Rugby

Les pépites anglaises [3/9] : Joe Marchant, Louis Lynagh et Ollie Sleightholme, les arrières à l’avenir prometteur

Eddie Jones entre dans le dernier cycle de son aventure au sein du XV de la Rose. Il l’a annoncé au cours du mois de septembre, la Coupe du monde 2023 sera sa dernière en tant que sélectionneur de l’équipe anglaise. Pour se donner les chances de faire mieux qu’en 2019, Eddie Jones a annoncé vouloir rajeunir son groupe et y incorporer les jeunes pépites qui ne cessent d’impressionner au sein de la Premiership. Pour cette occasion, la rédaction du CCS vous propose de découvrir ces joueurs à travers différents articles. Aujourd’hui trois nouveaux arrières. Trois jeunes joueurs qui rêvent de suivre les traces de leurs ainés. 

Joe Marchant, le centre à l’expérience du Super Rugby

Joe Marchant est celui qui a le plus d’expérience dans cette nouvelle génération anglaise des Harlequins. Il faut dire que le centre a enfilé la tunique londonienne pour la première fois en 2016. Expérimenté de plusieurs saisons en Premiership et en Super Rugby, il est aujourd’hui l’un des meilleurs à son poste outre-Manche. Il est un élément important dans le dispositif des Quins et sa polyvalence permet à ses entraîneurs de s’adapter aux adversaires. Il n’est pas rare de voir Joe Marchant être positionné à l’aile pour apporter plus de jeu et de disponibilités. Cette capacité à occuper plusieurs postes lui vient de sa formation : « J’ai joué dans beaucoup de postes sur la ligne de fond, même en talonneur et en flanker, mais je suis le plus heureux au centre et un peu en demi d’ouverture donc je pense que je vais bientôt me contenter de l’un des deux postes dans un futur proche. » Habitué à jouer à tous les postes dans ses jeunes années, il accepte de dépanner en cas de blessures ou pour des raisons tactiques.

Ses capacités techniques lui viennent aussi du rugby à 7 où il a eu l’occasion de jouer avec les Quins. À peine âgé de 18 ans, il dispute la Premiership Rugby Seven Séries de 2014. Il s’incline en demi-finale contre l’équipe des Dragons de Newport. Une petite déception de perdre dans le stade de son club mais une première expérience enrichissante pour l’un des joueurs les plus attendus sur les lignes arrière de l’équipe londonienne.

Si Joe Marchant est arrivé jusque-là, c’est grâce à son éthique de travail. Il faut dire que le jeune centre anglais à de qui tenir. Il est le fils de Mike Marchant, directeur du rugby pour le collège Peter Symonds de Winchester. Un entraineur qui a eu sous ordres un certain Mike Brown, arrière de légende des Quins. C’est donc dans ce collège que Marchant a fait ses classes : « J’ai commencé à jouer pour les U7 à Winchester jusqu’aux Colts, puis j’ai rejoint l’Académie de Quins et j’ai joué pour Peter Symonds College et Hampshire. » Il a alors allié les deux, jouant aussi en A-League avec les Quins alors qu’il n’a que 17 ans : « L’année dernière a été ma meilleure saison jusqu’à présent où j’étais capitaine à la fois de mon collège et des Quins. J’ai également joué les six matchs de la A-League la saison dernière, ce qui était bien et j’ai même marqué quatre essais. » Une maturité certaine qui lui permet aussi de jouer avec les différentes équipes jeunes anglaises. Il remporte avec les U20 le Tournoi des VI nations 2015 mais aussi la Coupe du monde juniors en 2016.

Ses performances attirent rapidement l’équipe sénior des Harlequins. Il dispute son premier lors de la saison 2014/2015 alors qu’il n’a pas encore 19 ans. Une première qui en appelle d’autres. La saison suivante, il dispute 7 nouveaux matchs dont 3 en tant que titulaire et inscrit un essai. L’année suivante, il découvre une nouvelle compétition avec la Challenge Cup. Il est le titulaire au poste de centre et inscrit même deux essais. C’est aussi lors de cette saison qu’il devient le titulaire en Premiership. Il montre toutes ses qualités de marqueur d’essais avec 8 réalisations. Trois premières saisons déjà bien remplies où il fait partie des jeunes stars à suivre outre-Manche. Il attire rapidement l’œil d’un certain Eddie Jones. Malheureusement pour lui, une blessure l’empêche de participer à la tournée d’été prévue en Argentine. Ce n’est que partie remise pour Joe Marchant qui signe un nouveau contrat avec les Quins durant l’été après cette première saison saluée par les observateurs. Il est nommé joueur de la saison par les supporters, récompensant ses très bonnes performances. Il continue sur sa lancée l’année suivante même si les Quins sont plus en difficultés avec un cycle qui approche de la fin. Il découvre la Champions Cup où il est une nouvelle fois titulaire. Il inscrit même un premier essai lors de son premier match.

