Il est ardu d’implanter une nouvelle franchise professionnelle dans un grand marché qu’est la métropole de Seattle. Néanmoins le Kraken a réussi sa première étape, celle de créer un engouement dans la ville et dans l’état. Entre une arène historique remise à neuf, des maillots magnifiques et une communication exceptionnelle, la nouvelle équipe de la Ligue Nationale de Hockey voit sur le long terme. Retour sur ces dernières semaines capitales.
Une opération “conquête du public” réussie
Cela faisait des mois que dans toute la ville de Seattle il était possible de voir à tous les coins de rue des flyers, affiches, drapeaux « Release the Kraken ». Soutenu par toute une communauté fan de sport en général dans l’état du Washington, la nouvelle franchise de hockey a été accueillie à bras ouverts. Soutien également annoncé des franchises professionnelles de la ville telles que les Seahawks (NFL), les Sounders (MLS), le Storm (WNBA) ou bien les Mariners (MLB).

La Climate Pledge Arena, anciennement KeyArena accueillant l’équipe NBA des Seattle SuperSonics entre 1967 et 2008, est dorénavant la nouvelle maison du hockey à « Emerald City ». Enceinte la plus écologique au monde, elle possède en son sein un mur vivant. Le plus de la venue du Kraken est aussi la construction d’une arène d’entraînement, le Kraken Community Iceplex, comprenant trois patinoires dédiées aux personnes, partisans ou non, curieuses ou motivées à apprendre à patiner, à jouer au hockey ou tout simplement à s’amuser sur la glace. Comprenant déjà un Starbucks à l’intérieur, un projet d’implantation de bar&grills est également prévu avec vue sur la patinoire de l’équipe professionnelle. Tout est fait pour attirer les fans et développer le virus du hockey pour les non-connaisseurs dans la communauté.

Le repêchage d’expansion du 21 juillet a eu lieu laissant entrevoir un effectif intéressant pour cette nouvelle saison. Entre les choix de Mark Giordano, Jamie Oleksiak, Jared McCann, Brandon Tanev ou Yanni Gourde et la signature de, Phillip Grubauer, gardien lauréat au trophée Vézina la saison dernière, le GM Ron Francis a fait un travail très sérieux afin d’être compétitif dès les premiers matchs, en plus d’avoir repêché un espoir du hockey international à la draft en la personne de Matthew Beniers. Ce dernier jouera néanmoins cette saison une nouvelle fois sous les couleurs de son Université du Michigan pour continuer sa progression et se développer sereinement.
Le jour de la présentation des maillots, deux jours plus tard, a été une date clé niveau marketing pour la franchise. Ayant fait venir une partie de ses nouveaux joueurs, le Kraken a reçu une vague de retours positifs pour ce chandail d’un bleu foncé océan et le logo un mix du S de Seattle et la tentacule du Kraken. Le shop online s’est vu être vite débordé lors de la sortie des ventes le 15 septembre dernier pour ces magnifiques maillots, maillot domicile ou bien maillot extérieur. Un premier succès pour l’organisation.
Jour de première officielle à domicile
Deux jours avant le Jour J c’est la légende NBA et entrepreneur Shaquille O’Neal qui se fait remarquer en portant le chandail du Kraken. Ce dernier s’est déplacé sur Seattle pour ouvrir son cinquième restaurant « Big Chicken » dans la Cimate Pledge Arena et déclare : « Je viens de voir la meilleure salle construite du pays, du monde même ». Le Jour J débute par la photo de Cammi Granato au sommet de la Space Needle, tour iconique de la ville, histoire de faire monter en pression l’impatience des fans. C’est la première fois depuis 1919 qu’un match de LNH va avoir lieu à Seattle même, depuis la finale de Coupe Stanley face aux Canadiens de Montréal, à l’époque c’étaient les Metropolitans qui évoluaient sur la glace, mais aujourd’hui on « libère le Kraken » !
Deux heures avant le début de a rencontre des centaines de partisans prennent possession de la Climate Pledge Arena, assistant au warm-up des joueurs, descendant quelques bières dans les bars aux alentours, se restaurant, des avions survolent la métropole, drapeau affichant un grand S, bref c’est un grand jour de première pour la ville de Seattle. Légende de l’équipe locale de baseball des Mariners, la statue d’Edgar Martinez, située devant le T-Mobile Park, l’enceinte de la franchise MLB, est décoré de produits dérivés du Kraken.

