CDM 2022 Sélections nationales

Portugal : bien parti pour un énorme gâchis ?

Le Portugal débute sa Coupe du monde 2022 demain face au Ghana. Derrière son emblématique capitaine Cristiano Ronaldo, la Seleçao avance camouflée. Son équipe regorge pourtant de talents individuels. Pour quels résultats ?

Un favori ? Non. Une équipe qui ne passera pas les poules ? Non plus. Disons un « outsider ». S’il fallait décrire le Portugal cette année avant son entrée en lice dans cette Coupe du monde 2022, nous l’exposerions ainsi : un outsider. Capable du meilleur comme du pire depuis des années, la sélection entraînée par Fernando Santos est difficile à juger. Et c’est peut-être pour cette raison qu’elle est si dangereuse. Parce qu’elle n’est jamais meilleure que lorsque l’on ne l’attend pas. L’Euro 2016 – même si cela fait désormais six ans – en est le parfait exemple. Alors qu’attendre de ce Portugal ? Difficile de le prévoir. Le cas Ronaldo prend de la place, Fernando Santos est toujours aussi critiqué, quid du jeu proposé ? Autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre afin de savoir si, oui ou non, nous sommes bien partis pour un énorme gâchis.

Meilleur sans Ronaldo ?

Impossible de commencer sans évoquer Cristiano Ronaldo. Au cœur de toutes les polémiques depuis le début de la saison avec son club de Manchester United, « CR7 » cristallise les débats. L’ex attaquant des Red Devils a été au cœur de multiples disputes. Son entraîneur Erik Ten Hag ne lui faisait pas confiance et l’ancien du Real Madrid et de la Juve n’avait pas caché, dans une récente interview, qu’il n’éprouvait « aucun respect » pour le coach néerlandais. Et même si tout cela ne concerne pas directement le Portugal, tout ce qui touche à Ronaldo impacte la Seleçao qu’elle le veuille ou non. Au-delà des affaires extra sportives, c’est le niveau du natif de Madère qui suscite des interrogations. Mis sur le banc à Manchester, le Portugais a seulement profité des matchs d’Europa League pour être titularisé. Pour des résultats peu convaincants et peu probants puisqu’il n’a inscrit que trois petits buts sous le maillot des Red Devils depuis le début de la saison. C’est mieux avec la sélection puisque CR7 a trouvé le chemin des filets à huit reprises depuis le début de l’année 2022.

Pourtant, selon de nombreux observateurs du ballon rond, cette équipe du Portugal se comporte mieux en l’absence de son capitaine (le quotidien A Bola titrait par exemple “moins de Ronaldo, plus de Portugal” en septembre dernier). Dernier exemple en date, ce match amical, jeudi dernier, contre le Nigéria où les Portugais ont facilement disposé des Super Eagles 4-0, sans Cristiano Ronaldo malade. On y a aperçu un Bruno Fernandes libéré (auteur d’un doublé en première mi-temps), ainsi qu’un Joao Felix libre de ses mouvements et des phases de jeu intéressantes comme en témoigne le but de Joao Mario.

La faible opposition des Nigérians n’est pas à négliger. Mais le fait est là : il y a un Portugal avec Ronaldo. Et un autre sans lui. Au Qatar, CR7 sera bien présent pour ce qui sera sa dernière Coupe du monde. Fernando Santos et ses coéquipiers devront faire avec. Mais nous parlons de l’un des meilleurs joueurs de tous les temps. Et sa seule présence ne peut pas expliquer les maux du Portugal. Une meilleure équipe sans lui ? Peut-être. Mais ça ne sera pas le cas lors du Mondial et les Lusitaniens le savent et ce depuis longtemps. Qui oserait se passer d’un Ronaldo, certes sur le déclin, mais habitué à ces grands rendez-vous et qui peut faire basculer la rencontre à un instant ? Certainement pas Fernando Santos.

Fernando Santos sous le feu des critiques

Si cette équipe du Portugal arrive sur la pointe des pieds sur le sol qatari, elle le doit à une phase de qualification très laborieuse lors de laquelle elle a eu besoin des matchs de barrage face à la Turquie et la Macédoine pour valider son ticket. Mais également à son sélectionneur. Sur le banc de la Seleçao depuis 2014, l’entraîneur portugais, Fernando Santos, n’a jamais réellement convaincu malgré les titres de 2016 (Euro) et en 2019 (Ligue des Nations). Pourquoi ? Son coaching et ses choix parfois très discutables ont souvent été au cœur des débats. « Fernando Santos incapable de démanteler la tactique allemande », pouvait-on lire sur la Une de Record, l’un des trois quotidiens sportifs portugais, après la défaite 4-2 face à l’Allemagne lors de l’Euro 2021.

