La Formule 1 est la quête d’un summer body. D’habitude effectué quelque peu avant l’été, dans le but d’avoir la meilleure ligne possible, les monoplaces à plus de 1000 chevaux, elles, refont leurs lignes cet hiver. L’objectif : entrer dans une nouvelle ère en 2022, destinée à favoriser le spectacle, le combat rapproché et remettre à 0 les écarts entre écuries.
Si le monde de la Formule 1 et du sport automobile s’est habitué, depuis 2017 à la morphologie des monoplaces, il est temps de faire table rase de ces souvenirs. Fini, les larges voitures prenant la moitié de la piste, les pneus de 13 pouces, l’impossibilité de suivre la monoplace devant. En 2022, tout change !
Pourquoi changer d’ère ?
Une tradition renouvelée
Qui dit sport automobile dit évolution et avancées technologiques. De ce fait, chaque nouvelle technologique entraîne à un remodelement des monoplaces. Dans l’histoire de la Formule 1, les changements d’ères et de technologies sont ancrés dans la tradition. La création d’un châssis monocoque en aluminium en 1962, la suspension active de Lotus et Senna en 1987, ou encore la baisse de cylindrée, passant d’un V10 à un V8 en 2006 démontrant les évolutions technologiques.

La plus récente d’entre elles, en 2014, a supprimé les V8 de nos chères F1 pour les troquer contre des nouveaux moteurs V6 hybrides. Cette évolution technologique a donc vu naître la domination que l’on connaît de Mercedes, remportant les 8 titres consécutifs qui ont suivi cette évolution. C’est un fait, chaque nouvelle ère offre une domination presque totale à l’écurie qui aura trouvé le supplément technologique nécessaire afin d’être au sommet du classement. Reste à savoir qui sera le plus malin pour la nouvelle ère qui arrive.
Un seuil de performance atteint
Comme lors de chaque nouvelle ère, une ou deux écuries sortent du lot. Dès lors, leur domination en début d’ère est considérable, et tant à se réduire petit à petit au fur et à mesure des années. L’exemple le plus récent, c’est le resserrement de l’écart entre Mercedes et le reste de la grille, d’abord en 2018, puis à nouveau en 2021, pour la fin de cette ère dite « hybride ». Le plafond est atteint, il devient difficile d’améliorer les performances des monoplaces.
“Tout est prêt pour un succès futur. La réglementation 2022 va être une étape, mais certainement pas la dernière. Je pense que nous avons une longue trajectoire de succès devant nous. Je suis très optimiste.”
Greg Maffei, PDG de Liberty Media voit très grand pour le futur de la Formule 1
Dès lors, lorsque ce plafond semble atteint, il convient d’instaurer de nouvelles réglementations, pour repousser les limites. L’arrivée de Liberty Media et d’un nouveau public en Formule 1 nécessite de fidéliser ces derniers, et pour cela, du spectacle doit s’instaurer. La précédente ère, favorisant une surdomination de Mercedes, ne permettait pas de proposer au public de l’action, selon Liberty Media, et il fallait donc y remédier.
Détruire les écarts créés
Si la nouvelle communauté de la Formule 1 a découvert cette discipline via la série Netflix, elle ne connaît donc pas les belles épopées de Williams ou McLaren. L’arrivée d’une nouvelle ère permet ainsi de proposer une nouvelle écurie au top, de « mixer » les écarts et les forces en présence sur le plateau. Il serait dès lors possible de permettre à Alfa Roméo ou Haas de venir truster les podiums, ou encore retrouver Red Bull en retrait, en raison de sa folle saison 2021.

De plus, pour permettre une plus grande équité entre les écuries, un budget capé et une marge de développement a été mis en place. Ces derniers supposent donc que les écuries classées dernières lors des précédentes saisons possèdent plus de temps que les écuries de premier plan, afin de développer leur monoplace 2022. De même, un plafond budgétaire a été instauré, obligeant les écuries à ne pas dépasser 175 millions d’euros pour le développement de la monoplace 2022. L’objectif est donc simple, resserrer les écarts et réduire au maximum les avantages des grosses équipes.
Comment sera 2022 pour la Formule 1 ?
Un carburant plus “vert”
La Formule 1 se met également au vert. L’arrivé de 10% de bio carburant viendra alimenter les moteurs, inchangés, des voitures les plus puissantes au monde. L’objectif, arriver à des moteurs 100% durables en 2025. L’idée consiste alors à proposer un mélange E10, composé à 90% de combustible fossile, pour 10% d’éthanol renouvelable. Cette révolution vient donc en réponse face aux critiques selon lesquelles la Formule 1 ne cherche pas à améliorer son empreinte écologique.

Mais l’arrivée d’une énergie plus renouvelable, comme tout changement, a un prix. Ici, cela correspond à une perte supposée de 20cv sur les moteurs des monoplaces. Les constructeurs comme Mercedes ou Alpine ne semblent guère impactés par cette modification, à la différence de Ferrari, qui a passé beaucoup de temps afin de recoller au niveau de performance des autres manufacturiers. De plus, il convient de ne pas rater son développement, car le gel des moteurs dès 2022 ne permettra pas de modifier en cours de saison, et ainsi éviter une saison en enfer.
Des pneus neufs en 2022
Quand la Formule 1 parle de révolution, elle ne fait pas les choses à moitié ! Pirelli a donc la lourde tâche d’instaurer de nouvelles gommes, plus grandes, plus endurantes, en bref, qui doivent supporter et accompagner les nouvelles monoplaces 2022. Instaurés depuis 1980, les pneus 13 pouces laisseront donc place à des pneus 18 pouces, déjà testés depuis 2020 en F2, afin de se rapprocher des pneus de route classique. Cependant, ce changement de taille laisse ainsi place à de grands doutes, ainsi que du pessimisme chez les pilotes.