Joe Marchant contre Bath. (dailyecho.co.uk)

Joe Marchant se montre à son aise avec cette capacité à accélérer en attaque et se proposer pour essayer de casser les lignes. Il est aussi à l’aise défensivement où il est fort sur homme et ne subit que très peu les contacts. Cela peut s’expliquer par ses talents au karaté où il est ceinture noir. Il est aussi très rapide, le centre ayant aussi pratiqué l’athlétisme : « J’étais très sportif quand j’étais enfant. Je suis juste content que mes parents m’aient laissé m’essayer à tout et n’importe quoi […]. J’ai arrêté la gymnastique et le karaté lors de ma dernière année à l’école, mais je lance toujours le disque ici et là. Je suis maintenant pleinement engagé dans le rugby » (Joe Marchant à The Rugby Paper).

Un joueur qui ne se cache pas sur les offensives adverses et qui n’hésite pas à donner de sa personne pour les arrêter. Centre très rapide malgré son physique imposant, il est redoutable sur les lancements de jeu de son équipe. Il se propose très souvent pour conclure sur les percées de ses coéquipiers comme en témoigne sa saison 2018/2019 où il inscrit 14 essais dont 11 en Premiership. C’est son meilleur total jusqu’à aujourd’hui et cette très bonne campagne est récompensée par une convocation pour faire partie du groupe préparant la Coupe du monde. Malheureusement pour lui, il n’est pas conservé par Eddie Jones dans le groupe des 31. Une petite déception pour Joe Marchant qui a quand même connu ses premières sélections lors de cette préparation avec même une titularisation contre l’Italie où il inscrit son premier essai international. Il sort tout de même d’une saison impressionnante avec un rôle de leader de plus en plus affirmé au sein de l’équipe londonienne : « Nul doute que Joe a connu sa meilleure saison l’année dernière, il était le meilleur n°13 de la compétition » (Paul Gustard, ancien entraîneur des Quins).  

Tous les essais inscrits par Joe Marchant avant son prêt chez les Blues.

Pour lui montrer toute la confiance qu’ils placent en lui, les dirigeants des Quins lui offrent un nouveau contrat jusqu’en 2023. Cette prolongation comprend un prêt convenu en Super Rugby aux Blues. Une volonté de la part du joueur : « En tant que jeune, je regarderais le Super Rugby tout le temps et je voulais en faire partie. Étant donné la configuration anglaise, vous voulez évidemment jouer en Premiership et vous voulez jouer pour l’Angleterre. C’étaient les rêves. Mais à côté, il y en avait un autre à venir ici. L’opportunité s’est présentée, j’ai parlé aux Quins qui m’ont vraiment soutenu et ont pensé que cela développerait aussi mon rugby. Nous avons tous embarqué et nous nous sommes retrouvés ici, ce qui est super. » Une opportunité à saisir pour découvrir une autre façon de jouer et tenter d’améliorer son jeu. C’est au cours de ce voyage que le centre est replacé à l’aile pour certains matchs. Il dispute son premier sur l’aile lors d’un voyage en Afrique du Sud contre les Stormers. Il inscrit deux essais. Deux réalisations de pur finisseur où il vient se porter au soutien pour conclure grâce à sa vitesse. Une nouvelle manière de jouer interrompue par la pandémie. Il a eu l’occasion de jouer un dernier match avant la fin du prêt convenu le 1er juillet. Une expérience enrichissante pour le centre qui a eu l’occasion de jouer sur l’aile.

