« Le football a évolué. L’âge ne veut plus rien dire. » Ismaël Doukouré n’a peut-être pas tout à fait raison, mais il a bien compris que son âge n’était, en tout cas, plus un barrière. Signature pro à 16 ans, premier match en Ligue 2 à 17 ans et convoqué aux JO dans la même année, le Valenciennois avance à vitesse grand V. Peur de rien et faim de tout, voici le dernier volet d’une série en 5 épisodes concentrés sur autant de talents qui peuvent briller durant ces JO. Et dans la décennie à venir, accessoirement.
Épisodes précédents :
Amad Diallo, à la conquête du monde
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Matheus Cunha pour défendre le titre
Dans une poule à sa portée (Japon, Mexique, Afrique du Sud), les Bleus doivent logiquement passer les poules. De quoi redorer le blason d’une nation peu fournie en termes de football olympique. L’écart temporel entre le précédent tournoi des Bleus (1996) et celui de 2020, ajouté au fait que les meilleurs joueurs potentiels ont été bloqués par leurs clubs prouvent un désamour à l’intérieur du triangle France – JO – football. Pourtant, la sélection de Sylvain Ripoll est séduisante. Des expérimentés Savanier et Gignac au tout jeune Doukouré, il y a de quoi se régaler. Mais, à moins que vous ne suiviez régulièrement Valenciennes en L2, vous ne connaissez pas ce défenseur central né en 2003. Laissez-nous vous le présenter.
Hausser son niveau et répondre aux attentes
Passé par le LOSC chez les équipes de jeunes avant de signer au VAFC, Doukouré cumule, à 17 ans, 19 matchs de Ligue 2. Passé pro à l’été 2020, il fait le choix de la continuité en restant dans les Hauts-de-France alors que les clubs Européens étaient déjà à l’affût. « Les convoitises ne datent pas d’aujourd’hui. Avant de signer mon premier contrat professionnel, j’avais déjà des touches concrètes avec des clubs. » confiait-il même au magazine Onze Mondial il y a quelques mois.

L’une des questions d’une progression aussi rapide reste : le joueur est-il capable de se faire violence et de se mettre au niveau ? Et le joueur de VA ne tremble pas : chaque fois qu’une étape doit être franchie, il satisfait toutes les espérances. Comme lorsqu’il a intégré le groupe pro, par exemple : « Le niveau d’exigence n’était pas du tout le même. La vitesse de jeu était 100 fois plus rapide. Je me devais de vite assimiler les consignes pour prétendre à du temps de jeu. » Une fois sur le rectangle vert, cette capacité à capter l’attention et à répondre aux attentes rejaillit d’autant plus. Même pas majeur, il a pourtant été l’un des meilleurs joueurs des Rouge et Blanc cette saison.
« Un milieu relayeur qui joue défenseur central »
La première chose qui rejaillit du jeu de Doukouré reste son apport avec ballon. Dans un football qui demande toujours plus à ses défenseurs centraux, lui surnage et coche toutes les cases. D’abord lorsqu’il reçoit le ballon : son orientation du corps permet de distribuer le jeu, ses premières touches sont de très bonnes qualités, et sa conduite de balle permet souvent de gagner des mètres (une qualité amplement sous-estimée). En plus de cela, il est tout simplement impressionnant dans sa capacité à résister à la pression, sortir de celle-ci et servir un partenaire. Pour Florent Toniutti, Doukouré est « un milieu relayeur qui joue défenseur central ». Une thèse validée par ses compères @Mycki_Boy et Ismaël Haffoud dans le podcast “Shortlist” de Coparena consacré aux jeunes défenseurs de Ligue 2.
Mais s’il est très bon balle au pied, il est surtout bon pour la transmettre. Florent Toniutti encore : « Fort sous pression, fort à la relance. » Son jeu de passes reste d’ailleurs sa plus grande force. Capable d’allonger, de jouer court, mais surtout de casser les lignes, et des deux pieds s’il vous plaît, il est le parfait jeune défenseur central français en ce sens. Tant et si bien que Florent Toniutti soulignait le fait que « sa capacité de relance le rend soluble dans les projets de tous les gros clubs ».
Rester un défenseur
En ayant disputé les 18 dernières minutes du match amical de l’équipe de France olympique, Doukouré peut largement viser un peu de temps de jeu. Mais si son jeu avec ballon est très fort, son jeu sans ballon risque de lui coûter sa place. Rien d’alarmant pour un joueur de 17 ans qui fait face à la concurrence de joueurs plus âgés et établis, mais le volet défensif de son jeu mérite une amélioration notable. Il dépeint lui-même ses qualités comme étant « duels, relance et anticipation », mais on note au visionnage de ses matchs une potentielle amélioration de son jeu défensif. Par exemple, il a tendance à déconnecter et lâcher son marquage en étant un peu aspiré par le ballon. Il peut aussi amplement réduire la distance entre lui-même et le porteur de balle afin de réduire le champ d’action de ce dernier. Enfin, son anticipation est encore perfectible. Bien qu’il ait su lire quelques passes adverses afin de s’imposer dans les airs, il doit apprendre à plus lire les passes au sol, voire à mi-hauteur, et pas forcément en profondeur.
Sa taille légèrement moyenne lui confère une agilité qui pourrait lui permettre de passer devant son vis-à-vis à la réception d’une passe s’il y mettait un peu plus de volonté. En raison de son âge, on peut encore lui voir une évolution physique et notamment musculaire qui lui permettraient de devenir plus dominant dans les duels. Contre des attaquants puissants, il a encore du mal à s’imposer, bien que son jeu aérien comble en partie ses lacunes dans les duels au sol. En revanche, sa grande vitesse couvre beaucoup de ses erreurs. Il rattrape souvent des erreurs de timing ou dans les duels en rattrapant son défenseur et en intervenant “au dernier moment”. Comme on l’a dit : perfectible.
Défenseur droitier moderne de taille moyenne, surclassé et ayant dépanné à droite, le jeune Valenciennois ressemble, de loin, à Jules Koundé. L’évolution de l’ex-Bordelais doit servir d’objectif à viser pour le natif de Lille. En ce sens, le choix de son prochain club sera aussi primordial. Comme son aîné, son investissement et son talent sont salués de tous : « Naturellement, il dégageait quelque chose de plus que les autres. Et puis, c’est un garçon qui est à l’écoute. » souligne Bruno Plumecocq, directeur du centre de formation du VAFC. Et même si, comme le dit @Mycki_Boy, « parfois peut-être prend-il trop de risques », c’est aussi ce qui fait la base de son jeu. Et au fond, je crois qu’on aime ça. À vous de vous faire un avis, et voilà une bonne raison de suivre le tournoi olympique de football. Merci de nous avoir suivi dans cette petite série sur les jeunes talents des JO !