Les Reds sont peut-être en passe d’écrire l’histoire. Toujours en course en championnat, en coupe et en Ligue des Champions, Liverpool s’apprête à vivre une fin de saison relativement intense. Si Mané, Salah ou Van Dijk devraient naturellement jouer un rôle clé, le salut des hommes de Jürgen Klopp passera également par un Fabinho des grands soirs.
Un parcours loin d’être linéaire
Comme de nombreux compatriotes auriverdes, Fabinho arrive très jeune en Europe, sans le moindre match professionnel dans les jambes. Formé à Paulínia, le Brésilien évolue avec l’équipe U20 de Fluminense quand les Portugais de Rio Ave toquent à sa porte. Il rejoint alors le Vieux Continent à 18 ans, avant d’être prêté dans la foulée au grand Real Madrid. En Espagne, il joue une saison avec la Castilla où il s’impose comme un taulier de la réserve madrilène. Une première expérience aboutie qui conduit la Maison Blanche à prolonger l’aventure d’une saison. Les progrès sont déjà évidents, et Fabinho apparaît désormais comme une option en équipe première. C’est Mourinho qui le lance dans le grand bain, un soir de mai 2013 contre Malaga.

Des performances intéressantes, mais pas suffisamment convaincantes pour que le Real lève l’option d’achat. Qu’importe. Fabinho retourne brièvement au Portugal prendre deux-trois affaires avant de s’envoler vers Monaco. Sur le Rocher, le natif de Campinas devient rapidement un élément clé de la formation entraînée par Claudio Ranieri. Il dispute 31 matchs au total, exclusivement en tant que latéral droit. L’ASM ne s’y trompe pas, et fait le tout pour le tout pour garder son nouveau joyau brésilien. Et elle y parvient. La saison suivante, sous la houlette de Leonardo Jardim, Fabinho s’installe tranquillement devant la défense monégasque. Une progression linéaire, symbole de celle du groupe de la Principauté, qui sera couronné par un titre de champion de France en 2017 et une demi-finale de Ligue des Champions la même année. Suffisant pour le désormais international, qui peut traverser la Manche à l’été 2018 avec le sentiment du devoir accompli.
La clé de voûte défensive du LFC
À Liverpool, en revanche, tout est à refaire. Fabinho, qui débarque chez le vice-champion d’Europe, prend son mal en patience et doit se contenter de bouts de matchs durant les premiers mois. Mais Jürgen Klopp se rend rapidement à l’évidence : l’auriverde est la pièce qui manquait aux Reds pour concrétiser une domination qui durait depuis un moment. Pas embêté avec le ballon et particulièrement calme sur le rectangle vert, l’ancien de l’ASM impressionne par sa polyvalence.
Ses qualités s’intègrent parfaitement dans la tactique du technicien allemand. Le gros volume de jeu de “Dyson”, surnom décerné par son entraîneur, permet notamment de compenser les assauts offensifs des latéraux de Liverpool. Et ils le savent. N’y voyez aucun hasard si Robertson se trouvait dans la surface de réparation d’Everton pour ouvrir la marque dimanche dernier… Avec 21 passes décisives sur l’exercice en cours (neuf pour Robertson, douze pour TAA), les deux latéraux sont largement les plus décisifs de Premier League. Une statistique qui illustre naturellement le talent indéniable des deux joueurs, mais surtout la capacité qu’ont leurs coéquipiers à colmater les brèches laissées par leurs projections. Ce que fait à merveille Fabinho, le rendant si précieux dans la régulation du jeu mis en place par Klopp. À titre d’exemple, avec 2.15 ballons interceptés par match, il fait mieux que 84% des joueurs évoluant au même poste.

Et cette compensation libère l’ensemble de l’équipe anglaise. Thiago, qui réalise une deuxième partie de saison plus qu’intéressante, sait qu’il doit beaucoup au Brésilien dans sa réussite. Soulagé par sa présence, l’ancien du Barça peut jouer l’esprit léger. Pour le plus grand bonheur des amoureux du football, soit dit en passant.
Une paire qui fonctionne bien puisque les Scousers n’ont jamais perdu lorsque ces deux-là ont été alignés en même temps, en vingt rencontres de Premier League. Mieux encore : ils ont inscrit une moyenne de 2.85 buts sur ces matchs-là, preuve que leur association profite à tout le collectif.