Il revient avec une nouvelle vision de jeu. Il confirme que ce voyage a été difficile d’un point de vue tactique avec des différences flagrantes dans la manière de jouer : « J’espérais pouvoir venir ici et apporter la défense comme une grande partie de mon jeu, mais je ne peux tout simplement pas me préparer rapidement, j’essaie de revenir que le ballon est déjà parti. Mes statistiques de plaquages ont beaucoup baissé et j’ai trouvé cela beaucoup plus difficile » (Joe Marchant au Podcast Rugby Union Weekly de la BBC). Il a dû s’adapter à la densité de jeu de l’hémisphère Sud plutôt porter vers l’attaque et avec très peu d’interruptions. À son retour, il dispute la fin de la saison de Premiership interrompue et montre les progrès accumulés lors de ce prêt. Il retrouve aussi cette jeune génération des Quins fortement attendue avec Marcus Smith, Alex Dombrandt. Il devient l’un des cadres et l’un des plus expérimentés avec Mike Brown. Il continue à faire partie des joueurs convoqués par Jones lors de l’Autumn Nations Cup même s’il n’a l’occasion de jouer que contre la Géorgie. Au cours de la saison de Premiership, il continue à être un véritable détonateur et son nouveau duo avec André Esterhuizen est le fer de lance de cette équipe. Les deux sont difficiles à bouger en défense et ils combinent parfaitement en attaque. Leur complémentarité avec la vitesse de Marchant et la puissance du centre sud-africain rend la tâche difficile aux défenses anglaises.

Dans une saison impressionnante, Joe Marchant découvre le Tournoi des VI nations contre l’Irlande. Une juste récompense qui montre que Jones compte sur lui dans un XV de la Rose en pleine transition. Avec les Quins, il remporte son premier championnat dans l’une des équipes les plus prolifiques. Il fait partie de cette jeune garde anglaise tournée vers un jeu plus offensif et Joe Marchant est l’une des têtes d’affiche. Il offre de nombreuses opportunités à ses coachs avec une possibilité de le décaler à l’aile. Cette polyvalence est utilisée par son club mais aussi par Eddie Jones qui crée la surprise lors du dernier match d’automne contre l’Afrique du Sud en le repositionnant à l’aile. Il n’a pas eu l’occasion de se montrer beaucoup à ce poste avec la blessure de Tuilagi en début de match, forçant les sélectionneur australien à le remettre au centre. Mais son match a été excellent. Alors que l’Angleterre est menée, il profite du trou laissé dans la défense pour accélérer. Rapide, il se présente face à Jesse Kriel avec Quirke à ses côtés. Il n’a plus qu’à décaler son jeune coéquipier qui inscrit un essai dans une ambiance de folie. Pour sa première titularisation, Joe Marchant et le XV de la Rose l’emportent et terminent invaincus dans cette tournée.

Cette capacité à prendre de la vitesse et décaler son ailier ou le joueur à côté de lui est propre à Marchant. Il essaye toujours de trouver un coéquipier à ses côtés même s’il se trouve le long de la ligne de touche. Il n’est pas étonnant de voir Murley ou Lynagh récupérer une passe de Marchant situé à une dizaine de mètres d’eux. Un geste qu’il a travaillé lors de son expérience en Super Rugby : « En Afrique du Sud, les équipes doivent défendre en largeur parce que vous pouvez sortir le ballon si rapidement, ce qui signifie qu’il s’agit souvent de collisions individuelles. À cet égard, si vous pouvez utiliser un peu plus votre jeu de jambes, votre jeu d’offloading entre d’avantage en jeu. Cela teste ma capacité à passer à plein régime en terme de passes de 15 à 20 mètres » (Joe Marchant au Daily Mail).

Un véritable distributeur grâce à son expérience dans l’hémisphère sud, lui permettant d’être encore plus complet. C’est cette recherche de la perfection qui en fait un joueur apprécié. Ses entraîneurs lui reconnaissent cette qualité : « Je n’ai pas eu beaucoup d’expérience avec Joe avant qu’il ne parte en Nouvelle-Zélande. Depuis qu’il est arrivé, j’ai été tellement impressionné à quel point est un bon athlète, à quel point il se déplace bien sur le terrain en attaque et en défense. Je me souviens avoir parlé à Graham Rowntree avant de venir où il m’a juste dit que ce gars est un travailleur très dur, une très, très bonne personne aussi. Il est vraiment bon pour la culture du club et il a un énorme potentiel » (Jerry Flannery, entraîneur de la touche des Quins). Des compliments d’anciens joueurs reconnus mais aussi de son sélectionneur avec cette vidéo où on le voit proche du centre anglais. Joe Marchant est la passerelle entre l’ancienne génération des Quins et la nouvelle. Il a connu les périodes plus compliquées et il peut être considéré comme un grand frère pour tous les jeunes.

Une reconnaissance méritée pour celui qui a gravi les échelons petit à petit avec précocité. À 25 ans, il est reconnu comme l’un des meilleurs à son poste et il compte bien récupérer une place de titulaire dans ce XV de la Rose malgré la forte concurrence.

