La draft, cet événement annuel qui permet aux franchises du sport américain de se renouveler. La NFL ne déroge pas à la règle. Le 29 avril prochain, une nouvelle classe de joueurs sortant de l’université sera repêchée et entrera dans la grande ligue. Entre, choix judicieux, coups du sort, déceptions, le tout saupoudré d’un soupçon de chance, cette année sera encore une fois l’apogée de l’intersaison. Le CCS se mobilise pour vous préparer au mieux à la prochaine draft avec la présentation de profils détaillés des plus gros espoirs, mais aussi des bons coups que l’on pourrait trouver plus tard dans l’événement. Sans hiérarchie particulière, vous trouverez ici toutes les informations nécessaires pour connaître les futurs rookies, voire les futures stars de la NFL.
Caleb Farley

Bilan
Caleb Farley est l’un des meilleurs cornerbacks de cette cuvée et cela relève déjà d’un petit miracle. D’abord parce qu’il jouait quarterback au lycée, à Maiden High en Caroline du Nord. Un quarterback, mais qui a glané plus de yards et marqué plus de touchdowns à la course (5878 yards et 71 touchdowns) qu’à la passe (4511 yards et 50 touchdowns). Aucune université de renom lui a donc offert une bourse pour être son quarterback, mais Virginia Tech a décelé l’athlète et l’a recruté pour en faire un receveur.
À peine arrivé sur le campus sur le campus de Blacksburg en 2017, il se rompt les ligaments croisés et perd sa mère d’un cancer du sein. Farley a fait son deuil, soigné son corps et sa tête pour retrouver les terrains en 2018, au poste de cornerback. Deux changements de poste, un genou en vrac et un parent disparu en l’espace d’un an… On a connu chemin moins tourmenté.
Mais son retour au football a été étincelant pour un novice au poste avec 36 plaquages, un plaquage pour perte, un sack, neuf passes défendues et deux interceptions en 12 titularisations. Et que dire de sa progression express en 2019, où les quarterbacks adverses ont complété moins de 50% des passes lancées en sa direction ? Aucun cornerback de ACC n’a fait mieux que ses 16 passes défendues, et ses quatre interceptions étaient le plus gros total des Hokies.
En 2020, Farley était le premier prospect attendu au 1er tour de la draft à faire l’impasse sur la saison. Une décision motivée par l’historique de santé familial, qui lui a sans doute été bénéfique pour éveiller la convoitise des scouts et coachs défensifs de la ligue.
Ses forces :
- Ses qualités athlétiques
Caleb Farley mesure 1,88 m pour 94 kg, soit la même taille et deux kilos de plus que le meilleur corner de cette classe, Patrick Surtain II. Comme Surtain, il est plus grand et costaud que la moyenne au poste, mais à l’inverse de Surtain, il est rapide comme une flèche. À le voir courir, on comprend très facilement comment il a marqué 35 touchdowns à la course en 11 matches lors de sa dernière année au lycée : Farley est une merveille athlétique.
Son explosivité sur la ligne de scrimmage est semblable à celle des meilleurs linemen et sa pointe de vitesse à celle des meilleurs receveurs. Les tracés vers l’intérieur dans son périmètre et lancers intermédiaires ont une durée extrêmement limitée, sinon nulle, tant il peut rapidement fermer les fenêtres de tir.
- Sa fluidité
Sur l’extérieur, il peut rattraper ses erreurs et les receveurs se faisant la malle grâce à une accélération vraiment stupéfiante pour un tel gabarit. Une combinaison rare qui fait qu’il sera très rarement en position de mismatch en couverture un contre un. Idem lorsqu’il doit se retourner. Normalement signe que le receveur a pris l’avantage sur son vis-à-vis, avec Farley la victoire n’est que de courte durée. En plus de l’accélération et de la vitesse, il est d’une fluidité imparable dans ses mouvements. Sans accroc et toujours coordoné.
- Son œil pour le ballon
Caleb Farley n’est pas seulement rapide, sa détente lui confère un rayon de perturbation phénoménal. Ajouté à cela son œil pour le ballon et on parlerait presque de receveur dans le corps d’un defensive back. Les lancers 50/50 dans sa direction ne sont pas des lancers 50/50, qu’on se le dise.
Si la passe lui était destinée, on aurait loué sa bataille pour obtenir la bonne position et sa capacité à réceptionner le ballon alors qu’il est retenu. C’eut été brillant pour un receveur, c’est époustouflant pour un défenseur.
La passe de N’Kosi Perry manque un peu de puissance ici, mais l’idée est bonne et l’exécution pas catastrophique non plus. Simplement Farley ne laisse aucune chance à Dee Wiggins d’être en position de réception et encore moins de récupérer le ballon. Superbe anticipation, trop costaud, trop rapide, trop fort.
Ses faiblesses
- Son manque d’attention
Caleb Farley peut se montrer trop agressif dans sa volonté de jouer l’interception et se sortir de l’action : le syndrome Marcus Peters. Seulement le pourcentage de réussite de Peters justifie ses prises de risques. Farley sort trop souvent des sentiers battus sans que son jugement ne soit encore au niveau des grands defensive backs qui se le permettent.
