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Finale Champions Cup 2020-2021 : le choc des Stades

Samedi 22 mai 2021 se déroulera la finale de la 26ème édition de la coupe d’Europe de rugby. Le match tant attendu opposera deux clubs français, deux Stades, le rochelais et le toulousain. Si des finales françaises ont déjà eu lieu plusieurs fois dans le passé, laissant chacune leur trace, celle de cette année a définitivement tous les composants pour avoir sa place au panthéon de la compétition… Ou au moins nous faire vibrer pendant une paire d’heures.

Les compositions

Les matchs dans le match

Le Stade toulousain, comme le Stade rochelais s’appuient sur des troisièmes lignes dominantes pour déployer leur jeu offensif et défensif. Le match entre ces deux entités demain sera un facteur puissant dans la réussite ou la défaite de l’une ou l’autre des deux équipes.

Sur le plan tactique, leur utilisation reste cependant différente. Il faut dire que les compositions ne présentent pas des joueurs avec les mêmes caractéristiques. Du côté Maritime, les profils des hommes de 3e ligne sont plutôt tous semblables. On retrouve des joueurs tous très complets capables d’apporter dans tous les secteurs de jeu. Ainsi il n’est pas rare de voir Vito, Gourdon ou Alldritt en manipulateur, jouer dans la ligne de ¾, franchir, être au soutien et même terminer les actions. Ils n’en oublient pas pour autant les taches sombres qu’ils leurs incombent dans les rucks et sur le plan défensif. Au Stade Toulousain, Jerome Kaino remplit lui aussi un rôle similaire, celui de liant entre le pack et les arrières. Défensivement par contre l’équipe s’appuie sur deux chiens de garde, deux mordus du plaquage et de la tête pleine de gadoue à la fin du match, Elstadt et Cros. C’est dans leur association que Toulouse trouve un certain équilibre dans le jeu plus qu’individuellement.

A voir laquelle des deux 3e lignes va prendre le pas sur l’autre.

Nous allons avoir droit à un choc de titans au centre du terrain. Longtemps incertain, Levani Botia sera bien présent sur le champ samedi après-midi, avec en face de lui Pita Ahki. Ce n’est pas difficile, on tient là probablement les deux numéros 12 les plus efficaces de notre Top 14. Les deux hommes se sont rencontrés deux fois cette année dans le championnat national. Le résultat, deux victoires toulousaines mais un essai pour l’international fidjien. Cette fois ci, lors d’une grande finale, les cartes seront forcément rebattues.

Il faudra évidemment regarder l’état de santé de Levani Botia. Mais au vu du choix tactique sur le banc (6 avants – 2 arrières) opéré par Ronan O’Gara et son staff, pleine confiance est donnée à Botia qui doit donc être plus qu’en forme pour essayer de gagner ce titre. Dans le jeu Levani est, indubitablement, la plaque tournante de la ligne arrière rochelaise. Il est celui qui peut créer un point de fixation, s’effacer, jouer avant ou après contact, redoubler, sauter… Plus que ça en défense, il permet à tout le monde d’élever son niveau en étant toujours au bon endroit au bon moment pour impacter le plus possible le jeu proposé par les adversaires.

De l’autre côté Pita Ahki n’est pas en reste, on pourrait allégrement peindre le même portrait pour le centre néo-zélandais. Ahki fait lui aussi parti de cette caste de premier centre intelligent et altruiste pour un sou. Il se met au service du collectif, et en attaque comme en défense, il fait les bons choix, choix qui débloquent souvent des situations cloisonnées.

Avant de rentrer dans une petite caricature, il est important de rappeler que les deux équipes font partis de ce qui se fait de mieux en attaque et en défense en France mais aussi au niveau européen. Résumer le match par un simple duel attaque-défense est réducteur certes, mais permet de mettre en lumière des aspects tactiques intéressants qui seront à observer pendant la rencontre.

Statistiquement la défense de La Rochelle, en Top 14, est la meilleure. Elle n’a encaissé que 400 points au total (Toulouse : 520, 5e). Cette défense est très agressive puisque Ronan O’Gara a décidé d’utiliser les principes bien connus maintenant de la « rush defense » avec la montée des ailiers dans la ligne de ¾ pour couper les extérieurs. Dans Sud-Ouest aujourd’hui, Yannick Bru fait part de son ressenti sur ce type de défense et comment les Rochelais sont arrivés à la maîtriser « Tous les joueurs s’engagent et posent pas mal de problèmes. Face au Leinster, ils ont mis une pression très haute, quitte à délaisser des espaces. Comme ils ont une très forte confiance dans leur défense, quand les adversaires essayent de les contourner, ils ont des joueurs qui ont les capacités physiques et mentales de ne rien lâcher et d’aller chercher ceux qui ont trouvés les espaces ».

Trouver les espaces, ce sera la difficile tâche de l’attaque toulousaine, 2e meilleure attaque du Top 14 avec 710 points marqués (derrière Clermont avec 778). Pourtant les failles existent dans cette rush defense notamment, logiquement, dans le dos des défenseurs et de leurs montées agressives mais aussi au raz des rucks ou un manque d’organisation pourrait coûter cher au rideau défensif maritime. Le jeu au pied millimétré, ainsi que la vista et les qualités physiques d’Antoine Dupont pourrait être les clés qui déverrouilleront le match côté Toulousain et permettre leur jeu débridé dans le désordre.

L’expérience

Si la rencontre de Samedi s’annonce si alléchante c’est aussi de par l’expérience des talents présents dans chaque équipe. Par expérience, on peut sous-entendre plusieurs catégories toutes aussi importantes les unes que les autres.