Louis Lynagh, le nouveau phénomène outre-Manche

Il est le joueur anglais qui a fait le plus parlé de lui l’an dernier. Probablement grâce à ses performances en seulement 6 mois chez les pros et son rôle déterminant dans la victoire finale en Premiership des Quins. Fils de la légende australienne Michael Lynagh, champion du monde en 1991 avec les Wallabies, il est pourtant probable qu’il poursuive sa carrière internationale du côté de l’Angleterre. Son jeune âge et sa relative inexpérience pourraient le faire passer derrière certains joueurs mais il a déjà montré qu’il n’est pas impressionné par l’adversité. 

Il faut dire que le jeune ailier sait à quoi s’attendre. Fils de Michael Lynagh, il est destiné depuis son plus jeune âge à jouer sur les pelouses de rugby. Contrairement à son père, ouvreur de métier, il décide de jouer sur un côté. Il possède toutes les qualités d’un ailier avec une vitesse impressionnante, une capacité à prendre de vitesse son adversaire dans un duel en bout de ligne et de joueur dans les petits espaces. Son père lui a donné le goût du rugby. Pourtant Louis n’a pas eu l’occasion de le voir jouer. Champion du monde et vice capitaine avec les Wallabies en 1991, il a enfilé à 72 reprises cette tunique jaune pour 911 points inscrits. Il prend sa retraite internationale en 1995 après la défaite de son équipe en quart de finale contre les anglais. Après un passage en Europe à Trévise puis aux Saracens, il met fin à sa carrière en 1998. Une carrière bien remplie mais le nom des Lynagh ne prévoit pas de s’arrêter là. 

Louis Lynagh naît à Trévise le 3 décembre 2000, pays de sa mère. Il envisage rapidement de marcher dans les pas de son père mais le chemin est encore long pour l’ailier. En effet, il n’est pas facile de supporter la pression lorsqu’on est fils de…. Son père a donc essayé de l’aider sans pour autant être omniprésent, lui permettant d’être lui-même : « Mais même dès mon plus jeune âge, il ne voulait pas trop s’impliquer car il sait à quel point certains parents aiment être vraiment actifs. Pouvoir prendre du recul était plutôt bien de sa part et me laisser être moi. Maintenant que je suis sur mon propre chemin, il fait tout ce qu’il peut pour m’aider – me conseiller dans des situations hors du terrain, ou parler de l’entraînement, ou d’un certain mouvement que nous utilisons et comment nous pourrions mieux le faire. »

C’est donc sa propre voie que Lynagh a décidé de suivre et elle a pris un tournant lorsqu’il rejoint l’académie des Harlequins chez les U13. Une nouvelle étape dans un des plus grands clubs d’Angleterre et qui voit émerger une nouvelle pépite dans ses rangs. Il progresse alors au sein des différentes catégories des Quins en montant en puissance au fur et à mesure des années. En parallèle de sa carrière en club, il évolue dans les différentes catégories jeunes anglaises en U16 puis U18 et enfin U19. Une première étape dans son choix de sélection même si celui-ci n’est pas définitif puisque Louis Lynagh est éligible pour jouer sous les couleurs des Wallabies, pays d’origine de son père et celles de la Squadra Azzurra par sa mère.

Louis avec le maillot des U16 du XV de la Rose et Michael Lynagh. (foxsports.com.au)

Lynagh fait partie des joueurs les plus attendus par les Quins pour intégrer à l’avenir l’équipe mais la pandémie est arrivée, retardant ses débuts. Il a alors profité de cette période pour s’entrainer avec ses jeunes frères : « Au cours du premier confinement, je suis reconnaissant d’avoir deux frères plus jeunes parce que chaque jour, quand j’avais besoin de m’entraîner, je faisais du travail de gym le matin, puis j’attrapais l’un de mes deux frères, puis nous allions au parc et travaillions sur les techniques. C’est pourquoi je pense qu’après le confinement, je suis arrivé et j’ai très bien démarré, car je travaillais tous les jours. »