Il manque parfois d’attention sur la ligne de scrimmage où il reste les pieds à plat une ou deux secondes de trop pendant que le receveur est déjà prêt à partir. Ce problème n’était pas dramatique à l’université tant il était plus rapide que les autres joueurs. En NFL son avantage va s’amenuiser et il devra faire plus attention à ne pas être pris en défaut avant même que l’action ne commence.
- Ses plaquages
Le plus grand cornerback de l’histoire, Deion Sanders, était un piètre plaqueur. Il n’empêche que savoir bien plaquer peut être utile et la technique que Caleb Farley est à revoir. Il a manqué 21 plaquages en deux saisons à Virginia Tech. Sept seulement en 2019, peut-être preuve qu’il a trouvé comment limiter les dégâts, mais cela reste préoccupant pour le niveau professionnel.
Laisser l’équipe adverse convertir une 3e et 7 de cette manière lui fera faire un tour sur le banc de touche en moins de deux en NFL.
- Contre la course
Ses lacunes en plaquage donnent lieu à des lacunes contre la course. Encore une fois, ce n’est pas là qu’on lui demandera d’être le plus performant, mais c’est une corde qu’il ne possède pas à son arc. Il n’est pas agressif dans le soutien et à la poursuite des coureurs. Le plus frustrant est qu’il a tous les atouts physiques pour devenir dominant dans le secteur. Certainement le produit du fait qu’il n’ait que peu d’expérience au poste.
- La couverture en zone
À regarder ses matches, on trouve beaucoup de séquences où il est bon en zone :
En réalité, il est souvent perdu dans l’espace. Il se rattrape grâce à sa vitesse, mais la NFL ne lui sera pas aussi clémente. Il peut laisser le receveur se démarquer et occuper l’espace préférentiel pour réceptionner le ballon dans une partie du terrain qu’il est censé contrôler. À d’autres moments, il est trop proche du receveur et laisse un trou béant derrière lui, que ses coéquipiers se retrouvent à devoir combler.
- Ses blessures
C’est LE gros point d’interrogation autour de son avenir professionnel. Une rupture des ligaments croisés est presque l’équivalent d’une grosse grippe dans le football américain. Cela peut arriver à tout le monde. Une opération du dos est plus rare et embêtante. Caleb Farley en a subi une en 2019 et on ne l’a plus revu sur un terrain depuis. Pis, il en a subi une autre au mois de mars dernier : une discectomie pour lui enlever une partie du disque intervertébral. Ses médecins ont beau assurer que l’intervention n’est pas invasive, le fait qu’il ait des douleurs au dos depuis deux ans sans même avoir joué n’est pas forcément de bon augure. Et pour ne rien arranger, il vient d’être testé positif au coronavirus… Il est asymptomatique fort heureusement.
Prédiction draft : fin du 1er tour
Avez-vous déjà souffert du dos ? Si non, demandez à des personnes de votre entourage qui ont connu pareille gêne. Jouer à l’un des sports les plus violents du monde dans ces conditions n’est pas idéal. Caleb Farley sera-t-il remis à temps pour le camp d’entraînement ? Pour le début de saison ? Quid de sa longévité au plus haut niveau. Des questions trop importantes pour être sélectionné au 1er tour. Heureusement pour lui, certaines équipes de la fin du tour sont en cruel manque de cornerback. D’autres n’en ont pas forcément besoin mais peuvent se permettre de lui laisser le temps de se remettre à 100% avant de le lancer dans le grand bain.
Une équipe intéressée : Buffalo Bills
Les Bills sont une équipe complète qui fera partie des favoris au Super Bowl la saison prochaine. Néanmoins, comme tous les concurrents au titre, qui plus est avec une identité défensive, la profondeur aux postes de cornerback et de pass rusher n’est pas un luxe. Tre’Davious White est une superstar, mais Levi Wallace et Taron Johnson sont plus des joueurs de rotation. Des titulaires acceptables le temps que Farley soit opérationnel et prenne les rennes du poste de CB2, mais des joueurs de rotation à terme dans ce qui deviendrait alors le meilleur groupe de defensive backs de la ligue.
Les Bills n’ont pas de besoin criant et peuvent prendre le risque de sélectionner Farley, quitte à ce qu’il ne soit jamais au niveau physique. L’upside pourrait transformer une très bonne défense en escouade référence de la NFL.
La Note du CCS : Tier A
Tier S : All Pro, Tier A : Excellent titulaire, Tier B : Titulaire, Tier C : Joueur de rotation, Tier D : Practice Squad
You can’t coach speed. Les qualités naturelles de Caleb Farley feront saliver n’importe quel coach défensif. En plus d’être véloce, il a le gabarit du cornerback moderne : grand et long. Ce genre d’athlète est courant au poste de receveur, pas tant de l’autre côté du terrain. Farley est agressif à souhait en couverture individuelle et pourrait rivaliser physiquement avec les Julio Jones, A.J. Brown ou autres Allen Robinson.
Avec deux petites années d’expérience au poste, il manque d’instincts et de repères, notamment en couverture en zone. Il n’est pas un produit fini et nécessite un travail de fond pour combler ses lacunes et compléter son jeu. Si ce travail est fait et qu’il parvient à le concrétiser sur le terrain, nous parlerons d’une star, ni plus ni moins. Tout cela est fortement conditionné à sa condition physique qui, pour l’heure, n’inspire pas confiance pour une longue carrière en NFL. Le boom or bust ultime, avec un potentiel infini.