L’annonce a eu l’effet d’une bombe vendredi dernier. Seulement cinq mois après avoir (enfin) prolongé pour la saison 2021, Lewis Hamilton et Mercedes ont annoncé avoir trouvé un accord pour les saisons 2022 et 2023. Si les questions entourant cette prolongation de contrat sont nombreuses, celle concernant le futur coéquipier de l’ancien pilote McLaren le sont tout autant. Deux favoris se dégagent naturellement : l’actuel coéquipier du septuple champion du monde, Valtteri Bottas, et le jeune pouce du giron Mercedes et pilote Williams depuis 2019, George Russell. Alors, qui du Finlandais ou du Britannique parviendra à obtenir le Graal ? Faisons le point sur la situation.
Après le titre de champion du monde de Nico Rosberg en 2016 suivi du départ à la retraite de ce dernier, Mercedes souhaitait apaiser l’équipe et retrouver un peu de sérénité après trois saisons éprouvantes marqués par la rivalité exacerbé entre ses deux pilotes, Nico Rosberg et Lewis Hamilton. Pourtant amis d’enfance, les deux hommes avaient vite mis leur amitié de côté lorsque Hamilton rejoignit Rosberg chez Mercedes en 2013. Au fil des années et des victoires du Britannique, cette rivalité s’aggrava jusqu’à atteindre son paroxysme lors de la saison 2016. Saison durant laquelle les deux coéquipiers d’accrochèrent à plusieurs reprises notamment en Autriche et surtout en Espagne (où les deux partirent dans le bac à gravier après quelques virages au départ).
Valtteri Bottas, le choix de l’apaisement ?
Pour palier au départ de son champion en titre, Mercedes mise donc en 2017 sur Valtteri Bottas. Ce dernier, est à cette époque une valeur sûr du plateau : 4e puis 5e au championnat du monde en 2014 et 2015, 9 podiums à son actif chez Williams et une réputation très positive dans le paddock. Tout cela mit bout à bout font du pilote finlandais un remplaçant légitime au champion du monde allemand.

Cela étant, malgré une première saison prometteuse en 2017 où il finit 3e au championnat du monde – à moins de 60 points de son coéquipier – et où il obtient sa première pole (GP de Bahreïn) et sa première victoire (GP de Russie) en carrière, la suite de son aventure au sein de l’écurie allemande s’avérera bien plus compliquée. En effet, en 2018 il est totalement en dehors du coup pour le titre et termine très loin au championnat (5e), à plus de 150 points (!) de son coéquipier. Pire, il termine derrière les deux Ferrari de Sebastian Vettel et Kimi Raïkkönen ainsi que derrière la Red Bull de Max Verstappen.
En 2019 et 2020, Mercedes, bien aidés par les différents soucis rencontrés par Red Bull et Ferrari, domine outrageusement les débats. Pour autant, le Finlandais ne parvient pas à réduire l’immense écart avec son coéquipier et au contraire, on sent l’ancien pilote Williams incapable de se “révolter” face à l’emprise psychologique mis en place par Lewis Hamilton. Cette saison, les Flèches d’Argent sont mise à mal par les Red Bull de Max Verstappen et Sergio Pérez et hormis un dernier weekend plutôt convaincant de la part de Bottas, on n’a jamais senti le Finlandais en mesure de se battre pour la victoire ou être en position de force face à Hamilton ou Verstappen. Après ses déboires de la saison dernière (notamment en Turquie et à Bahreïn), son crash évitable en début de saison avec… George Russell et son manque de rythme et de performance au global cette saison, l’aventure commune entre Bottas et Mercedes touche-t-elle à sa fin ?
Quoiqu’il arrive, Valtteri Bottas, lui, se sent prêt à accomplir d’autres objectifs si Mercedes ne le prolongeait pas : “S’il s’avérait que je ne vais pas continuer avec Mercedes, bien sûr que j’étudierais d’autres options.” déclarait-il le weekend dernier après la prolongation de Lewis Hamilton. Un indice pour le futur ? Selon les dernières rumeurs, Alfa Romeo et Williams (où il a été pilote de 2013 à 2016) seraient prêtes à lui offrir l’un de leur baquet pour 2022…
George Russell, enfin le bon moment ?