Pourtant, le natif de Lisbonne a apporté au Portugal les premiers titres de son histoire. Mais c’est ailleurs que le bât blesse. Notamment dans la qualité du jeu proposé par son équipe. Alors qu’il possède entre ses mains l’une des meilleures générations de l’histoire du pays (voir par ailleurs), le Portugal ne séduit pas. Pire, la Seleçao déçoit et s’en remet trop souvent aux exploits individuels de CR7. Il est reproché à Santos une vision trop minimaliste du football, se contentant beaucoup trop souvent du résultat au détriment du jeu, se concentrant trop sur son assise défensive au détriment du jeu offensif des siens. Les éliminations en huitièmes de finale du dernier Mondial et du dernier Euro démontrent le réel visage de cette sélection : un jeu trop stérile, des résultats en berne malgré un vivier des plus talentueux.

Alors oui, Fernando Santos aura marqué de son empreinte la sélection portugaise avec ces deux titres et sa longévité à ce niveau-là est tout sauf un hasard. Oui, Fernando Santos est arrivé à souder des groupes capables d’atteindre les sommets malgré un jeu défaillant. Oui, Fernando Santos est capable de se réinventer puisqu’il a abandonné son 4-1-4-1 et fait désormais place à un 4-3-3. Mais la qualité du jeu pratiqué par son Portugal est à des années lumières de ce que pourrait trouver un autre entraîneur en tirant la pleine possession de ce groupe. Et c’est pour cela que Fernando Santos se retrouve en position dangereuse avant ce Mondial. L’ancien coach de Porto, de son côté, ne doute pas et déclarait il y a quelques jours. « Nous sommes convaincus que nous allons apporter du plaisir aux portugais. Nous avons gagné deux titres en six ans, seule la France a fait pareil. Pourquoi ne devrions-nous pas nous considérer comme des candidats au titre ? » Peut-être pour les raisons évoquées juste ci-dessus Fernando…

Un effectif XXL

Si Fernando Santos est critiqué, la principale raison provient surtout de la qualité exceptionnelle de son groupe sur le papier dont il ne tire pas assez profit. Le Portugal part au Qatar avec Nuno Mendes et Joao Cancelo, soit ce qui se fait le mieux en termes de latéraux en Europe et dans le monde. Un luxe que ne peut pas se payer le Brésil par exemple qui se retrouve assez dépeuplé ou encore la France qui est partie avec seulement un latéral de métier pour ce Mondial (Théo Hernandez). Et leurs concurrents ? Raphaël Guerreiro et Diogo Dalot ! Une profondeur de banc énorme à ces postes. Avec eux, Pepe et Ruben Dias forment une paire de défenseurs centraux très complémentaire malgré l’âge avancé du premier.

Au milieu de terrain, les Bruno Fernandes, Bernardo Silva, Vitinha, Danilo ou encore Palinha, qui évoluent tous dans les meilleurs clubs européens, ont tous des profils différents qui peuvent permettre à leur sélectionneur de modifier ses systèmes en fonction des adversaires. Enfin, la force offensive de ce Portugal effraie. Au côté de Cristiano Ronaldo, qui revêt souvent ses habits de lumière lorsqu’il joue une compétition internationale, ce sont Rafael Leão, Joao Felix ou encore Otavio et André Silva qui seront présents. Une force de frappe qui peut inquiéter ses adversaires et une multitude de joueurs capable de créer du danger dans toutes les positions.

Tous les douze ans, c’est une nouvelle équipe qui l’emporte lors du Mondial. Alors pourquoi pas ce Portugal-là ? Lui qui n’est jamais parvenu à se hisser en finale depuis 1934. Malgré un sélectionneur hésitant, parfois même réticent à pratiquer un football vers l’avant, cette équipe est composée de joueurs de classes mondiales. Et ce malgré un doute sur la forme de son capitaine Cristiano Ronaldo. La Seleçao n’arrive pas sûr de ses forces et pourrait bien tout gâcher. Mais ce Portugal possède de la ressource et en dépit de la faiblesse de son sélectionneur, les Portugais pourraient bien venir jouer les troubles fêtes.

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :