Sélections nationales

Djamel Belmadi : le « ministre du bonheur »

Depuis son arrivée en 2018, l’ancien joueur international devenu sélectionneur a ravivé la flamme du football algérien. Avant son arrivée, les Verts ont connu un enchaînement de quatre coachs différent en l’espace d’un an, tous ayant réalisé des résultats décevants. Empêchant ainsi la sélection maghrébine de participer à la Coupe du monde 2018. La tâche était donc de taille pour une équipe qui avait besoin d’un vrai capitaine de route pour mener à bien son retour sur le devant de la scène.

Les dix travaux de Djamel

La rigueur et la discipline. Voilà comment on pourrait résumer les fondements du « système Belmadi ». Alors que la sélection algérienne est désemparée, son vivier a rarement été aussi riche. Les problèmes de vestiaire ont plombé une équipe en recherche d’identité depuis son huitième de finale en Coupe du monde 2014 face à l’Allemagne. Une élimination au premier tour de la CAN 2017 et une non-qualification à la CDM 2018 pousse le nouveau sélectionneur à avoir des objectifs modestes : Se qualifier pour les CAN 2019 et 2021 et pour la Coupe du monde 2022 au Qatar.

« Il a tout simplement changé l’état d’esprit. Il y avait beaucoup de problèmes de vestiaire avant qu’il arrive. Il a écarté des joueurs qui se pensaient indispensables et il a renouvelé la sélection avec des joueurs sur lesquels personne ne misait. […] Tout lui réussit, donc on ne peut pas aller contre son discours. Aujourd’hui en Algérie, il est plus populaire que le président de la République»

Mehdi Dahak, directeur de publication chez DZfoot.com lors d’une interview pour France 24.

Au vu des dernières années, la victoire de l’Algérie à la CAN 2019 est d’autant plus un exploit. Malgré la qualité des joueurs présents (Brahimi, Mahrez, Bennacer), Djamel Belmadi a dû formater son équipe en tant que collectif pour aller jusqu’au bout de l’aventure. À vingt reprises il a été sélectionné sous le maillot algérien dont il avait fait le choix de représenter. À la grande surprise de beaucoup de monde : « Il avait fait un choix très fort en optant pour l’Algérie. À l’époque, peu de joueurs franco-algériens choisissaient les Fennecs. Les relations entre la Confédération africaine de football (CAF), les clubs, les joueurs et les sélections étaient encore pire que maintenant. Il faisait partie des rares joueurs à se “sacrifier” pour la sélection », explique Mehdi Dahak.

Le rapport de Belmadi avec la sélection algérienne est indéfectible. Ce qui est sûrement une des raisons pour lesquelles son mandat est une réussite. Son sérieux, son franc-parler et sa vision de jeu ont conquis les supporters algériens qui ont vu en lui la renaissance de leur équipe nationale. Il représente la réussite de la sélection, que ce soit dans la mentalité ou dans le jeu.

Un niveau de jeu à la hauteur des attentes

L’expérience de Belmadi dans la sélection en tant que joueur (vingt capes avec les Fennecs) mais aussi en tant qu’entraîneur ont fait de lui le candidat parfait. Pendant huit ans, il a perfectionné son jeu au Qatar avec les clubs de Lekhwiya et Al-Duhail, mais aussi avec la sélection. Il s’inspire également de ses expériences européennes (Angleterre, France, Espagne) de quand il était joueur pour formater son jeu.

Pour redevenir un grand d’Afrique, il a fallu résoudre les problèmes sur tous les compartiments du jeu et l’ancien milieu offensif de l’Olympique de Marseille a intégré de nouveaux principes au sein de la sélection en s’inspirant des plus grands clubs européens. Le mécanisme offensif de Pep Guardiola à Manchester City (club dans lequel il a joué tout comme son capitaine Riyad Mahrez) est un des exemples le plus visible lors des matchs de l’Algérie. Le système de fixation pour que le relayeur puisse venir entre le latéral et le central est une habitude pour le capitaine des Verts.

(L’Algérie est en vert) Pendant que Mahrez, près de la ligne de touche, fixe l’adversaire au large, le relayeur droit Feghouli plonge dans l’espace entre le défenseur central et le latéral adverses. (Image 1)

Un mécanisme classique à City, ici face au PSG. Fixation de Mahrez l’ailier et plongée du relayeur. (Image 2) (Source : L’Equipe)

Cette tactique réussit bien à l’Algérie qui possède des joueurs rapides et techniques en milieu et en attaque pour terminer ce genre d’actions. Évidemment, le plan de l’attaque n’est pas la seule chose que Belmadi à retravailler. Pour remporter la CAN et pour n’encaisser que deux buts sur l’ensemble de la compétition, il a fallu s’inspirer d’un des meilleurs blocs défensifs de ces dernières années : celui de l’Atlético Madrid.

Après avoir perdu le ballon, l’Algérie (en blanc) s’est repliée plus vite que le contre du Nigéria. Les Fennecs, très compacts dans leur surface poussent le porteur du ballon vers le côté (Source : L’Equipe)

Djamel Belmadi applique trois principes similaires à son homologue argentin, Diego Simeone : un bloc qui oriente l’adversaire vers la ligne de touche pour l’enfermer, des offensifs qui se replient très bas, du nombre pour défendre la surface. Désormais, l’Algérie peut s’appuyer sur des joueurs titulaires en Europe (Bensebaini, Atal, Mandi, Feghouli) qui peuvent suivre ce rythme de jeu à haute intensité. La rigueur du sélectionneur franco-algérien est un des piliers de la réussite actuelle des Verts, au point de battre des records.

Une troisième CAN et un record du nombre de match sans défaite ?

Depuis son arrivée à la tête de la sélection, l’ex international n’a connu qu’une seule fois la défaite, face au rival marocain (3-0). Depuis, les Verts sont sur une série de 35 matchs toute compétition confondue sans défaite, ce qui constitue un record dans l’histoire du football africain. Cette série d’invincibilité n’est pas un hasard, elle est due au sérieux du sélectionneur, mais aussi des joueurs.

Une des plus grandes réussites de Belmadi est d’avoir réveillé le talent de Youcef Belaili. Celui qui a vécu deux ans de suspension pour dopage entre 2015 et 2017 est devenu un des joueurs clé de la sélection algérienne. Présent lors de la victoire à la CAN en 2019, il a été un des grands artisans de la victoire en Coupe arabe en décembre 2021, en terminant deuxième meilleur joueur, mais aussi en scorant un des plus beaux buts de l’année.

À la différence de 2019 en Egypte, les Algériens sont attendus comme les grands favoris de la compétition. Dans le groupe du Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire et de la Guinée Equatoriale, les hommes de Djamel Belmadi visent clairement la première place du groupe. Histoire de ne pas avoir affaire à un premier gros morceau dès les huitièmes de finale. Avec une équipe qualitativement supérieure à celle de 2019, les Verts et Blancs seront en concurrence avec le Sénégal, qu’ils avaient battu en finale de la dernière CAN sur un but de Baghdad Bounedjah.

Après un premier match nul (0-0) face au Sierra Leone, Djamel Belmadi est apparu passablement agacé en conférence de presse. Il a activé le black-out jusqu’au match face à la Guinée Equatoriale. La victoire n’est pas acquise pour les Algériens qui peuvent se faire surprendre tant la CAN nous a montré que la compétition était imprévisible. Désormais, les Guerriers du Désert n’ont plus le droit à l’erreur s’ils veulent rester invaincus et remporter un troisième titre continental. Tahia Djazair.

Crédit photo de couverture (Icon Sport)

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