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[INTERVIEW] Benjamin Plu : “Je me donne toujours à fond et j’essaye d’apporter ce que je peux à l’équipe”

La semaine dernière, le CCS a eu l’occasion d’entrer dans l’intimité de l’équipe de France de football américain. En stage à Wattignies dans le Nord, les bleus nous ont ouvert leurs portes durant la préparation de la petite finale du Championnat d’Europe contre la Finlande (défaite 6-14 le 30 octobre dernier). Nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Benjamin Plu, notamment passé par la CFL et le championnat finlandais. Equipe de France, ambitions et style de jeu, le receveur s’est livré sans secrets.

Benjamin Plu, un parcours haut en couleurs.

Benjamin, peux-tu nous parler de ton parcours dans le football américain ?

Je joue maintenant depuis onze ans. J’ai débuté en seconde, j’avais un ami qui jouait déjà qui m’a proposé d’aller aux entrainements. J’ai tout de suite accroché et je me suis dit que l’année prochaine je m’y mettais à fond, la saison étant déjà entamée. J’ai donc fait les tests que j’ai réussi, pour entrer dans la « section sportive » du lycée Gabriel Touchard au Mans, l’encadrement était vraiment intéressant, les cours étaient adaptés avec la musculation et les entrainements terrains. A la fin de cette année, j’ai été sélectionné en équipe de France junior avec qui j’ai participé au Championnat d’Europe, on a terminé vice-champion puis je suis rentré au Mans pour terminer mes études. Avant de tenter ma chance au Canada, j’ai pris la décision de termine ma licence en France. Par la suite, j’ai eu la chance d’intégrer l’université McGill au Canada, cela s’est fait avec un coach du Mans qui avait des contacts, on a envoyé des vidéos qui ont plu et j’ai eu l’occasion de me rendre au camp d’entrainement.

Au bout de deux matchs de préparation, j’étais partant. J’ai enchainé plusieurs matchs avant un certain coup d’arrêt, je suis passé remplaçant. Je pense que l’adaptation a joué, ce n’était pas si facile de s’adapter dans le cadre d’une première année. Au camp d’entrainement suivant, celui de Printemps, je me suis blessé à l’épaule. Je suis rentré en France pour me faire opérer et finalement je ne suis pas reparti. McGill est une superbe expérience pour moi mais à ce moment-là je me suis interrogé sur la suite de ma carrière dans le football américain. Après une opération qui s’est bien passée et une bonne rééducation, j’ai pris la décision de reprendre en France avec les Black Panthers de Thonon-les-Bains avec qui j’ai été vice-champion de France. L’année d’après j’ai re-signé là-bas et avec une grosse préparation, on a été chercher le titre. J’avais bien récupéré de mon épaule ce qui m’a permis d’être MVP de la finale ce qui était une belle récompense. C’est à la fin de cette année que j’ai été drafté en CFL, par les BC Lions. Après deux saisons tronquées par le COVID, je suis rentré cette saison en Europe, au Seinäjoki Crocodiles en Finlande.

Peux-tu nous décrire comment s’est passé le « processus draft » en CFL pour toi ?

L’année où j’ai été sélectionné, la CFL avait mis en place le statut de global player. Tu as donc le joueur canadien et le joueur américain qui sont déjà dans la ligue et ils ont rajouté ce nouveau statut. Finalement, il s’agit d’un statut particulier, il y avait trois places réservées sur le practice squad et une ou deux places sur le roster principal. L’année où je suis passé dans ce processus, nous étions quatre français et les quatre ont été sélectionnés. On avait fait le combine ensemble et même si on était des concurrents, on s’est serré les coudes et on a fait ça comme il fallait. Il y avait un seul tour avec neuf équipes, j’ai été sélectionné septième. C’était assez stressant comme j’étais le dernier français et surtout, au moment de ma sélection, le tracker sur internet a eu un problème et ça ne voulait pas s’afficher (rires). C’était une réelle satisfaction d’autant plus qu’on avait été prévenu seulement un mois et demi avant le combine. Nous étions alors en pleine saison donc physiquement c’était assez compliqué mais on avait le foot dans les jambes ce qui nous a permis de performer dans certains domaines.

La sélection de Benjamin Plu par les BC Lions en 2019.

Concernant ta saison en Finlande, tu étais professionnel ?

En fait j’ai un permis de travail donc c’est un contrat « pro », tu es nourri, payé et logé donc oui c’est un contrat. Il se terminait à la fin de la saison, ce n’était qu’un an. Pour le moment je ne sais pas trop ce qui va suivre, je me suis concentré sur l’équipe de France avec le camp qui arrivait, je vais voir tout ce qui se passe après car c’est aussi fatiguant de sortir de la saison avec un camp en suivant, c’est assez physique. Concernant les opportunités, le niveau dans l’European League of Football est intéressant, il y a eu un beau rendu. La visibilité était vraiment pas mal et je pense qu’il y avait quand même le top des joueurs européens dedans. Ça pourrait être une expérience intéressante. Sinon je suis toujours dans les listes pour retourner au Canada, en tout cas je travaille toujours pour ça.

