La voilà ! La semaine des rêves, des espoirs, d’une ligue et des jeunes talents armés pour changer le paysage du football américain professionnel. Jeudi, les grandes stars du football universitaire se verront sélectionnées par les franchises NFL, mais la grande messe annuelle s’étend bien trois jours. Vous connaissez sans doute les joueurs qui seront les premiers appelés, mais c’est une classe de 250 joueurs qui sera intronisée dans l’élite du sport. La rédaction du CCS a pris beaucoup de plaisir à en découvrir une grande partie. Aussi, il est temps pour nous de vous présenter nos coups de cœur à chaque position. Qu’importe le choix où il seront pris, voici les prospects que nous soutiendrons becs et ongles une fois chez les pros. Accompagné de mes collègues Tonyo et Cyprien, nous vous proposons chacun un joueur par poste. Aujourd’hui, première partie avec les joueurs offensifs.
Defensive Line :
Cyprien : Marvin Wilson, Florida State
Entre 2020 et 2021, Marvin Wilson est probablement le joueur qui a perdu le plus durant la saison de college football. En effet, si ce dernier avait décidé de partir lors de la draft précédente, il aurait été dans la discussion pour être pris parmi les tous meilleurs joueurs dans le premier tour. Les projections sont beaucoup moins bonnes après l’exercice de cette année. Wilson n’a pas été aussi dominant et a souffert, au diapason avec son équipe. Pourtant, c’est bien la seule mauvaise année pour ce joueur. Alors, pourquoi ne pas lui accorder le bénéfice du doute ? En Nose Tackle, Wilson performe, il est puissant et technique capable de gagner sur le pass rush et aussi sur le run stop. Wilson sera vraisemblablement pris à partir du 3ème tour cette année et cela ressemble déjà à un steal.
Hugo : Tommy Togiai, Ohio State
Le jeu de Tommy Togiai est assez simple à expliquez. Si vous aimez Vita Vea, il y a de bonnes chances que Tommy Togiai vous plaise également. Le postulat de base est le même pour les deux: être une boule de puissance qui repousse continuellement son opposant, sans relâche et avec une impressionnante efficacité. Si Togiai reste une version moins aboutie que le DT des Buccaneers choisi en 13e position en 2018, il reste un joueur très intéressant. Dominant contre la course, et offrant un bon potentiel de compression de la poche contre la passe, Togiai peut jouer dès le premier jour dans une rotation NFL et devenir à terme un titulaire essentiel de la ligne défensive.
Tonyo: Osa Odighizuwa, UCLA

Puis-je vous intéresser en un triple champion de lutte poids lourds de l’Oregon, vainqueur de ses 91 combats au lycée ? Ses qualités de lutteur sont évidentes sur un terrain de football. Il est long, lourd et souple. Il joue avec un centre de gravité très bas, toujours en équilibre, se montre puissant et fait excellent usage de ses mains. Il semble avoir un don pour localiser le ballon à travers le trafic et se trouve constamment en bonne position pour altérer les intentions du passeur ou du coureur.
Dans une défense 3-4 ou 4-3, il saura trouver sa place sans le moindre problème. Il doit cependant apprendre à terminer ses actions. Les chiffres ne reflètent que trop peu son impact sur le jeu, notamment contre la passe. Mais le talent et les bases d’un super joueur sont indéniables. Il sera LE steal de la draft s’il n’est pas sélectionné avant le troisième jour.
Edge Rushers :
Cyprien : Janarius Robinson, Florida State
Oui encore Florida State pour un homme qui doit mettre de la pression sur le QB adverse. Il faut dire que ces dernières années, c’est un peu tout ce qui reste à l’université floridienne, Brian Burns en chef de file. C’est maintenant au tour de Janarius Robinson de se frayer un chemin dans la grande ligue. S’il n’a pas fait beaucoup de bruit c’est parce que sa production est restée modeste. Statistiquement il n’a pas affolé les compteurs. Si on se penche un peu plus sur les vidéos, cependant, on remarque des aspects de son jeu intéressants. Son premier pas est rapide, il est aussi très mobile et agile. Techniquement, il reste beaucoup de travail mais physiquement, Robinson a été fabriqué dans un laboratoire. Ses mensurations : 2m, 120kg, 89,5cm (longueur des bras), 219cm (envergure). Bien coaché, Janarius à les atouts pour devenir un monstre, un projet à prendre à partir du 3ème tour.

