer 3-2 et s’offrir un premier match décisif. Sur la glace de Yaroslavl, le CSKA est défait 2-1 et doit jouer sa qualification lors d’un périlleux match 7 à domicile. Lors de ce match 7, le CSKA répond présent, et s’impose 2-0 pour filer en finale de conférence, contre l’autre grand rival : Le SKA Saint-Pétersbourg.

CSKA – SKA, soit le premier de la conférence Est contre son dauphin. La capitale fédérale contre la capitale des Tsars, Gazprom contre Rosneft, c’est le derby des armées. Les trois premiers matchs sont à sens unique tant le CSKA surdomine son adversaire (3-0, 2-0 et 2-5), Lars Johansson, le gardien moscovite signe deux blanchissages lors des deux premières rencontres et écrase les velléités offensives des Pétersbourgeois, et beaucoup d’observateurs ne donnent pas chers des chances du SKA. Mais telle une bête blessée, l’attaque de Saint-Pétersbourg se reprend et se met à compter 3 buts dans une victoire 3-1 et le SKA remporte le match 4. Le match 5 restera dans les annales de la KHL, un duel de près de 113 minutes de jeu, il faut 3 périodes de surtemps (2-3OT) et grâce au sixième but des séries de Vasily Podkolzin qui reprend de volée une passe transversale de Vladislav Tsitsyura le SKA s’offre une victoire qui peut faire changer le momentum de la série. Le match 6, par contre, voit la série basculer définitivement à l’avantage des Moscovites, 2 buts en seconde période marqués par Maxim Shalunov et Maxim Sorkin, scellent définitivement le sort de la série et le CSKA Moscou se retrouve pour la quatrième fois en six ans en finale de la Coupe Gagarine !

Au niveau statistique, le CSKA montre ses muscles, puisque deux joueurs qui trônent au sommet des pointeurs des séries : Konstantin Okulov (16 points soit 5 buts et 11 passes) et Maxim Shalunov (15 points doit 10 buts et 5 passes) mais également chez les défenseurs avec le canadien Mat Robinson (8 points soit 2 buts et 6 passes). N’oublions pas que le gardien suédois Lars Johansson est le premier gardien des séries au pourcentage d’arrêts avec (excusez du peu) 96.1% d’arrêts !!! Mais aussi premier à la moyenne de buts encaissés avec 1 but par match et 6 blanchissages (1er gardien des séries).

À l’Est, l’aigle prend son envol
L’histoire de l’Avangard Omsk, est une histoire de survie, de renaissance, d’éclosion et de drame. Fondé en 1950, le club changera plusieurs fois de nom au grés des nombreux partenariats plus ou moins farfelus prenant le nom d’une entreprise spécialisée dans le caoutchouc (Kauchuk en Russe) ou encore le nom de fabricant de pneus (Shinnik en Russe) avant de devenir en 1981, l’Avangard. La période post-soviétique est celle de l’éclosion pour l’Avangard, qui intègre l’Elite en 1991, après 27 ans de ballotage entre la troisième et la deuxième division. Les résultats vont crescendo, première qualification pour les séries, puis une progression jusqu’en 2004 où, grace au lockdown en LNH, le club recrute le légendaire Jaromir Jágr pour mener les aigles au titre. Promesse tenue car Omsk devient enfin champion de la Superligue Russe. Suite à la fondation de la KHL en 2008, Omsk est évidemment de la partie, et veut y tenir son rang de favori. Jágr est de retour après une pige de 3 ans aux Rangers de New York, et compte remporter la Coupe Gagarine. Malheureusement la première saison en KHL (2008-2009) voit le jeune espoir Russe, Alexei Cherepanov décéder lors d’un match de saison régulière contre le Vityaz Chekhov. Malgré ce drame, Omsk devient une des forces de la KHL, atteignant deux fois la finale en 2012 où ils sont défaits par le Dynamo Moscou et en 2019, où c’est un autre club Moscovite qui les bat, ce club c’est le CSKA Moscou.