La polyvalence défensive de Fabinho a également grandement servi l’entraîneur allemand par le passé. Face à une avalanche de blessures au cours de l’hiver 2021, Klopp n’a d’autre choix que de le faire redescendre d’un cran. En défense centrale, le Madrilène d’un soir fait mieux que dépanner, et limite la casse d’un Liverpool alors à la peine. Preuve que son QI football est bien indispensable à la réussite des coéquipiers de Mohammed Salah.
“C’est un grand joueur. C’est génial de jouer à ses côtés. Il nous donne beaucoup de confiance derrière. Tu peux jouer plus près du but, tu peux créer plus d’occasions et échanger davantage avec les attaquants”
Thiago, au sujet de Fabinho, après une victoire contre Leipzig en mars 2021
Une arme offensive supplémentaire
Mais difficile de parler d’un joueur de la Seleçao en évoquant uniquement sa fiabilité défensive et son sens tactique… À l’aise balle aux pieds, Fabinho participe également à la construction du jeu de son équipe. Capable d’user aussi bien des ballons courts que des caramels de 40 m, le Brésilien sait presque tout faire. Ses qualités techniques ne sont plus à prouver, et elles sont devenues précieuses au club du Nord de l’Angleterre. Son intelligence de jeu lui permet de se projeter au bon moment, et d’apporter le surnombre dans le camp adverse. À titre d’illustration, il réussit 80% de ses dribbles en championnat, soit un total supérieur à 90% des joueurs du même poste. Et Fabinho réalise en moyenne 5.7 passes dans le dernier tiers adverse, plus que 85% des milieux de Premier League.
L’ancien monégasque sait aussi se montrer efficace. Doté d’une bonne frappe de balle, il n’hésite pas à s’en servir pour débloquer une situation. Pep Guardiola et les Citizens en furent victimes, un soir de novembre 2019…
Fabinho affiche d’ailleurs des statistiques plus qu’honorables pour son poste. Avec sept buts et une passe décisive en 42 rencontres toutes compétitions confondues cette saison, il apporte lui aussi sa pierre au prestigieux édifice offensif des Reds. Une énième corde à un arc déjà bien fourni pour le national auriverde.
Un été agité ?
Désormais indéboulonnable au milieu de terrain, celui qui soufflera ses 29 bougies en octobre devrait pouvoir maintenir sa bonne forme quelques saisons. Et Liverpool l’a bien compris. Le club anglais a fait le nécessaire, l’été dernier, en prolongeant le bail de son poulain jusqu’en 2026. Une bonne nouvelle pour tous les Scousers, mais loin d’être suffisante pour décourager les nombreux prétendants.
Alors que le Bayern Munich le suit depuis quelque temps, Daniel Riolo affirmait il y a quelques semaines que le Paris-Saint-Germain s’est aussi penché sur le dossier. Bien que du côté d’Anfield personne ne souhaite voir Fabulous Fab mettre fin à son aventure britannique, les sommes que peut débourser le club de la capitale sont souvent de celles qu’on ne peut décliner. Et, sur ce coup, il serait particulièrement bien inspiré. Fabinho semble être la pièce manquante du milieu parisien. Le rôle de couverture parfaite qu’il assume déjà à Liverpool pourrait largement compenser les montées d’Hakimi ou de Nuno Mendes. Quand on possède deux éléments aussi prometteurs à ce poste, les mettre dans les conditions optimales semble être un bon début… Le Brésilien participerait également à la libération totale de Marco Verratti, naturellement plus performant dans un milieu plus serein défensivement.
Si un tel transfert ne reste qu’une rumeur parmi toutes celles qui entourent le club français, la possibilité de voir Michael Edwards intégrer l’organigramme du PSG prochainement pourrait cependant faire réfléchir outre Manche. L’actuel directeur sportif des Reds, qui a annoncé quitter le navire à l’issue de la saison, serait sur les tablettes de Doha. Une arrivée qui pourrait peser dans la balance en cas de négociations au sujet du Brésilien…
Mais l’été est encore loin, et Fabinho a encore un bout de chemin à faire avec Liverpool. À commencer par ce soir en Ligue des Champions, avec la réception de Villarreal. Un match tout sauf évident, mais où “Fabulous Fab” devrait naturellement en être l’une des clés.