Hugo : Chris Rumph, Duke
Et le prix du joueur le plus fun à voir jouer est décerné à… Chris Rumph! S’il risque d’attendre le 3ème jour avant d’entendre son nom, la faute à un manque de force, Rumph est une bouffée d’air frais dans cette classe de Pass Rushers. De manière générale, il est rare de trouver un joueur utilisé de telle manière au niveau universitaire. Avec sa carrure longiligne, Rumph est utilisé pour “rusher” depuis tous les endroits possibles, d’un bout à l’autre de la ligne. Le staff de Duke lui laisse parfois même toute liberté de choisir son angle d’attaque, une preuve de son intelligence de jeu (naturelle pour le fils d’un coach). Rumph, c’est le plaisir des yeux, c’est le jeu.
Tonyo : Joseph Ossai, Texas
All gas, no brakes. Joseph Ossai n’a qu’une seule vitesse, la maximale. Il ne lâche rien et ne s’arrête jamais. Le genre de joueur qu’on ne peut qu’apprécier, malgré ses lacunes. Comment ne pas aimer son histoire aussi ? Né au Nigeria, ses parents et ses quatre frères et sœurs rejoignent les États-Unis en 2009. Le seul football qu’il connaissait jusque-là était celui de la feu Super League.
Pour ce qui est du terrain, il a l’accélération qui va avec le moteur. Un premier pas terrible et des mains violentes. Son envergure lui permet de faire des plaquages qui ne paraissent pas réalisables, en toute fin d’action. Grâce à son effort continu, il fait des plays quand l’action semble terminée pour les 21 autres joueurs sur le terrain. Un meilleur contrôle de son énergie, un peu de variété dans ses attaques de la poche, de la consistance contre la course et il sera un defensive end de premier plan. Il y a du boulot, mais c’est possible et j’y crois.
Linebackers :
Cyprien : Erroll Thompson, Mississipi State

S’il y a de grandes chances pour que les noms exposés précédemment soient déjà arrivés à vos oreilles, celui d’Erroll Thompson reste tapi dans l’ombre du processus pré-draft. Il est temps de lui donner un peu de lumière. Le poste de linebacker n’est pas le plus sexy, comme celui de RB les équipes aiment attendre les tours du day 2 voir day 3 pour combler ce poste. Et c’est ici qu’elles trouveront leur bonheur avec Thompson. Le joueur est un leader d’homme, surdoué en défense contre la course, dans la compréhension du jeu, l’instinct et dans le plaquage. Il est au contraire plutôt déficient sur la passe notamment en man coverage où il est incapable de tenir un 1v1 de par ses limitations physiques. En zone, le LB est meilleur que ce que l’on présente de lui le plus souvent. Malheureusement, ses lacunes sont pour la plupart difficilement coachables (vitesse, mobilité, agilité) ce qui explique aussi sa faible côte aujourd’hui. Dans une 34, au centre de la défense, avec un profil complémentaire à ses côtés, Thompson pourrait être une bonne trouvaille de fin de draft.
Hugo : Zaven Collins, Tulsa
Voici un joueur que vous verrez partir dans le top 32 cette semaine, et ce ne sera pas assez pour moi. Zaven Collins est un des 15 meilleurs joueurs de cette draft, point. Le manque de reconnaissance pour son talent, son jeu très complet et sa capacité à affecter TOUTES les actions se trouve entre l’absurde et le criminel. Peut-être à cause de sa carrure qui fait penser à un Pass rusher, peut-être parce qu’il a joué dans une fac moins côtée. Sûrement parce que la NFL n’a pas retenu la leçon que Darius Leonard a essayé de leur apprendre. Un LB qui est athlétique, bon contre la course et la passe, et qui peut avoir un impact dès le premier jour, ça se drafte haut, messieurs.
