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Piastri, la politique d’Alpine en question ?

Sous contrat avec l’Académie Alpine et en bonne posture pour remporter le titre de champion du monde de F2, Oscar Piastri semble pourtant loin d’un potentiel baquet en F1 pour 2022. Analyse d’une situation difficile à gérer pour la firme française.

Piastri devra vraisemblablement patienter avant de piloter en Formule 1, même en cas de titre (photo: drive.com.au)

Oscar Piastri est un pilote qui va vite. Très vite. Un peu trop vite même pour les dirigeants d’Alpine qui n’avaient probablement pas anticipé un tel scénario au départ de cette saison 2021. Si le protégé de Mark Webber s’est imposé en FIA Formule 3 en 2020 face à Théo Pourchaire de seulement 3 petits points, grâce notamment à une écurie qui a su survoler ce championnat, peu s’attendaient à le voir jouer le titre dès sa première année en F2. Au sein de la filière Alpine, on pensait probablement plus voir Guanyu Zhou ou bien Christian Lundgaard jouer les premiers rôles, tandis que les observateurs s’accordaient sur le fait que Robert Schwartzman était le grandissime favori de cette saison de F2. Toujours est-il que le natif de Melbourne a su mettre tout ce beau monde dans ses rétros, s’imposant à 3 reprises et montant 7 fois sur le podium en 17 courses. Malgré cela et ses 36 points d’avance sur son dauphin Guanyu Zhou avant les deux derniers weekends de course, l’avenir d’Oscar Piastri ne semble pas s’inscrire en F1 dans un futur proche.

Le manque dexpérience de Piastri, le principal frein à son arrivée en F1 ?

Le 4 mars 2001, Fernando Alonso, accompagné de Kimi Raikkonen et de Juan Pablo Montoya, faisaient leurs débuts en F1 lors du grand-prix de Melbourne. Un mois et 2 jours plus tard, toujours à Melbourne, Oscar Piastri venait au monde. Autant donc vous dire que le pilote australien est extrêmement jeune et peu expérimenté. S’il a fait ses débuts en monoplace en 2016 dans le championnat de Formula 4 UAE Championship (finissant 6e, en ayant disputé l’intégralité des courses) il n’a couru en championnat du monde que depuis juillet 2020 et le début de la saison de F3. Malgré ses résultats impressionnants, une telle précocité peut faire naître des craintes chez les écuries de F1, surtout lorsqu’on analyse la saison de Tsunoda qui lui aussi n’a disputé qu’une saison de F3 et de F2 avant d’arriver dans la catégorie reine. De plus, du fait du nouveau format du championnat de F2, Piastri n’a connu que 6 weekends de Grand-prix. C’est probablement trop peu pour pouvoir prétendre à une place dans la catégorie supérieure. Cependant, les éloges à destination du prodige australien elles aussi ne se sont pas fait attendre. A commencer par son conseiller Mark Webber, n’hésitant pas à mettre la pression à Alpine à plusieurs reprises concernant la saison prochaine. Des pilotes de F1 ont aussi fait part de leur admiration envers les performances de Piastri, notamment Charles Leclerc : « Quand on voit ce qu’il est occupé à réaliser pour ce qui n’est que sa première année en F2, et qu’il a de réelles chances de décrocher le titre dès sa première saison dans la série, je pense que c’est évident qu’il mérite d’être en Formule 1 »

En F1, une situation plus bouchée que l’accès au Castellet en 2018

Piastri en essais privés avec la RS18, en attendant de rejoindre une écurie de F1 (photo: @OscarPiastri )

La F1 n’est pas en capacité de voir l’arrivée de 3 jeunes nouveaux pilotes chaque année. Si lors des dernières saison on a pu assister à un renouvellement important du plateau, l’heure est aujourd’hui à la stabilité. Depuis le mois d’octobre, il ne reste plus aucun baquet disponible en F1 pour la saison 2022 hormis celui chez Alfa Romeo qui attire évidemment toutes les convoitises. Une situation complexe pour Piastri tant les candidats sont nombreux pour occuper ce dernier siège. De Giovinazzi à Pourchaire en passant par Zhou ou encore Colton Herta, les rumeurs vont bon train chez Alfa, qui ne semble pas pressée pour prendre une décision.

Si au niveau sportif, le choix de prendre Piastri pour la saison prochaine chez Alfa pour épauler Bottas semblerait être une solution logique, dans les faits, on sait que la décision se fait aussi (parfois surtout) au niveau financier. Et à ce niveau-là, le jeune australien n’a pas l’avantage.

Le choix dAlpine pour 2022, celui de sacrifier son académie ?

Oscar Piastri et Guanyu Zhou, respectivement premier et deuxième de la Feature Race à Monza (photo: Formula Motorsport Ltd)

Le 26 aout 2021, Alpine annonçait la prolongation de Fernando Alonso pour une saison, alors qu’Esteban Ocon avait déjà prolongé le 16 juin dernier pour 2024. Un mauvais signal pour les pilotes de l’académie Alpine qui poussent alors pour une place en F1. Ne possédant pas d’écurie « cliente » comme RedBull, Ferrari ou Mercedes pour placer ses pilotes (malgré les rumeurs Williams ou d’un nouvel arrivant en F1), les pilotes de l’académie Alpine se retrouvent « coincés » dans les catégories inférieures ou dans d’autres catégories comme la Formule E. En décidant de ne pas faire confiance aux pilotes de son académie, Alpine compromet donc l’avenir de ses jeunes mais aussi de son académie, qui, en ne permettant pas l’accès en F1, aura probablement à l’avenir des difficultés pour signer les meilleurs espoirs de la discipline. Un choix qui peut tout de même se comprendre tant les objectifs de la firme française ne sont pas au rendez-vous en termes de résultats et de développement de sa monoplace, qui plus est à l’aube de la révolution technique de 2022.

La F1, un train qui passe rarement 2 fois

Le problème pour Oscar Piastri, comme pour Guanyu Zhou par ailleurs, réside dans le fait que le règlement de la Formule 2 ne permet pas aux champions en titre de défendre leur couronne. Dans le cas ou le baquet restant chez Alfa ne leur reviendrait pas, peu de solutions s’offriraient alors à eux. Dès lors, on peut s’interroger sur la politique de jeune de la firme française qui, bien qu’en public se félicite d’avoir autant de pilotes aussi talentueux, s’apparente pour le moment à un gâchis industriel monumental. Bien que la F1 ne soit pas la seule catégorie digne de ce nom en sport automobile, l’objectif initial de l’académie est de former des futurs pilotes de Formule 1, et non pas des pilotes d’Endurance, d’Indycar ou encore de Formula E. S’il est difficile d’imaginer que Piastri ne connaisse jamais la Formule 1 en tant que pilote, nul doute qu’Alpine tirera les enseignements de cette situation inédite pour eux, sous peine de voir sa réputation s’amenuir encore un peu plus.

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