Un travailleur qui a cherché à améliorer ses points faibles pour devenir le meilleur ailier possible. Louis Lynagh a la volonté de réussir, il tente, il n’hésite pas à prendre sa chance et c’est probablement ce qui a motivé les Quins à en faire une pièce maîtresse de leur projet. Le joueur le reconnaît lui-même, il a dû travailler sur certains aspects de son jeu : « Je pense que l’une des plus grandes améliorations que j’ai eues a été avec mes petits coups de pieds. Avant le confinement, j’avais vraiment du mal avec cela et après celui-ci, j’ai continué à travailler dessus, mais cela m’a montré que si je continue à travailler, il y a des techniques que je peux acquérir au plus haut niveau. » Il est aujourd’hui l’un des meilleurs dans ce domaine et il l’utilise pour conclure ses chevauchées fantastiques. Il a aussi comme mentor au sein des Quins le légendaire Mike Brown, le vétéran de cette équipe. Un joueur qui a beaucoup inspiré Louis Lynagh et lui a permis de grandir : « La plus grande chose que j’ai apprise (de Mike) a été d’être décisif à 100 % dans tout ce que vous faites. En tant qu’arrière ou l’un des trois joueurs derrière, lorsque vous récupérez le ballon, quelle que soit la situation, vous devez être à fond dans la décision que vous prenez. Que ce soit pour taper, l’exécuter, le passer, même si c’est une mauvaise décision, vous pouvez prendre la bonne décision en vous engageant pleinement. »

Il fait ses débuts avec les seniors des Quins lors de la Premiership Cup en jouant deux minutes contre Bristol. Une petite entrée dans un match, souvent utilisé par les équipes pour lancer quelques jeunes. Il fait ses premiers pas en Premiership lors de la 22ème journée contre Leicester en jouant 26 minutes. Une confiance accordée que l’on retrouve l’année suivante où il connaît sa première titularisation contre Bristol lors du Boxing Day. Un match complet où il se montre à son aise et s’installe dans le XV petit à petit. Après le départ de Paul Gustard, il ne perd pas la confiance des entraineurs en place et inscrit son premier essai sur une bonne montée, interceptant la passe de Jacob Umaga. Un essai venant récompenser son bon match où il a montré tout son talent. Il a cette capacité à prendre le dessus sur son adversaire, il est souvent lancé par Marcus Smith ou Danny Care sur le côté pour faire la différence et utiliser sa vitesse dans les trous laissés par la défense adverse. Une certaine maturité dans son jeu qui lui laisse entrevoir un avenir radieux dans une équipe encore jeune. Il enchaîne les titularisations et les Quins montent en puissance depuis le départ de leur entraîneur.

Malheureusement pour lui, il est stoppé dans son ascension par une blessure l’éloignant des terrains presque quatre mois. Une mauvaise nouvelle et une première épreuve à affronter à son jeune âge. Après ses premiers mois convaincants, les Quins n’hésitent pas à lui faire signer un contrat à long terme. Une trajectoire différente de son jeune frère Tom, âgé de 18 ans qui a décidé de rejoindre la franchise de son père jusqu’en 2023. Un avenir qui se dessine en outre-Manche mais Louis Lynagh sait que le chemin est encore long : « Il y a beaucoup de concurrence pour les places dans l’unité arrière extérieure ici, ce qui détermine les normes. C’est un endroit idéal pour continuer à développer mon jeu. Il y a une bonne sensation autour de l’équipe en ce moment. C’est une équipe pleine de potentiel et nous savons que ce groupe à la capacité d’aller là-bas et de gagner de l’argenterie. C’est quelque chose dont je suis ravi de faire partie » (Louis Lynagh lors de sa prolongation). Un projet convainquant et prometteur avec des joueurs comme Smith, Dombrandt, Murley et d’autres. Sa détermination a fait la différence au sein de la direction de l’équipe : « Nous sommes ravis que Louis ait signé un accord à long terme avec les Quins. Louis est homme immensément déterminé avec un vrai talent. Il a travaillé fort à l’entraînement au cours des dernières saisons et a saisi sa chance à deux mains cette saison » (Billy Millard, directeur du club).

Louis Lynagh revient pour la fin de saison où les Quins ont réussi à remonter dans le top 4 pour se qualifier pour les playoffs. Et c’est probablement à ce moment-là qu’il se révèle aux yeux du monde entier. Tout d’abord lors de la formidable remontée des Harlequins contre les Bears où il inscrit un essai puis en Finale contre Exeter avec les deux essais de la victoire et ainsi permettre aux Quins de remporter le titre de champion d’Angleterre. Deux essais de pur finisseur où il est une première fois lancé par Marcus Smith et casse le plaquage de Tom O’Flaherty pour marquer dans l’en-but. Le second essai est encore plus simple puisqu’il bénéficie du très bon travail de son acolyte Tyrone Green pour marquer en coin grâce à sa vitesse. Deux essais qui renversent le cours du match. Menée à la 71ème minute 31-26, l’équipe londonienne passe devant 40 à 31 à quatre minutes de la fin du match. Il a marqué tous les spectateurs en mettant fin aux espoirs de victoire des champions d’Angleterre et d’Europe en titre.

