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Quand la presse sportive française écrit son histoire

Créé le 28 février 1946, le journal L’Équipe souffle cette année sa 75e bougie. Omniprésente dans le paysage médiatique sportif, le quotidien reste encore aujourd’hui la référence pour traiter l’actualité sportive en France. Pourtant, ce ne fut pas toujours le cas. Connaissez-vous le journal Le Sport, premier titre d’information sportive en France ? Ou encore Le Monde Sportif, lancé au tout début du XXe siècle ? Le CCS revient donc sur cette histoire de la presse sportive en France qui, sans aucun doute, a fait vivre les plus beaux moments sportifs !

Une presse à part entière et à part

Les Unes conservées sont à retrouver sur le site https://gallica.bnf.fr. Cette dernière date du 17 septembre 1854.

On dit souvent de la presse sportive qu’elle est « comme les autres, sans être tout à fait comme les autres« . Autrement dit, certains points la différencient clairement de la presse de manière générale. Intégrée aujourd’hui à la presse de grande information, cette dernière se développe au milieu du XIXe siècle. En effet, Le Sport, bimensuel créé par Eugène Chapus, apparaît en 1854. Il est considéré comme le premier titre d’information sportive en France. L’idée principale est de fournir en particulier les résultats principaux de l’actualité sportive et d’annoncer les différents événements sportifs à venir. Ce type de presse se développe sous le Second Empire et sous la IIIe République au moment même où le sport devient une pratique de plus en plus populaire.

« Le mouvement [sportif] a gagné toutes les couches sociales » – Une de L’Auto-Vélo (16 octobre 1900)

La presse sportive devient donc une presse à part entière à mesure que le sport se démocratise. Comme l’indique le journal L’Auto-Vélo dans sa Une du 16 octobre 1900, « Le mouvement a gagné toutes les couches sociales« . Désormais, les rencontres sportives se programment et se photographient. Les agences de Presse font du sport un sujet de prédilection et produisent même les premiers reportages. D’autres papiers apparaissent comme L’archer Français (1856), L’Auto-Vélo, L’Athlète (1917), Le monde (1903) … Entre 1854 et 1905, 26 titres de presse voient le jour. Ces journaux se spécialisent notamment autour des principaux sports de l’époque : le vélo, le cyclisme et l’athlétisme.

Eugène Chapus, premier journaliste sportif français

Qui dit journaux sportifs, dit inéluctablement journalistes sportifs. En fondant Le Sport à Paris, en 1854, Eugène Chapus (1800-1877) amorce le début d’une profession spécialisée, celle de journaliste sportif. Dans cette presse, cet ancien arbitre se consacre au sport dans son sens moderne. Il décrit les pratiques de son temps et dresse les portraits des plus célèbres sportifs de l’époque. Depuis E.Chapus, pionnier de cette profession, de nombreux autres journalistes se sont succédés dans l’histoire. En France, pour en citer quelques-uns, on retrouve Roger Couderc (1918-1984) et Denis Lalanne (1926-2019) en rugby, Thierry Roland en football … Une petite poignée dans un univers désormais bien rempli !

Malheureusement, une majeure partie de l’histoire de la presse sportive s’est faite sans journalistes féminines. L’une des raisons principales, la pratique du sport n’est pas encore associées aux femmes. Il faut attendre donc attendre la fin des années 70/début des années 80 pour voir apparaître les premières journalistes sportives à la télévision. L’ex championne de saut en hauteur, Marie-Christine Debourse, devient journaliste sur TF1 en 1978. De son côté, Christine Cusin-Paris co-anime l’émission phare Stade 2 sur Antenne 2, de 1977 à 1982. Entourée de journalistes sportifs, Christine Paris dénoncera lors d’une émission en 1980 la misogynie qui règne dans le milieu. Enfin, Marianne Mako complète ce trio de journalistes. Elle est la première femme à parler foot à la télévision, dans l’émission Téléfoot de TF1. À l’époque, le journaliste Didier Roustan fait tout pour la recruter « En 1987, quand elle arrive, le football féminin n’est synonyme que des clichés de garçons manqués ou de femmes fortes. » (interview du 02/10/18 au journal 20 Minutes). En 2018, Marianne Mako décède et c’est une grande partie de la profession qui lui rend hommage. Mais les carrières professionnelles de ses trois femmes ont permis à d’autres journalistes de prendre le relais du micro et/ou du stylo …

La naissance du géant L’Équipe

Créé en février 1946 par Jacques Goddet, le journal L’Équipe succède à L’Auto. Ce dernier, élaboré par Henri Desgranges, le créateur du Tour de France, est interdit de publication à la Libération. Après la Seconde Guerre mondiale, Jacques Goddet, ancien directeur de L’Auto de 1931 à 1944, réhabilite donc le journal sous un autre titre: L’Équipe. Ce dernier apparait au départ, trois fois par semaine, avec comme sous titre « Le Stade, l’air et la route« . L’Équipe devient vite une référence au niveau national et est reconnu à l’international. Il est à l’origine de la création de l’ancêtre de la Ligue des Champions, la Coupe d’Europe des Clubs. Lors de la première édition en 1955-1956, les amoureux du football s’en souviennent, Reims perd en finale contre le Réal Madrid au Parc des Princes.

Le 28 février 1946, L’Équipe sort sa première Une (Crédits: http://www.lequipe.fr)

Le journal est alors un parfait exemple de ce qui fonctionne. En continuant à se développant au fur et à mesure des années, que ce soit de nouveaux magazines, de nouveaux sites, L’Équipe monopolise une grande partie de l’actualité sportive en France. L’Équipe a réussi là où d’autres ont échoué, notamment dans la durée. Certains ont tenté de tirer leur épingle du jeu dans ce monopole. C’est le cas de l’hebdomadaire Le 10 Sport, lancé le 3 novembre 2008 par l’homme d’affaires, Michel Moulin. Pour éviter toute concurrence, le groupe Amaury, détenteur de L’Équipe, créé le même jour un autre hebdomadaire du même type, Aujourd’hui Sport. Cette technique fonctionne puisque Le 10 sport cesse de paraître à partir de mars 2009. En 2014, le Groupe Amaury sera condamné à payer une amende pour pratique anticoncurrentielle. Puni mais pas dépassé, L’Équipe reste la référence depuis sa création.

L’Équipe fait cavalier seul depuis 75 ans. C’est, selon Martin Fourcade, « comme l’amitié, c’est fait pour être partagé ». Pourtant, avant de devenir ce rituel pour certain.es passioné.es de sport, l’actualité sportive est devenue le domaine de prédilection de plusieurs journaux. Jusqu’à atteindre les 26 titres de presse. Désormais, la concurrence à L’Équipe se fait en particulier sur Internet. C’est le journalisme 2.0. 

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