Plus grands, avec un nouvel enjoliveur, ces pneus 18 pouces sont encore nouveaux pour les pilotes, qui, malgré des tests à la fin de la saison 2021, n’en savent encore que très peu sur le comportement de ces pneus. Structurellement, ces nouveaux pneumatiques permettent de conserver une paroi latérale plus ferme qui permet au pneu de conserver une structure plus rigide. Ainsi, l’objectif est de proposer une gomme qui dure, qui ne se détériore pas, offrant donc un maximum de spectacle et de pilotes qui peuvent se suivre sans détruire leurs pneus.
Une nouvelle philosophie: L’effet de sol
La plus grosse évolution qu’il sera toutefois possible de voir d’ici 2022, c’est l’aérodynamisme des voitures. Exit, les petites ailettes et les fioritures pour gagner de l’appui, l’an prochain, tout sera plus simplifié, grâce à l’effet de sol. Le principe repose sur l’idée que la voiture est plaquée au sol par une succion avec une traînée bien moindre qu’avec un aileron. Deux canaux, un de chaque côté du pilote, permettront de générer cet effet de sol. Il y a aura donc deux entrées proéminentes au niveau des pontons, qui alimenteront les canaux. Ceux-ci amèneront le flux d’air jusqu’au diffuseur.

Cet effet de sol suppose donc un aileron avant agrandi, qui couvre désormais l’intégralité du plancher autour d’un nez plat, comme l’agrandissement du fond plat dans l’optique d’augmenter l’appui de la monoplace. L’aileron arrière, quant à lui, rejettera le flux d’air suffisamment haut pour limiter cet « air sale » que subit le poursuivant au maximum. Cela signifie qu’il ne faut pas envoyer le sillage de l’air vers l’extérieur, comme c’est le cas sur les voitures actuelles, ni le laisser se déverser sous le plancher et être ingéré par le diffuseur, mais le diriger le plus possible vers le côté de la voiture.
À quoi s’attendre pour 2022 ?
Une incertitude dans les performances
La première des choses auxquelles il faudra s’attendre pour 2022, c’est avant tout de l’incertitude dans les performances. En effet, la victoire reviendra au plus malin et à celui qui a le mieux travaillé sur la nouvelle réglementation. Cette philosophie de l’effet de sol, encore relativement « nouvelle » en Formule 1, n’avait encore jamais été domptée ou utilisée sous l’ère moderne, il reste donc à se demander ce qu’il ressortira de ces nouvelles monoplaces.
“Les nouvelles F1 seront vraiment quelques secondes plus lentes, mais bien sûr c’est avec l’idée d’avoir un meilleur spectacle. […] La motricité générale semble être un peu différente à la sortie des virages. Les pneus sont totalement différents, oui, donc bien sûr j’aurai à adapter mon style de pilotage.”
Max Verstappen, sur la nouvelle réglementation et les pneus après les essais de fin de saison à Abu Dhabi en 2021.
Sur le plan du travail et du sérieux, il semblerait que Mercedes et Ferrari soit aux avants postes. Les deuxièmes cités se sont focalisés sur cette nouvelle réglementation depuis leur échec de 2020 et souhaitent au plus vite retrouver les sommets. Mercedes, quant à eux, ont avoué en fin de saison leur délaissement de développement en 2021 pour également se concentrer sur 2022. Finalement, il semblerait que seul Red Bull aurait tout investi afin de permettre à son pilote, Max Verstappen, de conquérir son titre mondial.
Des voitures qui se suivent
L’inconvénient majeur de la génération actuelle des monoplaces résidait dans leur incapacité à se suivre. En effet, sous l’écart de la seconde, il devenait impossible pour un poursuivant de rester dans le sillage de la monoplace qui le devançait. « L’air sale » dégagé par la monoplace venant contrarier les appuis aérodynamiques de la voiture la poursuivant. C’est d’ailleurs pour contrer ces difficultés majeures que l’effet de sol s’est vu apparaître dans les pensées pour la nouvelle ère.

2022 promet donc du spectacle, des voitures qui se suivent et donc, par analogie, de belles batailles en piste. Le DRS, toujours d’actualité, pourrait ne plus être utilisé, la capacité des monoplaces à se suivre négligeant cette technologie si décriée. De plus, les nouveaux pneus favoriseraient une meilleure adhérence, et malgré une couche inférieure de gomme, une meilleure résistance et moins de dégradation. L’ajout de 8 courses à qualification sprint, en supplément d’un calendrier alourdi de 23 Grands Prix, venant accentuer cette sensation que ce rêve de se suivre serait possible.
La promesse d’un beau spectacle en 2022
Il semblerait donc que la nouvelle ère de la Formule 1 met les bouchées double afin de proposer un spectacle à ses amateurs et passionnés. L’arrivée d’une nouvelle philosophie, couplée aux limitations et aux innovations pourrait permettre d’accéder à un nouvel âge d’or de la Formule 1. Sa plus grande médiatisation, son nouveau public obligeant le sport à se renouveler, cela peut donc sembler compréhensible qu’on arrive à cette révolution, malgré une saison 2021 folle et passionnante.
Si certains regrettent donc la fin de l’ère hybride, qui avait pourtant mal débuté en 2014 pour au final offrir une des plus belles saisons de l’histoire de la Formule 1 en 2021, il faut conserver de l’optimisme pour 2022. Tout porte à croire que la nouvelle ère dans laquelle s’engouffre la Formule 1 sera celle du spectacle. Que ce soit par la conception, l’innovation ou encore le talent des pilotes, il ne reste plus qu’à patienter jusqu’au 20 mars, à 16h, pour découvrir ce que valent ces nouvelles monoplaces et cette nouvelle ère.