Louis Lynagh donne l’avantage aux Quins grâce à un magnifique essai inscrit à 8 minutes de la fin du match.

Une performance incroyable permettant à Lynagh de prendre une nouvelle dimension. Il doit désormais confirmer tous ses progrès. Il fait aussi face à une bataille féroce entre trois fédérations. Alors que l’Italie et l’Australie sont venus au renseignement pour le joueur, l’Angleterre ne semble pas bouger avec Eddie Jones alors que le jeune ailier a déjà porté le maillot du XV de la Rose dans les catégories jeunes. Finalement, le sélectionneur australien a semble-t-il fait son choix en appelant le joueur dans l’équipe d’entrainement début septembre puis dans les groupes élargis pour la tournée d’Automne. Il n’a pas encore connu de sélection mais il semble avoir fait son choix. Comme il l’a déjà dit, il souhaite suivre sa propre voie et il ne devrait pas revêtir le maillot des Wallabies. 

Libéré de ce poids, Louis Lynagh a poursuivi ses bonnes performances avec 7 essais inscrits en ce début de saison avec cette explosivité qu’on lui connaît. Il forme un très bon duo avec Tyrone Green où les deux combinent parfaitement à la relance. Ils sont difficilement prévisibles pour les défenseurs et leur vitesse permet aux Quins de faire la différence. Il est encore jeune et doit encore progresser défensivement. Il ne rate pas forcément ses plaquages et il vient souvent contester les ballons dans les rucks mais il lui arrive parfois de monter trop rapidement, laissant un peu d’espace dans son dos. Il doit aussi parfois essayer de temporiser. Il a tendance à partir avec le ballon en main seul sans soutiens, rendant trop facilement le ballon à l’adversaire. Des erreurs de jeunesse mais il a encore le temps de progresser dans ce secteur avec les Quins puis l’Angleterre. Enfin, il est parfois moins sollicité que son acolyte Cadan Murley sur l’autre aile mais il a cette capacité de bonifier n’importe quel ballon. Il suffit de regarder son essai contre les Tigers sur un exploit individuel.

Louis Lynagh a un talent incontestable et s’affirme comme le futur chez les 3/4 anglais. Il a déjà pris une place importante dans son club des Harlequins et il a pour ambition de créer une dynastie avec ses jeunes coéquipiers Alex Dombrandt, Marcus Smith ou encore Joe Marchant. Encore jeune, il a une marge de progression importante. S’il continue comme ça, il peut espérer suivre les pas de son père sous une tunique différente.

Ollie Sleightholme, l’ailier marchant dans les pas de son père

Il est lui aussi descendant d’un ancien joueur de rugby professionnel. Si Jon Sleightholme n’a pas eu la même carrière que Michael Lynagh, il reste un joueur marquant en Premiership. Ailier de formation, il a évolué dans différentes équipes en particulier celle de Bath et celle de Northampton où il inscrit 10 essais en 50 matchs. Il cumule aussi des sélections en Angleterre à sept et à XV où il revêt le maillot blanc 12 fois pour 4 essais. Il dispute aussi quelques rencontres avec les Barbarians. Jon Sleightholme est aussi connu pour avoir fait partie de l’étude de l’Université de Durham sur 250 anciens joueurs à propos de l’impact des blessures sur leur corps. Il s’est alors exprimé pour The Rugby Paper sur cette étude et sur les problèmes rencontrés par les joueurs retraités.  

Il est certain que Sleightholme n’a pas eu à aller chercher loin pour trouver son sport de prédilection. Il a quelques souvenirs de son père portant le maillot des Saints puis en tant que salarié du club. Un premier lien existant entre Sleightholme et sa future équipe. Il ne le sait pas encore mais il s’apprête à être l’une des stars de cette équipe pour plusieurs années. Avant d’arriver aux Saints, il évolue au club Northampton Old Scouts, club qui a vu Courtney Lawes passer. Une fois les premières courses réalisées sur un terrain, Ollie Sleightholme ne voit plus qu’à travers le rugby. Il est rapidement repéré par les Saints qui le sélectionne à l’adolescence. Un rêve d’enfant qui se réalise. Malheureusement pour lui, il est libéré par l’académie à 15 ans. Cette déception ne lui enlève pas cette envie de devenir joueur professionnel : « C’est comme ça que tu le prends. Certaines personnes peuvent le prendre comme ”c’est fini”, d’autres le prennent comme ”J’ai juste besoin de travailler plus dur que tout le monde maintenant” c’est la route que j’ai empruntée. » Et bien lui en a pris.