Tonyo : Chazz Surratt, North Carolina
Fluidité dans ses mouvements, chasse latérale et verticale de l’adversaire, accélération… Chazz Surratt remplit toutes les cases du linebacker type. D’autant plus étonnant pour un joueur qui n’a que deux années d’expérience au poste. C’est en tant que quarterback qu’il a débarqué à Chapel Hill et disputé les trois premières années desa carrière universitaire. Il a non seulement fait la transition physique mais mentale pour se donner une chance d’atteindre la NFL.
22,5 plaquages pour perte en 22 titularisations, il joue avec anticipation et son explosivité est remarquable. Après cinq années à la fac, Surratt est un joueur âgé. À 24 ans, il semble déjà avoir atteint sa plénitude physique. Il ne s’améliorera pas beaucoup dans la séparation des blocs, où il est parfois emmené en promenade. Néanmoins, ses qualités athlétiques et son instinct peuvent en faire un machine à plaquages. Un intrigant prospect en tant que linebacker côté faible, qui a travaillé ces deux dernières années et saura faire fructifier l’opportunité qu’on lui donnera.
Cornerbacks:
Cyprien : Shaun Wade, Ohio State
NFL devrait être synonyme de délivrance pour Shaun Wade, mais, il devra être surtout définition de rédemption pour le joueur, qui devra montrer à l’équipe qui le repêche que le pari est gagnant. L’année dernière, Shaun Wade a été (n’ayons pas peur des mots) détruit par la grande majorité des receveurs se présentant devant lui. La raison, c’était sa première saison sur l’extérieur de la défense, lui qui n’avait connu que le poste de nickel cornerback sur le début de sa carrière universitaire. Un poste qui, définitivement, répond plus à ses capacités, et auquel il s’était mis en évidence. Wade est efficace en press coverage face à des profils rapides et moins puissants du slot. Face à eux il peut faire parler son physique et ses capacités athlétiques. A l’échelon supérieur, il sera probablement cantonné à ce rôle. On peut aussi imaginer un replacement naturel au poste de safety. Comme Marvin Wilson précédemment, Shaun Wade a beaucoup perdu à jouer la dernière saison de CFB mais pourrait faire le bonheur d’une équipe à partir du 3ème tour.

Hugo : Keith Taylor, Washington
Keith Taylor est un nom qui m’était complètement inconnu en janvier. Jusqu’au Senior Bowl. Dans une édition plus importante que jamais du All-Star Game, c’est sans aucun doute le CB de Washington qui a été le joueur le plus bluffant. Il faut comprendre que les duels WR vs CB y sont très désavantageux pour les Corners et que réussir la moindre bonne action est déjà très impressionnant. Taylor l’a fait continuellement pendant les 3 jours de l’exercice, et même pendant le match, forçant une INT. Sa longueur naturelle et ses déplacements fluides seront très attrayants en NFL, il lui faudra cependant devenir plus agressifs et peaufiner sa technique ainsi que son agressivité dans son jam et dans ses plaquages. Mais la base de travail est alléchante et sa semaine à Mobile est très encourageante pour la suite de sa progression.
Tonyo : Elijah Molden, Washington
Bon partout, exceptionnel nulle part. La seule raison pour laquelle il ne sera pas sélectionné au premier tour. Certains mauvais front offices le rayeront carrément de leur board à cause de sa taille et son manque de vitesse. Je prend le pari qu’il sera un bon joueur en NFL. Il est agressif à souhait, à la limite de la légalité, sans franchir la ligne de manière évidente pour les arbitres. Le fils spirituel de Richie McCaw.
À 87 kg pour 1,76 m, il est une boule de muscle qui joue dur sur l’homme. Dans le pire des cas, il sera un nickel corner idéal et une plus value certaine en équipes spéciales. Dans le meilleur des cas, un coordinateur offensif comprendra sa polyvalence et laissera aller sa créativité dans son utilisation, en corner ou en safety. Un Tyrann Mathieu du pauvre, c’est oui.
