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Ferrari : Allo Docteur ? Ça va mal…

Elle semble loin, la première course de la saison. Celle ou la Scuderia, triomphante, s’adjugeait sa première victoire (et son premier doublé), depuis Singapour 2019. Sur le circuit de Bahrein, Charles Leclerc et son équipe avaient dominé les Red Bull, tant sur la performance que sur la fiabilité, pour montrer que la légendaire Scuderia Ferrari était de retour. Et puis finalement, c’est peut-être le contraire…

Elle devait faire peur, cette F1-75. Et elle le fait. Mais ce qui fait encore plus peur que la belle monoplace rouge désormais, c’est l’équipe Ferrari, Mattia Binotto et consorts en première ligne, qui enchaînent les erreurs et les humiliations. C’est pourtant dommage, car tant la monoplace que les pilotes semblaient prêts pour la lutte au titre mondial, mais la Formule 1 repose sur un triptyque implacable – Pilote, Monoplace, Equipe – et si l’une des parties ne fonctionne pas, c’est toute la fondation qui s’effondre.

Une monoplace peu fiable

La raison première du début de fiasco qu’est en train de vivre Ferrari réside dans la fiabilité de sa monoplace. A l’opposé de ce qui a proposé par Ferrari lors des deux dernières saisons (à savoir un moteur peu performant mais extrêmement fiable), les ingénieurs de Maranello ont fait le choix cette année de la performance. Et si cela semblait convaincant lors des premiers Grands Prix, le moteur Ferrari étant supérieur à ceux de Red Bull, Mercedes et Renault, c’est finalement un boulet que traîne l’écurie italienne, qui doit composer avec ses pannes récurrentes.

Charles Leclerc, pourtant en tête du GP de Barcelone, a été contraint d’abandonner suite à une panne moteur (crédit : Sam Bloxham, Motorsport Images)

C’est simple, depuis le début de la saison, l’équipe a été contrainte à l’abandon lors de 6 Grands Prix, dont un double abandon terrible à Bakou, alors que les deux voitures jouaient la victoire ou le podium. Dans ces 6 abandons, 4 sont issus de pannes mécaniques, et si l’on étend ces problèmes de fiabilité aux autres écuries motorisées Ferrari, le bilan s’alourdit à plus de 16 abandons… Face à la glaçante fiabilité des Mercedes ou du rythme infernal des Red Bull, ces erreurs se payent cash. 

Concernant le bilan comptable, c’est finalement près de 100 points qui séparent Charles Leclerc et Max Verstappen, pourtant équipés de machines aux performances plus ou moins proches. De même, du côté des constructeurs, Ferrari se concentre désormais sur les poursuivants que son Mercedes, de retour à 30 points, plutôt que sur le poursuivi, Red Bull, qui a pris le large avec plus de 130 points d’avance. Bref, le titre est à oublier pour cette année…

Une Ferrari F1-75 en quête de performance

Une autre justification à cette perte de vitesse dans la course au titre et aux victoires pourrait être la chute de performance de la Ferrari face à ces concurrents directs. En début de saison, la monoplace rouge semblait impériale, notamment dans des domaines ou l’on ne l’attendait pas il y a quelques années ; les virages lents et la gestion des gommes. Bien que plus chargée aerodynamiquement par rapport à la Red Bull, la F1-75 parvenait, à l’aide de son moteur (et des abandons), à s’adjuger victoires et podiums.

la F1-75, performante au début de saison, n’a su contrer les nouvelles évolutions de Red Bull et Mercedes, et demeure morphologiquement inchangée par rapport à ses concurrentes (crédit : Scuderia Ferrari)

Mais le développement a pointé le bout de son nez. Très vite, une nouvelle Red Bull, plus précise, mieux sculptée est apparue. La Mercedes également, a accepté son sort et s’est décidée à l’optimiser, si bien que désormais, l’air de la victoire ne semble plus très loin. Et Ferrari dans tout ça, avec quelques améliorations et développement a su tenir tête à Red Bull, mais semble depuis peu perdre pied. Les restrictions et le rehaussement du plancher, destiné à limiter le marsouinage, portent préjudice à Ferrari qui perd dès lors en performance.