Après avoir évolué avec l’équipe d’East Midlands, il retrouve sa place au sein de l’académie six mois plus tard. Depuis, il a grimpé au sein des différents échelons de l’académie. Il montre rapidement sa capacité à déborder sur les ailes grâce à sa vitesse. Comme son père, considéré comme l’un des joueurs les plus rapides de son époque, il travaille dur sur cet aspect pour aider offensivement ou défensivement son équipe. Il a cette capacité à apporter le danger dès qu’il a un peu d’espace devant lui. Il est souvent lancé par ses coéquipiers dès que le surnombre existe.

Il est un travailleur acharné pour toujours s’améliorer. Sa détermination et son envie d’être un joueur parfait ont probablement joué dans l’esprit de ses différents entraîneurs. Évoluant dans un club familial selon lui, il a eu la chance de pouvoir évoluer dans un environnement saint. Un club où tout le monde aide tout le monde. Il bénéficie de l’aide de son père. Même si celui-ci ne la jamais forcé à jouer avec un ballon ovale, il a toujours suivi son fils dans son apprentissage : « Il a été là, l’a fait et il peut me dire ce qu’il pense et si je fais la bonne chose et ce que je devrais faire. » Même si comme son père, Ollie Sleightholme s’appuie beaucoup sur sa vitesse, l’ailier anglais a cherché son inspiration chez Rieko Ioane et Elliot Daly. Deux joueurs qui l’ont beaucoup influencé dans son jeu : « Quand j’ai fait certains de mes travaux, j’ai regardé Rieko Ioane et des trucs qu’il fait pour être meilleur […]. Et j’ai aussi regardé Elliot Daly parce que son jeu de coups de pied est bon et je veux développer mon jeu au pied et l’améliorer. »

Il faut dire qu’il utilise souvent ce jeu au pied aujourd’hui pour se dégager mais aussi pour inscrire des essais sur des exploits individuels. Avec ses petits coups de pied pour lui seul, il surprend souvent le dernier défenseur avant de le devancer grâce à sa vitesse. Des essais de vrais ailiers avec Sleightholme au départ et à la finition de l’action. Cette capacité à se procurer des occasions d’essais seul doit venir de son expérience à VII avec les Saints lors des Premiership Rugby Seven Series en 2018 mais aussi lors des Commonwealth Youth Games aux Bahamas où il remporte la médaille d’argent.

Rapidement, il ne fait plus aucun doute que Sleightholme a un avenir au sein de cette équipe de Northampton à la recherche de finisseur. Il connaît ses premières titularisations en coupe avant de faire ses débuts en Premiership contre les Wasps. Il rentre à 11 minutes de la fin et il ne lui faut que 15 secondes pour inscrire son premier essai après avoir été décalé par Luther Burrell le long de la ligne de touche. Une course de 40 mètres pour aplatir dans l’en-but adverse. Une grande émotion pour son père mais aussi pour Ollie : « C’était l’un de mes meilleurs souvenirs d’être ici, je ne me souviens pas vraiment d’avoir marqué l’essai, je me souviens juste des célébrations qui ont suivi. Je le regarde en vidéo et on dirait que c’est quelqu’un d’autre. » Marquer pour son premier match dans la tunique de l’équipe de sa ville, c’est un rêve qui devient réalité. Il rejoint avec son père, le club très fermé des pères-fils ayant marqué un essai en Premiership composé d’Andy et Owen Farrell, Jim et Harry Mallinder et George et Gary Graham.

Ollie Sleightholme et son père Jon Sleightholme. (therugbypaper.co.uk)