Ce jour de match est de plus face aux Canucks de Vancouver, les voisins canadiens et futurs rivaux géographiques, la même équipe qui s’est dressée devant eux lors du tout premier match de pré-saison. Pas moins de 17151 partisans remplissent l’arène, nous sommes à guichets fermés. Les célébrités locales sont présentes pour l’occasion : le quaterback superstar des Seahawks, Russell Wilson est venu avec sa femme et chanteuse Ciara, ses coéquipiers D.K. Metcalf et Bobby Wagner sont présents également tout comme le rappeur Macklemore. La meneuse WNBA du Storm et légende du basket féminin Sue Bird est interviewé au bord de la glace. La hype est à son maximum.
Après avoir sifflé et hué Gary Bettman pendant son discours, comme dans toutes les salles de la ligue d’ailleurs, c’est le président Tod Leiweke qui prend la parole sous les acclamations du public. Il annonce que le numéro 32 est officiellement retiré en l’honneur des 32.000 partisans qui s’étaient inscrits pour une pré-vente des tickets lors du premier jour de la campagne d’expansion. 32 étant également la place d’arrivée du Kraken dans la ligue, étant la 32ème équipe affiliée.

Le match commence et à l’image du bruit assourdissant que font les fans des Seahawks dans le CenturyLink Field, ceux du Kraken ne sont pas en reste. L’ambiance y est électrique. Elle y est encore plus lorsque le défenseur Vince Dunn marque le premier but, le public explose de joie et on entend à peine à la télévision la sirène d’un ancien ferry de l’état du Washington symbolisant un but marqué. C’est ensuite la chanson « Lithium » du groupe Nirvana, les légendes locales, qui se fait entendre pour ce but marqué. L’ambiance est à son paroxysme. Malheureusement Conor Garland viendra doucher les partisans en donnant l’avantage aux Canucks dans le troisième tiers 3-2. Dans un filet désert, Justin Dowling ponctuera le score 4-2 et c’est sur ce score et cette défaite que se termine la toute première rencontre du Kraken de Seattle dans son antre. Le capitaine Mark Giordano regrette le final de la soirée : « [Cette défaite] nous fait vraiment mal parce que l’ambiance a été électrique toute la soirée. Il n’y a pas eu le moindre moment de silence. Nous avions une avance de 2-1 en troisième période et ça fait encore plus mal de perdre de cette façon. On sentait tellement le buzz en ville. Ça deviendra difficile de nous affronter dans cet aréna», l’entraîneur Dave Haskol suivra le discours de son capitaine : «On ne peut pas en demander plus à nos fans. C’était incroyable comme atmosphère. On tenait à les récompenser avec une victoire et ça nous laisse un goût amer».
En terme de communication et marketing, l’organisation du Kraken a réalisé un travail remarquable depuis l’annonce de son arrivée dans la ligue en 2018. Dans un état propice à la ferveur sportive, le hockey de très haut niveau a toute sa place. Dorénavant la balle (le palet) est dans les mains des joueurs afin d’obtenir des résultats. La comparaison avec la venue des Golden Knights de Vegas est tentante mais l’humilité est de rigueur à Seattle. De plus la Division Pacifique semble propice au Kraken pour réussir dès sa première saison une qualification aux séries éliminatoires, de quoi augmenter la hype présente et jouer dessus sur du plus long terme, pour l’instant c’est une seule victoire en six matchs mais cela peut vite changer. Enfin une entrée réussie dans la Ligue Nationale de Hockey serait un grand signe positif et pourrait donner espoir aux fans de basketball qui espèrent depuis 2008 un retour des SuperSonics dans la ville. Affaire à suivre.