Le choix donc, d’optimiser un package avant d’en apporter un nouveau semblait être le bon en début de saison, il fallait laisser place à de la patience, comme lors d’une partie d’échecs, placer les pions les uns après les autres. Mais quand le moment est venu d’attaquer et d’apporter une réelle modification, c’est Red Bull qui a su prendre les devants, embrassant le risque et en tirer tous les bénéfices. Ferrari a voulu jouer le choix de la sécurité, mais finalement, ne rien risquer est un risque encore plus grand…

Un manque de leadership dans les stands

Elle commence à devenir redondante, cette image du pit-wall Ferrari aux airs d’un cirque grotesque. Elle est devenue connue, la parodie de Mattia Binotto maquillé en clown. Et pourtant, c’est peut-être mérité tant les stratèges et ingénieurs Ferrari ont sabordé leur équipe cette saison. En 14 Grand Prix, la Scuderia n’en a remporté que 4, lorsque la monoplace avait la possibilité d’en conquérir bien plus. Si les abandons ont été mentionnés un peu plus haut, la stratégie joue aussi un rôle important dans le marasme Ferrari.

Le pit-stop de la honte pour Ferrari, pas prête à accueillir Carlos Sainz dans les stands, et délaissant un pistolet à l’abandon (crédit : F1 Twitter)

C’était un mal récurrent chez la Scuderia, mais qui semblait enfin résolu depuis l’an dernier, lorsque Ferrari ne jouait pas pour les premières places. Cependant, il semblerait que lorsque l’écurie joue la victoire, la règle d’or convient de ne pas faciliter la tâche au pilote. Le premier exemple en tête pourrait être celui de Monaco, ou Charles Leclerc, poleman, ne parviendra pas à convertir son tour de qualification en victoire le lendemain. La faute à quoi ? Un arrêt aux stands trop précoce, pour chausser des pneus dont il se débarrassera finalement quelques tours plus tard, après avoir perdu la tête et le podium lors de son Grand Prix.

Il est également possible de mentionner la masterclass de Silverstone, ou Carlos Sainz et Charles Leclerc en tête, auraient du sécuriser un doublé. Mais la Scuderia, ne pouvant se résoudre à choisir entre les deux pilotes, a sacrifié la course de Leclerc, qui terminera finalement 5ème… Enfin, l’on peut également citer en mention spéciale la Hongrie et le flair pour les pneus durs qui n’auront finalement jamais fonctionné, ou encore le retard à l’allumage pour appeler et faire chausser à Sainz ses pneus lors du Grand Prix de Zandvoort.

Ils étaient attendus en 2022, et finalement, les stratèges Ferrari n’ont pas répondu présents. Pire encore, ils ont manqué de sang-froid et de leadership lorsqu’il le fallait. Le problème de communication en interne, que ce soit par Binotto qui éteint les incendies à l’aide d’une cuillère d’eau, ou qu’aucun leader n°1 n’ait été désigné (le board Ferrari souhaite voir Sainz, le garage souhaite voir Leclerc) font de Ferrari les clowns du paddock pour le moment. Il faut absolument relever la tête en cette fin de saison pour l’écurie italienne s’ils ne souhaitent pas aborder 2023 avec leurs vieux démons.

Aux grands maux, les grands remèdes

L’une des rares éclaircies de cette saison chez Ferrari. Les deux pilotes sont au niveau de la monoplace et des concurrents (crédit : Scuderia Ferrari)

Mais alors, si la saison 2022 de la mythique écurie du cheval cabré semble ratée, il convient avant tout de nuancer. Binotto évoquait, lorsque Leclerc et Ferrari étaient en tête des classements, qu’ils ne jouaient pas le titre. Déclaration dénuée de logique ou rêve prémonitoire, toujours est-il qu’il avait finalement bien raison. Les objectifs au sein de l’équipe sont atteints, même si grand nombre de personnes souhaitaient secrètement un titre mondial.

Pour 2023, chez Ferrari, il faudra avant tout se reposer sur une monoplace très bien née. Performante, facile à régler, la F1-75 laissera en héritage une conception intéressante, et si la fiabilité et les bonnes personnes sont aux commandes, elle pourrait faire des dégâts. 
De même, le duo de pilote semble grandir et acquérir l’expérience nécessaire à la quête aux titres mondiaux. Se relever de ces échecs sera difficile, mais tant Leclerc que Sainz semblent suffisamment forts pour y parvenir et émuler tout le groupe Ferrari.

2022 restera cependant comme une déception pour Ferrari dans son histoire. La monoplace était au niveau, les pilotes également, mais la direction et l’équipe ont faillit dans leurs missions. Sauf retournement invraisemblable de situation, Max Verstappen et Red Bull finiront la saison en champions, à juste titre, et les italiens pourront s’en mordre les doigts. Il ne restera plus qu’à patienter jusqu’en mars 2023 pour voir à nouveau, une nouvelle lueur d’espoir scintiller à Maranello.

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