Il continue à se faire une place dans l’équipe et inscrit quatre essais lors d’un match de Challenge Cup contre Timisoara. Malgré la faiblesse de l’équipe adverse, il a montré ses qualités de finisseur. Étant parmi les joueurs les plus prometteurs, il est sélectionné pour jouer le tournoi des VI des moins de 20 où il est titulaire lors de quatre matchs. Il termine le tournoi avec 2 essais. Des bonnes performances qui lui permettent de faire partie du groupe pour la Coupe du monde des moins de 20 l’été suivant. Il inscrit un doublé pour son premier match contre l’Irlande. Avec l’Angleterre, ils terminent à une décevante septième place au classement. Il continue sa progression l’année suivante avec la découverte de la Champions Cup où il inscrit deux essais pour ses deux premiers matchs contre Trévise puis le Leinster. Des fulgurances toujours plus importantes et il est récompensé par la signature d’un nouveau contrat avec les Saints pendant l’interruption de la saison. Une juste récompense pour celui qui a inscrit 10 essais en 17 matchs avec l’équipe de Northampton. Il est malheureusement freiné dans son ascension par une blessure à la cuisse suivie d’inconvénients l’écartant des terrains pendant plus d’un an. Une période difficile pour l’ailier qui a souhaité remercié sa famille de l’avoir aidé : « Je pense que c’est la principale chose qui m’a aidé à traverser ça, le soutien que j’ai eu de ma mère, ma petite amie, mon père, mon frère, des trucs comme ça […]. Mon père me disait des choses que j’avais besoin d’entendre, des trucs comme ”vous ne pouvez pas le changer, travaillez dur pour revenir aussi vite que possible et faites-en le plus possible. »

Après une petite période pour retrouver ses sensations, il marque les esprits avec 4 essais inscrits contre Worcester. Une forme de déclic permettant à l’ailier anglais d’inscrire quatre autres essais sur les trois matchs suivants. Ses bonnes performances lui permettent de faire remarquer par Eddie Jones pour les matchs d’été. Malheureusement pour lui, il n’a pas l’occasion de se montrer en raison d’une commotion pendant l’entrainement. Cette nouvelle déception ne remet pas en cause sa place dans le futur groupe du XV de la Rose, le joueur ayant été sélectionné dans les différents groupes élargis pour les matchs d’automne. Il a l’avantage de pouvoir évoluer dans une équipe ambitieuse composée de nombreux jeunes comme Alex Mitchell, George Furbank, Tommy Freeman ou encore Ehren Painter. Il a cette chance d’évoluer sous les ordres de Chris Boyd, directeur de rugby des Saints. Ancien entraineur des Hurricanes champions en 2016 du Super Rugby, il a vu de nombreux joueurs évoluer sous ses ordres à commencer par Beauden Barrett, Julian Savea et TJ Perenara. Il a cette habitude de laisser ses jeunes se développer et il a fait partie des premiers à lancer Ollie Sleightholme.

Il a réussi à créer un groupe depuis son arrivée en incorporant petit à petit les membres de l’académie. Une véritable famille avec des joueurs qui s’entendent à merveille sur et en dehors du terrain. Une jeune équipe à l’image des Quins prétendant au titre à l’avenir. Ollie Sleightholme a aussi vu l’arrivée d’un joueur expérimenté avec Courtnall Skosan. L’ailier sud-africain est en grande forme en ce début de saison avec déjà 9 essais inscrits cette saison en autant de matchs. Un joueur venant apporter son expérience aux jeunes 3/4 des Saints : « Il est de classe mondiale pour une raison et il l’a prouvé depuis qu’il est ici. Je peux certainement apprendre de lui. » (Ollie Sleightholme sur Courtnall Skosan).

Si Ollie Sleightholme est l’un des joueurs les plus rapides en Premiership, il reconnaît avoir travaillé là-dessus. Même s’il a les gênes de son père dans ce domaine, il utilise cette vitesse sur les phases défensives pour rattraper les ailiers filant vers l’en-but. Il est souvent le premier sur les replis défensifs lors des attaques adverses. Cet atout lui permet d’aider son équipe sur ces phases même s’il doit encore progresser dans cet aspect du jeu. C’est un travailleur, il est probable qu’il tente d’évoluer dans ce domaine : « Nous avons été ravis car il travaille très dur et est très diligent dans ses débriefings de jeu et recherche des domaines où il peut s’améliorer. Les entraineurs ont été impressionnés par son attention aux détails et il a très bien réussi avec les Saints jusqu’à présent » (Jon Sleightholme sur son fils).

Ollie Sleightholme utilisant sa vitesse pour éviter un essai adverse.

Il sait apporter le danger et se muer en coéquipier modèle. Cette année, avec l’arrivée de Skosan, il est moins en vue avec aucun essai inscrit. Il n’en est pas moins utile pour mettre la pression sur la défense et battre ses vis-à-vis le long de la ligne de touche. Il n’est pas le plus médiatisé et le nombre d’ailiers performants outre-Manche ne lui garantissent pas une place dans le XV de la Rose. Mais il est certain que Jones garde Ollie Sleightholme dans un coin de sa tête.

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