Faisant partie du giron Mercedes depuis 2017, George Russell attend patiemment son heure pour un jour avoir la chance d’obtenir un baquet au sein de l’écurie septuple championne du monde en titre. Chez Williams depuis 2019, Russell démontre toutes ses qualités de pilotages dans une voiture qui n’est clairement pas au niveau pour se battre tous les weekends pour des points.
“J’en tirerai les leçons et je deviendrai plus fort.”
George Russell, après son crash à Imola en 2020.
Pour autant, en deux saisons et demi, le Britannique n’a toujours pas inscrit le moindre point avec l’écurie fondée par Frank Williams, malgré plusieurs occasions en or. Souvent sabordé par sa propre équipe (problème de fiabilité, arrêt trop long dans les stands, etc), Russell a aussi eu sa part de responsabilité, comme lors du GP d’Émilie-Romagne 2020, à Imola, où, alors 10e de la course, il envoie sa voiture dans le muret alors que la course était sous régime de voiture de sécurité. Un événement qui le marquera à jamais comme il l’écrivit peu après sur Instagram : « Je n’oublierai jamais ce jour, cette erreur. J’en tirerai les leçons et je deviendrai plus fort. Je suis tellement désolé, pour toute l’équipe. Je n’ai pas d’excuse. »
“Je pense qu’il aura l’opportunité de monter sur le podium et de se battre pour des victoires à l’avenir, s’il va chez Mercedes.”
Fernando Alonso, après le GP d’Autriche.
En revanche, depuis le début de l’exercice en cours, le pilote Williams est absolument irréprochable. Réussissant l’exploit de se qualifier en Q3 lors du dernier weekend de GP (la première fois avec Williams), le tout en pneus médiums, George Russell prouve, s’il le fallait, qu’il semble déjà être un pilote à part. Nous pouvons également ajouter une superbe 12e place (sans abandon) au GP de France, une course très solide avant son abandon lors du GP de Styrie où il était 8e et près de doubler l’Alpine de Fernando Alonso, sans oublier évidemment sa très belle course lors du dernier Grand Prix, en Autriche, qui l’a vu terminer à la 11e place après une très belle passe d’arme avec ce même Fernando Alonso pour la défense de cette si précieuse 10e place. L’Espagnol s’est d’ailleurs montré très empathique envers son jeune rival après la course : “Ce point, c’était de l’or pour lui comme pour nous, après être partis 14e. C’était chouette. Dans un sens, lorsque j’ai vu que c’était George, je me suis senti un peu triste que cette bataille se déroule contre lui. Je pense qu’il aura l’opportunité de monter sur le podium et de se battre pour des victoires à l’avenir, s’il va chez Mercedes. J’ai pris du plaisir.”
Si l’on additionne tous cela à son très bon weekend la saison dernière avec Mercedes, pour remplacer un Lewis Hamilton souffrant du Covid, tous les feux semblent au vert pour voir débarquer définitivement le natif de King’s Lynn, à l’orée d’une saison 2022 qui s’annonce déjà très importante. Mais il y a un “mais”…
A star is born : retour sur un week-end particulier pour George Russell
En effet, selon Toto Wolf himself le nom du coéquipier de Lewis Hamilton pour 2022 devrait être connu cet été, probablement durant la trêve estival du mois d’août. Mais si la tendance actuelle veut que ce soit George Russell qui débarque du côté de Brackley pour la saison prochaine, un doute subsiste concernant l’avis et la “voix” de Lewis Hamilton dans le choix définitif de son coéquipier, car on le sait, c’est un secret de polichinelle, ce dernier ne souhaite plus revivre de saison comme il a pu le vivre avec Nico Rosberg et serait d’avis de conserver Valtteri Bottas encore quelques saisons. Alors quel sera le choix fait par Mercedes et Toto Wolf ? Le choix de la stabilité absolu avec Valtteri Bottas ou bien le choix du challenge, du futur avec George Russell ?
Peu importe la décision prise par Mercedes, cette dernière est aujourd’hui à la croisée des chemins, entre une saison actuelle où la hiérarchie a (enfin) été mise à mal, un Lewis Hamilton moins souverain, un Valtteri Bottas toujours un peu plus dans le doute et un George Russell qui n’a jamais semblé aussi performant et sûr de lui, l’écurie aux Flèches d’Argent doit réagir et insuffler quelque chose de nouveau au sein de toutes les équipes. Est-ce que cela passera par l’intégration d’un jeune pilote promis à un bel avenir ? Réponse dans quelques semaines.
Crédit photo d’illustration : autoracing.com