Safeties :
Cyprien : Tyree Gillespie, Mizzou
Dans la famille des safety gros plaqueur, capable de détruire un adversaire en une fraction de seconde, je demande le petit dernier, Tyree Gillespie. S’il ne brille pas par ses qualités de lecture et de ball skills (seulement 12 passes défendues et 0 interception sur sa carrière universitaire), laisser un adversaire s’échapper lorsqu’il passe à sa portée ne fait pas partie de son vocabulaire. Le joueur est rapide et a une explosivité rare qui lui permet de fermer les espaces très rapidement. Malheureusement, il peut avoir ce petit côté gambler dans son jeu qui lui fait parfois défaut, toujours à la recherche du big hit. De plus à Mizzou il était responsable, seul, du fond du terrain. En NFL, les équipes ne peuvent pas se permettre cela au risque d’être trop exposées à la passe. Il devra entamer une transition vers un rôle de strong safety ou bien opérer dans un système de Cover 2 pour espérer exister. On peut aussi l’imaginer en linebacker dans des sub-packages, même si son physique pourrait alors le limiter. Sa plus-value en équipe spéciale lui permettra assurément d’être drafté, probablement lors du 3ème jour de la draft.
Hugo: Jamar Johnson, Indiana
Si Justin Fields n’est pas le 2ème choix de la draft, et peut-être même pas le 3ème, il y aura peu d’explications à cela. L’une d’entre elles s’appellent Jamar Johnson. Car la performance du leader défensif d’Indiana face à toute l’attaque d’Ohio State est tout bonnement une des meilleures prestations qu’un prospect ait pu offrir cette année. Jusqu’ici peu connu du grand public, Johnson a affiché dans un match pourquoi il devrait être drafté dans le top50: il est partout. En couverture en zone, en couverture sur l’homme, dans la boîte, dans le slot, pour blitzer, Johnson bouge tout le temps et de manière toujours intelligente dans un schéma d’Indiana qui a fait faire des cauchemars au QB des Buckeyes. Ce n’est pas le joueur le plus athlétique mais dans un schéma qui privilégie les S polyvalents et playmaker, Jamar Johnson possède un profil très attrayant.
Tonyo: Divine Deablo, Virginia Tech

D’abord son prénom ne peut qu’amener la réussite. On ne peut pas s’appeler divin et échouer. Impossible. Et puis le garçon est un monstre physique : 1,93 m, 103 kg, 4,44 secondes au 40 yards… Les mensurations de Kam Chancellor et la vitesse des meilleurs receveurs.
Receveur, le poste auquel il était d’ailleurs censé joué à Virginia Tech, après avoir été un quarterback au lycée, et avant de faire la transition en défense. Une expérience certainement à l’origine de son excellente lecture du jeu. Il est également un as en équipes spéciales, où il a joué 739 snaps à l’université. À quel poste se stabilisera-t-il en NFL ? Safety ou linebacker ? L’équipe qui le draftera devra en avoir une idée pour éviter qu’il soit éternellement le popotin entre deux chaises. Quoi qu’il en soit, Deablo est un joueur de foot dans le sens le plus pur du terme, un playmaker et un leader.
Si le plaisir des yeux n’est pas gage de succès en NFL, découvrir des joueurs qui nous font vibrer est aussi une des parties les plus encourageantes du processus pré-draft. Les joueurs que nous vous avons présenté ici ne sont pas forcément des sleepers, ils ne seront pas forcément des steals et peut-être pas non plus des stars. Mais ils ont chacun été une bouffée d’air frais dans une période où tout est à l’évaluation et aux calculs prévisionnels. Dans un environnement presque froid, la chaleur d’une belle action qui nous fait lever les sourcils, c’est déjà énorme pour les évaluateurs du dimanche que nous sommes, aussi nous avons hâte de voir ces joueurs se mesurer aux tous meilleurs.