Trente-huit ans. Près de quatre décennies après, le Trabzonspor Kulübü remporte le titre de champion de Turquie, le septième de son histoire. Depuis quelques années, le club situé dans le Nord-est du pays a fait son retour sur le devant de la scène du football turc. Relégué à un rôle de club de milieu de tableau pendant longtemps, le Trabzonspor possède une histoire riche, étant considéré comme le quatrième membre du Big Four avec le Fernerbache, Besiktas et Galatasaray.
L’union fait la force
Lorsque la Turquie a été fondée en 1923, quatre clubs existaient dans la ville de Trabzon İdmanocağı, İdmangücü, Necmiati et Trabzon Lisesi. Pendant des décennies, les clubs vont refuser de fusionner, tellement la rivalité est forte entre les supporters, poussant certains matchs à être délocaliser à Ankara ou Istanbul. Mais en 1967, la municipalité et la fédération de football turc voient leur souhait exaucé : les clubs de la ville s’unissent et fondent le Trabzonspor Külübü. Après plusieurs années de bataille, il est évident qu’une alchimie ne surviendrait pas au premier jour. Mais sans le savoir, la fusion des clubs va amener un avenir radieux à la ville de Trabzon.
Le club possède une histoire footballistique, mais comme ses adversaires stamboulistes, de nombreux sports sont pratiqués au centre d’entraînement des Bordo-Mavi : basket-ball, tennis de table, foot féminin, boxe… Mais l’équipe qui ramène le plus de trophée est bien celle de football masculin. Après plusieurs années en division inférieure, Trabzonspor débarque en première division turque en 1974 et rivalise avec les grandes équipes stamboulistes. Deux ans après son arrivée dans l’élite, le club du nord de la Turquie remporte son premier titre de champion de Turquie et met fin à l’hégémonie de 53 ans entre Galatasaray, Besiktas et Fenerbahçe. Ils ne seront que deux clubs basés en dehors d’Istanbul à gagner ce titre : Trabzonspor et Bursaspor (en 2010).

Un avenir radieux qui se profile ou la chance du débutant ?
Pendant près d’une décennie, les Grenat-et-bleu ne vont pas quitter le podium du championnat et vont remporter au total six titres de champion entre la saison 1975-1976 et 1983-1984. Une succession de titre à laquelle on peut rajouter trois Coupe de Turquie et six Supercoupe. Pendant huit ans, le Trabzonspor Külübü vécut un âge d’or dans son histoire qui était totalement inattendu, avec à peine plus de dix ans d’existence dans le football turc. Mais toute les bonnes choses ont une fin et les années qui vont suivre vont être bien plus compliquées. De 1986 à 1994, Trabzonspor va obtenir des places d’honneur dans le championnat turc, avec une troisième place comme meilleur résultat. En Coupe nationale, le club de la région éponyme ne va remporter le trophée qu’une seule fois, en 1992. C’est une période creuse pour une équipe qui avait marché sur le football turc quelques années auparavant.
Mais une nouvelle ère va débuter sous l’égide de l’ancien capitaine et joueur le plus capé de l’histoire du club : Senol Günes. Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais c’est une légende du football en Turquie. Ancien gardien, il est détenteur du record d’invincibilité en championnat (1112 minutes), acquis l’année du troisième titre de champion de Trabzonspor. Entraîneur d’une saison directement après la fin de sa carrière en 1988, il revient pour une seconde pige en 1993 et veut faire renaître la gloire d’antan de son club de cœur. La présence de joueurs comme Ünal Karaman et Tolunay Kafkas, tous deux internationaux turcs, ont remis sur le devant de la scène les Bleus et Grenats. Après une excellente saison en 1995, les joueurs de Senol Günes finissent dauphin du Besiktas, puis du Fenerbahçe la saison suivante, et remporte une cinquième Coupe de Turquie. La patte Günes fait son effet et son équipe reste dans le Top 4 pendant plusieurs saisons et va retomber dans le ventre mou du classement au début des années 2000.
Échouer pour mieux réussir
Après plusieurs échecs consécutifs pour récupérer le grâal, les galères s’enchaînent. Senol Günes part entraîner la sélection et les emmène en demi-finale de Coupe du Monde en 2002. Les cadres de l’effectif s’en vont un par un. Les joueurs recrutés pour les remplacer passent au travers et n’aident pas l’équipe à rester en haut de tableau. Le président du club, Özkan Sümer, décide alors de faire une restructuration du club, en amenant des jeunes turcs et des joueurs étrangers. Changement gagnant, entre 2002 et 2004, le club remporte deux nouvelles coupes nationales et finit à la deuxième place du championnat à deux reprises.
La décennie 2010 va être mouvementée pour le club de Trabzon. Alors que le Fenerbahçe se trouve dans un scandale de matchs truqués, le club stambouliote garde son titre de champion en 2010-2011 alors qu’il est exclu de la Ligue des Champions. Quelques matchs non finis à cause de débordements sur le terrain et un contentieux à l’encontre de quelques arbitres en 2015 vont entacher la réputation du club mais aussi les finances. Le club reçoit une interdiction de football européen pour manquement aux règles du Fair-Play financier en 2020, alors qu’ils avaient fini deuxième du championnat.
Il faut attendre la saison 2019-2020 pour revoir le club sur le podium mais aussi remporter une nouvelle Coupe de Turquie. Cette saison, Trabzonspor a enfin obtenu le titre qui leur échappe depuis 1984. Emmené par des cadres tels que Marek Hamsik, Gervinho, Edin Visca et Andreas Cornelius, le club a dominé d’une main de fer toute la saison sans réelle concurrence. Le bilan est impressionant, 22 victoires, 12 nuls, 2 défaites, en plus d’avoir la meilleure défense du championnat. Les scènes de liesse dans la ville ont fait le tour du monde et ont ramené de la joie et du bonheur à un peuple qui attend le retour au premier plan de son équipe depuis tant d’années.
L’histoire du Trabzonspor Külübü est assez particulière. Fondé sur la base de clubs ennemis, la fusion de quatre équipes allait, en réalité, apporter l’un des meilleurs palmarès du football turc avec 7 titres de champions, 9 Coupe et Supercoupe de Turquie. Trop longtemps dans l’ombre des clubs stambouliotes, la province du Trazbon va redécouvrir les grandes soirées européennes. Voit-on peut-être le début d’une domination sans partage d’un club sur le football turc ? To be continued…