Pour se recentrer sur la sélection, avec des stages assez courts, comment on s’approprie le playbook ?

(il réfléchit), C’est quand même l’équipe de France. Même si on a quelques jeunes avec nous, les gars ont de l’expérience et soit ils ont déjà été sélectionné ou soit ils jouent à un très haut niveau donc tout le monde est capable d’intégrer les consignes. Après, on est là pour ça, on a trois réunions par jour matin, midi et soir donc il faut être très concentré. On s’entraide quand ça ne marche pas mais ça roule pas mal, le retour du staff est intéressant.

Comment considères-tu ton rôle au sein du groupe au vu de ton parcours et ton expérience ?

Je suis toujours quelqu’un de discret, je parle avec tout le monde mais je ne suis pas le genre de personne à parler à voix haute de mon parcours professionnel en permanence. Quand des gars veulent en parler, il n’y a aucun soucis on en parle sinon je reste cool. Je me donne toujours à fond et j’essaye d’apporter ce que je peux à l’équipe avec mes capacités ainsi que mon expérience. Si un gars est meilleur que moi il me passera devant. L’objectif ici est de gagner donc on se tire vers le haut et franchement ce camp se passe très bien.

Vous avez eu de la matière pour étudier cette équipe de Finlande ?

Oui clairement, on a les vidéos de leurs derniers matchs, c’est filmé donc on y a accès. On a notamment celui contre la Suède puis ceux des années passées. Ce sont des équipes qui évoluent, comme la notre d’ailleurs mais le système demeure d’une certaine manière.

Quel est le style de votre équipe de France ?

Il est très varié. Honnêtement, on a de la course et de la passe. L’escouade aérienne est très rapide donc on peut s’appuyer dessus pour obtenir des gros gains. On a également des running back très physiques qui peuvent faire mal au sol. On sait que les finlandais sont costauds au niveau de la ligne mais on a les capacités pour les mettre en difficulté. Notre défense est également très rapide. En général, la vitesse est quand même notre principale qualité.

Une escouade de receveurs très rapide pour cette petite finale en Finlande. Source : fffa.org

Et toi, plus personnellement, de quelle manière caractérises-tu ta façon de jouer ?

Je suis également axé sur la vitesse. Ma taille est également un avantage. Je préfère utiliser ma vitesse pour ne pas que ma force me joue des tours, si j’essaye de sortir du bloc en force, si le gars me bump, ça me sort de mon tracé. Je joue donc sur cette rapidité, enlever les mains et puis après les ballons arrivent. L’avantage que j’ai en étant assez grand est qu’on peut mettre les balles dans les airs et je m’adapte. Par exemple, les finlandais ne sont pas très grands en défense donc ça peut être une chance pour moi.

As-tu un receveur en NFL qui t’inspire ou t’a inspiré ?

Quand j’ai débuté le football, je regardais beaucoup A.J Green qui jouait pour les Bengals à l’époque. Je l’affectionne car lui aussi est grand, assez maigre et je me trouvais certaines similitudes avec lui. Il m’a quand même inspiré.

Si tu devais choisir un tracé que tu affectionnes particulièrement ?

J’aime beaucoup les tracés profonds avec un changement de direction. Les tracés en profondeur me plaisent beaucoup car je peux utiliser ma vitesse sur une longue distance même si je reste à l’aise en quick.

Sur quelle partie technique accentues-tu le plus ton travail ?

La sortie de press, toujours. Car si tu ne sors pas de la pression, on peut t’oublier sur le terrain. C’est mort, le quarterback regarde ailleurs. Le timing est très important que ce soit ici en Europe ou en Amérique du Nord.

Enfin, sans vouloir dérober tous tes secrets, comment ajustes-tu les lectures pré-snap ou comment réagis-tu pendant l’action ?

Déjà, je regarde le nombre de défenseurs qu’il y a dans le champ profond, je regarde le cornerback en face de moi ainsi que le joueur à mon intérieur. Si le gars est en face de toi et qu’il te press, tu peux être sûr que tu es en man, s’il se recule, tu peux te dire que ça va être de la « 2 » et quand il est dans le champ profond avec un safety, ça peut être de la « 3 ». Après il y a toujours des cover masquées, j’essaye donc toujours de regarder le nombre de défenseurs pour ajuster mon tracé. C’est aussi des automatismes qu’on a, les défenseurs ne peuvent pas avoir cinquante réactions différentes.

Le Café Crème Sport remercie Benjamin pour sa franchise et sa bonne humeur durant toute l’interview. En lui souhaitant une bonne continuation dans sa carrière en Europe ou de l’autre côté de l’Atlantique !

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