Dans la notion d’expérience, une unité de mesure possible reste l’âge. C’est enfoncer des portes ouvertes que de dire qu’un joueur plus âgé à forcément plus de vécu qu’un plus jeune. Même s’il n’a pas forcément connu des finales ou des matchs importants, le compteur a plus tourné et potentiellement, un vieux joueur est à même d’avoir affronté plus de situations différentes sur un terrain de rugby.

Jerome Kaino cherche la concu… (crédit : Xavier De Fenoyl)

Au petit jeu de la vieillesse, au niveau des avants, c’est le Stade toulousain qui l’emporte avec une moyenne d’âge toute juste supérieure aux Rochelais, 30 ans contre 29. Ici Kaino et Faumuina font grossir le chiffre et seul Mauvaka se trouve en dessous de la barre des 25 ans.

Maintenant sur les lignes arrières le constat est beaucoup plus marqué, Toulouse fait dans la jeunesse (hormis avec le vétéran Maxime Médard, 34 ans) avec une moyenne de 25 ans, tandis qu’il y a beaucoup plus d’expérience du côté de La Rochelle avec une moyenne d’âge de 30 ans. On remarquera aussi l’écart très faible entre le plus âgé, Levani Botia (32) et les plus jeunes Raymond Rhule et Dillyn Leyds (28).

En globalité, le groupe rochelais propose des joueurs en phase au niveau de l’âge et qui tendent vers la trentaine. Tandis que les Toulousains ont une hétérogénéité marquée dans le secteur tout en restant en moyenne très jeune. Mais l’âge ne fait pas tout au niveau de l’expérience.

Il ne faut pas remonter bien  loin pour retrouver une finale jouée par l’une ou l’autre des équipes. Dans les deux cas, c’était au printemps 2019, avec une finale de petite coupe d’Europe contre Clermont pour La Rochelle et une finale de Top 14 contre le même adversaire un mois plus tard pour le Stade toulousain.

Si les Toulousains ont gagné leur finale, les Rochelais eux ont failli. Mais une finale jouée est déjà une expérience et il est intéressant de regarder qui était déjà là pour ces événements.

Côté Stade Rochelais, Priso et Atonio étaient déjà titulaires, au même titre que le capitaine Romain Sazy. Si Vito manquait à l’appel en 3e ligne Alldritt et Gourdon étaient déjà eux aussi associés. La charnière n’a pas bougé et en revanche seul Doumayrou est l’unique survivant de ce match dans la ligne de ¾. (Retière étant sur le banc pour la finale demain). Bourgarit, Joly et Botia avait eu le plaisir de rentrer en jeu. Il y a deux ans, le paquet d’avant était déjà bien dessiné, la continuité plus l’apport de Vito pourrait porter leurs fruits Samedi. Il est intéressant de noter que pour 4 joueurs de La Rochelle, une autre finale a été disputée et gagnée cette fois ci. C’était en 2014 en finale d’accession pour le Top 14 et Kévin Gourdon, Romain Sazy, Uini Atonio et Levani Botia étaient déjà là.

Pour les Toulousains, qui sont beaucoup plus jeunes que leurs homologues rochelais, beaucoup étaient aussi déjà présents, il y a deux ans, pour soulever le bouclier de Brennus. Une expérience fondatrice qui a permis à la majorité des joueurs de connaître leur premier titre en carrière (Dupont, Ramos, Ntamack…) Les jeunes toulousains n’ont donc pas grand-chose à envier aux rochelais sur le plan collectif.

…Victor Vito qui lui montre qu’elle est à La Rochelle (crédit : blog-rct.com)

Dernier point important à aborder dans l’expérience générale de l’équipe, l’apport individuel de chaque joueur. On retrouve dans chacun des deux clubs des joueurs avec un fort passé (ou présent) en équipe nationale. Avec aussi des titres glanés dans d’autres championnats. Ces joueurs ceux sont eux qui feront pencher la balance au moment où il ne faudra pas stresser, où il faudra garder son sang-froid et rester concentré jusqu’à la fin du match.

Le premier nom qui nous vient en tête côté toulousain c’est Jerome Kaino qui, du haut de ses deux coupes du monde et 6 rugby championship gagnés, a le plus beau palmarès du club. Il ne faut pas oublier l’enfant du pays Maxime Médard qui a déjà gagné avec le Stade 4 boucliers de Brennus, deux coupes d’Europe et a aussi participé à la finale de la coupe du monde 2011. Le dernier larron à avoir participé et gagné un grand titre en équipe nationale du côté de Toulouse, c’est évidemment le trublion Cheslin Kolbe, champion du monde en titre avec L’Afrique du Sud.

Le constat est presque aussi flamboyant côté Rochelais. Victor Vito lui aussi, au même titre que Kaino, est un double champion du monde, il a en parallèle remporté le Super Rugby en 2016. Will Skelton a connu la défaite en finale de coupe du monde en 2015, mais la victoire en championnat d’Angleterre et en coupe d’Europe, deux fois chacune, avec les Saracens. Kerr-Barlow est aussi un champion du monde néo-zélandais et enfin Brice Dulin a lui aussi une belle expérience au niveau des finales que ce soit en Top 14 ou en Pro D2.

Vous l’aurez compris, entre jeu proposé, duel alléchant et petites touches de fougue et de sagesse, le match de demain s’annonce excellent. Il ne reste plus qu’à s’assoir, s’ouvrir une bonne bière et regarder notre télévision pour un beau spectacle de rugby.

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