La saison 2020-2021 s’annonce disputée à l’Est, on y retrouve plusieurs favoris pour le titre : Kazan, Oufa, Magnitogorsk et Omsk. L’Avangard a effectué un recrutement intéressant mêlant experience et jeunesse. Tout d’abord sur le banc on retrouve l’ancien coach des Flames en LNH, Bob Hartley, et dans l’effectif plusieurs noms connus tel qu’Ilya Kovalchuk, Alexei Emelin, Jiri Sekac, mais aussi Nail Yakupov. Le filet est gardé par Igor Bobkov et le Tchèque Simon Hrubec. La saison régulière voit l’Avangard terminer à la deuxième place de la Conférence Est, à 6 points du leader Kazan, avec un bilan de 33 victoires et 3 victoires en surtemps contre 12 défaites, 7 défaites en surtemps et 5 défaites en tir de barrages.
Au premier tour des séries, l’Avangard affronte l’Avtomobilist Ekaterinbourg, dont le capitaine n’est autre que l’ancienne légende des Red Wings de Détroit, Pavel Datsyuk. Le premier match de la série est une formalité pour Omsk, qui s’impose 3-0 avec deux buts en avantage numérique, mais le match 2 est plus difficile. Ekaterinbourg s’accroche et fait mieux que se défendre, les joueurs de l’Oural poussent Omsk dans leur dernier retranchements, et grâce a un but de son assistant capitaine, Ilya Kovalchuk, l’Avangard s’impose dans la douleur. Forts de deux victoires, Omsk semble avoir prit un ascendant psychologique sur son adversaire, mais dès le match 3, Ekaterinbourg revient dans la série avec un succès étriqué 2-1. En parlant de succès étriqué, la victoire d’Omsk au match 4 l’est tout autant, après 2 périodes de surtemps, les hommes de Bob Hartley ont puisé au plus profond d’eux-même pour s’imposer grace encore a ce diable de Kovalchuk. Le match 5 voit l’Avangard s’imposer 3-1, malgré l’ouverture du score par Datsyuk, cette victoire permet a Omsk de passer le piège du premier tour, destination Magnitogorsk.

Omsk retrouve une vieille connaissance lors des demi-finales de conférence: le Metallurg Magnitogorsk. Les deux clubs se sont déjà affrontés deux fois en demi-finale de conférence, en 2010-2011 avec une victoire en 7 matchs de Magnitogorsk et en 2011-2012 avec cette fois la victoire d’Omsk en 5 matchs. Le Metallurg n’est pas une équipe a prendre à la légère, depuis la saison 1997-1998, le club de l’Oural a toujours été présent en séries ! Ils comptent 5 titres de champion de Russie dont 2 Coupes Gagarine. Leur effectif compte, entre autre, dans ses rangs plusieurs grands joueurs, parmi lesquels le capitaine Sergei Mozyakin (le plus grand pointeur de l’histoire du hockey Russe avec plus de 750 points en carrière), Nikolai Kulomin (ancien joueur de LNH aux Maple Leafs et aux Islanders) et le gardien Vasili Koschechkin (deux fois meilleur gardien de la KHL en 2014 et en 2017, champion du monde en 2009 et champion olympique en 2018). Le premier match de la série débute mal pour Omsk, défait sévèrement sur leur glace 5-2 avec notamment 2 buts encaissés en 41 secondes en troisième période ! Pour le deuxième match, Omsk se doit de réagir, et reussit à vaincre son adversaire, non sans mal, car il faudra attendre la 14ème minute de prolongation pour que l’Avangard puisse enfin avoir le dessus sur Magnitogorsk, grâce à un but de Sergei Tolchinski assisté par Reid Boucher et Oliwer Kaski. Le match trois, tournera à l’avantage des troupes d’Ilya Kovalchuk, les Aigles d’Omsk dominent le Metallurg, 3-0, victoire nette et sans bavure. Le match quatre est une autre paire de manches pour Omsk, sur leur glace de l’Arena-Metallurg, Magnitogorsk écrase Omsk 7-1. Cette demi-finale ressemble à un combat de poids-lourds où chaque adversaire se rend coup pour coup. De retour sur sa glace pour le match 5, Omsk inflige une nouvelle claque à Magnitogorsk, Une victoire de 4-0 dont un tour du chapeau pour le Canadien Corben Knight, on sent que le momentum de la série a changé, mais avec les Renards de l’Oural, il faut s’attendre à tout. Le match six tourne à l’avantage des hommes de Bob Hartley, Omsk domine largement Magnitogorsk 5-1 et se qualifie pour la finale de conférence, face au club de Stéphane Da Costa: l’AK Bars Kazan.

L’AK Bars Kazan, 5 titres de champion de Russie dont 3 Coupes Gagarine. Premier de la Conférence Est, invaincu en séries (balayage du Torpedo Nizhny-Novgorod et du Salavat Yulaev Oufa), des joueurs étoiles; Stéphane Da Costa (blessé lors de la série contre Oufa), Danis Zaripov, Alexander Burmistrov, Nigel Dawes, Viktor Tikhonov. Une attaque de feu, une défense de fer, c’est un monument du hockey russe qui se dresse devant les hommes de Bob Hartley. La première rencontre est à l’avantage d’Omsk qui fait tomber Kazan pour la première fois des séries, 3-1. Mais avant la seconde rencontre, le capitaine de l’Avangard Alexei Emelin est hospitalisé d’urgence dans un état grave, il souffre d’une insuffisance hépatique aigüe, dû à une réaction toxique à un médicament (selon nos confrères du Journal de Montréal) et désormais attend une transplantation du foie. Malgré le choc, ses coéquipiers se remobilisent et lors du match deux, ils dominent Kazan 2-0 et prennent l’avantage dans la série. De retour sur leurs terres, Omsk subit la loi des panthères des neiges Tatares, et s’incline 1-2. Deux jours plus tard, Omsk s’incline encore 1-2 lors du match quatre, et la série est à égalité. Le match cinq est un combat, le capitaine par intérim Ilya Kovalchuk nivelle la marque 3-3 à 58 secondes de la fin du temps réglementaire, puis Reid Boucher compte le filet gagnant d’Omsk après 1 minute 53 en surtemps. L’Avangard reprend l’avantage dans la série. Le match six, voit Kazan sortir les griffes par l’entremet de Kirill Petrov auteur d’un doublé synonyme de victoire 2-0 et l’AK Bars pousse la série à un septième match décisif. 15 Avril 2021, septième match décisif, 60 minutes pour une place en finale de Coupe Gagarine. Dans une Tatneft Arena de Kazan chauffée à blanc, les deux équipes rivalisent de talent et le match est un veritable festival offensif, à tel point qu’au bout des 60 minutes, les deux adversaires sont à égalité 3-3, grace notamment à un arrêt spectaculaire du gardien de Kazan Timur Bilyalov en fin de rencontre. La série se jouera donc en surtemps, à 3 minutes 7 secondes de la prolongation, Oliwer Kaski, déjà auteur d’un but dans le temps réglementaire, compte le but en or. Le grand favori Kazan tombe sur sa glace, par contre pour l’Avangard Omsk, ils s’envolent à nouveau pour la Coupe Gagarine pour un remake de la dernière finale contre le CSKA Moscou.
Au niveau statistique, l’Avangard Omsk démontre que son attaque est l’une des meilleures de la saison avec deux joueurs dans les 5 meilleurs pointeurs des séries: Sergei Tolchinski (16 points soit 5 buts et 11 passes) et Reid Boucher (13 points soit 5 buts et 8 passes). Chez les défenseurs notons le héros du match 7 de la finale de conférence Oliwer Kaski (7 points soit 3 buts et 4 passes). Le gardien Simon Hrubek trône quant à lui au deuxième rang des séries au pourcentage d’arrêts avec un sublime 95.4% d’arrêts ! Il est sixième à la moyenne de buts encaissés avec 1.43 buts par match et 3 blanchissages (3ème gardien des séries).
Cette finale s’annonce grandiose, entre deux équipes où le talent ne manque pas. D’un coté la jeune équipe du CSKA Moscou veut remporter sa deuxième Coupe Gagarine, afin de continuer à écrire sa légende dans le hockey Russe. De l’autre l’experimenté Avangard Omsk qui, outre la possibilité de remporter enfin sa première Coupe Gagarine, aura aussi la motivation supplémentaire de vouloir gagner pour leur capitaine, Alexei Emelin, gravement malade.

La Dream Team Hockey de Café Crème Sport s’est amusée à donner son pronostic :
- Benjamin: Victoire de L’Avangard Omsk
- Jérémy: Victoire du CSKA Moscou
- Hakim: Victoire de l’Avangard Omsk
- Philippe: Victoire de l’Avangard Omsk